L'Italie a définitivement adopté jeudi une loi controversée durcissant son arsenal anti-immigration, un projet prioritaire de Silvio Berlusconi mis en chantier il y a plus d'un an dès son retour au pouvoir et qui fait notamment de l'immigration clandestine un délit.

Le Sénat, après la Chambre des députés en mai, a voté le texte, dont  plusieurs dispositions sont déjà entrées en vigueur par décrets-lois, par 157 voix pour, 124 contre et 3 abstentions. Condamnée par l'opposition, les organisations de défense des droits de l'homme, l'Eglise catholique et le Vatican, la loi a été adoptée lors d'un vote de confiance, une procédure accélérée dénoncée par la gauche.

La loi sur la sécurité et l'immigration introduit en Italie un délit d'immigration clandestine puni d'une amende de 5 000 à 10 000 euros, assortie d'une expulsion immédiate.

La prison avait d'abord été envisagée lorsque le projet a été présenté peu après le retour du Cavaliere au pouvoir en mai 2008 mais le gouvernement a fait marche arrière face à la surpopulation carcérale qui atteint un niveau record.

Sans nécessairement faire de l'immigration clandestine un délit, plusieurs pays européens, dont la France et la Grèce, ont déjà adopté des mesures similaires à cette disposition.

La loi rend également obligatoire la présentation du permis de séjour ou du passeport pour déclarer la naissance d'un enfant, une disposition critiquée par les associations qui craignent le développement du phénomène des «enfants invisibles».

Le président de l'ONG «Terre des hommes» Italie, Raffaele Salinari, a dénoncé jeudi un texte qui privera «les enfants étrangers des droits les plus élémentaires».

Le séjour des clandestins dans les centres de rétention pourra également être prolongé jusqu'à six mois (deux mois actuellement), afin de permettre leur identification en vue de leur expulsion vers leur pays d'origine.

Les «marchands de sommeil» risqueront aussi jusqu'à trois ans de prison en cas de location à des illégaux.

Le projet légalise par ailleurs les «rondes de citoyens» tout en les encadrant avec un contrôle des volontaires par les préfectures.

Il s'agit d'une concession au parti anti-immigrés de la Ligue du nord, allié du parti au pouvoir de Silvio Berlusconi, qui est à l'origine des premières «rondes sauvages» dans le nord du pays où elle est fortement implantée.

Le ministre de l'Intérieur, Roberto Maroni, un haut responsable de la Ligue, s'est déclaré «très satisfait» du vote de la loi qui «conclut un travail entamé il y a un an».

Lors du long parcours du texte au Parlement, où la droite dispose de la majorité absolue, la gauche est allée jusqu'à dénoncer un «retour à la logique des lois raciales de l'époque de Mussolini».

La sénatrice du Parti démocrate (PD, centre gauche) Anna Finocchiaro a fustigé jeudi à la télévision Sky TG24 un texte «qui n'aura aucune efficacité sur la sécurité des citoyens et qui viole gravement les droits des immigrés auxquels nous confions nos êtres les plus chers».

Selon la responsable chargée des questions d'immigration de l'organisation catholique Sant'Egidio, «une large part» des immigrés employés par des familles italiennes pour s'occuper des personnes âgées ou des enfants sont des clandestins.

 «Avec cette loi, on introduit l'idée qu'être immigré et clandestin c'est être délinquant. Ce texte va créer de nombreuses difficultés aux familles italiennes comme aux immigrés», a déclaré à l'AFP cette responsable, Daniela Pompei.

Le nombre de clandestins en Italie est estimé entre 400 000 et 500 000 personnes par Sant'Egidio.