Arnaud Montebourg, vedette du Parti socialiste, a été l'un des rares à plaisanter en pénétrant dans ce grand hôtel où se tenait le conseil national de la formation politique: «Dernière station de service avant le désert!»

C'était hier, en début de soirée. Deux jours après ce que tout le monde appelle la Berezina du PS aux élections européennes: 16,48% des voix. Au moins trois points en dessous des prévisions les plus pessimistes.

 

Presque 12 points derrière l'UMP de Nicolas Sarkozy. Presque à égalité avec Europe Écologie de Daniel Cohn-Bendit (16,28%).

Un désastre comparable à celui qu'avait connu aux européennes de 1994, Michel Rocard, alors chef du PS et tête de liste pour les élections. Avec 14% des voix à peine, il avait dû laisser sa place et renoncer à se présenter à la présidentielle de 1995.

La configuration est bien différente aujourd'hui: il y a trois ans à courir avant l'élection présidentielle de 2012. Et la première secrétaire du PS, Martine Aubry, reste pour l'instant un chef de transition. Tous les courants hostiles à Ségolène Royal, candidate malheureuse de 2007, avaient fini par se mettre d'accord sur son nom au congrès de Reims, justement parce qu'elle apparaissait comme la moins menaçante pour 2012.

Sa mission: tenter de faire oublier le psychodrame du congrès de Reims en novembre dernier, où le parti s'était violemment et précisément coupé en deux. Essayer de recoller les morceaux en faisant travailler ensemble les deux clans ennemis. Obtenir contre la droite et Sarkozy des succès pour créer une dynamique nouvelle.

Déception

Martine Aubry jouait donc tout simplement sa capacité à remettre le Parti socialiste sur les rails. Les sondages lui accordaient un peu plus de 20% des voix. Cela paraissait déjà un très mauvais résultat pour un parti qui prétend incarner l'opposition et rassembler autour de lui les autres partis de gauche. Cinq à six points derrière l'UMP, alors que normalement les élections intermédiaires en France sanctionnent durement le gouvernement.

Le résultat qui est tombé dimanche soir a estomaqué tout le monde. Alors que les verts ont fait moins de 2% à la présidentielle, Europe Écologie aura finalement le même nombre de députés que le PS: 14.

Après ce coup de massue, on pouvait penser que les heures de Martine Aubry étaient comptées. Même si les sondages de popularité ne sont pas trop mauvais pour la mairesse de Lille, sur un plan personnel, le moins qu'on puisse dire c'est qu'après six mois à la tête du PS, elle n'a pas du tout convaincu. Le fait qu'elle ne soit même pas députée au Parlement - pas plus que Ségolène Royal d'ailleurs - n'arrange rien.

Refonder le PS

Hier soir à Paris, dans une ambiance lugubre, le Conseil national du PS s'est empressé de ne rien décider, si ce n'est de «refonder» le parti. À quoi bon pousser Martine Aubry à la démission puisqu'aucun chef indiscutable ne se présente à l'horizon? Il y a toujours Ségolène Royal, qui contrôle une petite moitié du parti, mais que l'autre moitié rejette catégoriquement. Mais de ce côté, s'il y a une bonne demi-douzaine de candidats valables au leadership, jeunes ou moins jeunes, aucun ne se détache.

Tant que le PS ne se sera pas donné un vrai chef, le marasme risque de se prolonger. Face à un Nicolas Sarkozy critiqué de toute part, mais qui, avec près de 28% pour l'UMP, a brillamment réussi à unifier la droite.