La débâcle du parti travailliste de Gordon Brown aux européennes, et l'élection des deux premiers eurodéputés britanniques d'extrême droite, pourrait relancer lundi les appels à la démission d'un premier ministre de plus en plus fragilisé.

Le Labour se place à une humiliante troisième place avec 16% des voix, derrière les conservateurs (28%) et le parti europhobe Ukip (16,5%), selon des résultats pour 69 des 72 députés britanniques au Parlement européen.

Le scrutin est une victoire pour les conservateurs de David Cameron mais aussi pour le parti d'extrême droite BNP, qui avec 6% des voix obtient deux députés européens, une première pour ce parti en faveur de l'arrêt complet de l'immigration en Grande-Bretagne et contre l'intégration de la Turquie dans l'Union européenne.

Le Labour enregistre un revers historique au pays de Galles, en arrivant à la deuxième place dans cette région où les travaillistes se plaçaient depuis 1918 en tête des élections.

En Ecosse, autre fief travailliste, le parti indépendantiste SNP crie victoire avec 29% des voix, contre 21% pour le Labour.

Nick Griffin, le leader du Parti national britannique (BNP), s'est félicité du bon résultat de son parti, estimant qu'il était en partie dû au fait que les Britanniques de souche étaient traités comme des «citoyens de seconde classe» dans leur propre pays, sur la radio BBC4.

L'autorité de Gordon Brown pourrait être sérieusement malmenée lundi soir au cours d'une réunion à partir de 17h00 GMT avec les parlementaires de son parti, alors qu'une lettre appelant à sa démission circule. Les députés «rebelles» espèrent récolter au moins 70 signatures, ce qui permettrait de forcer l'élection d'un nouveau leader du Labour.

La secrétaire d'État à l'Environnement Jane Kennedy a annoncé son départ du gouvernement lundi, ne ménageant pas ses critiques envers le premier ministre alors que 10 ministres ont déjà déserté.

Gordon Brown «a dit lui-même vendredi au cours d'une conférence de presse qu'il voulait continuer à se battre. Ma peur est qu'il emmène le parti travailliste vers sa perte», a-t-elle déclaré.

Le premier ministre devait parachever lundi un remaniement ministériel dont les grandes lignes ont été annoncées vendredi.

Le Sun, qui titre sur «le désastre des élections européennes», estime que les heures sont comptées pour Gordon Brown à Downing Street.

Pour le Guardian, de centre gauche, «les travaillistes ont souffert une longue et sombre nuit d'humiliation» tandis que le Times analyse «la déroute» du Labour en soulignant que ce sont les partis marginaux qui ont profité du faible taux de participation (environ 34%).

Selon la presse, Gordon Brown tentera de se concilier les députés tentés par une mutinerie en promettant une enquête longuement attendue sur les conditions d'entrée en guerre de la Grande-Bretagne avec l'Irak et l'engagement de ralentir la privatisation partielle et très controversée de Royal Mail, la poste britannique.

De nombreux députés travaillistes, meurtris par le scandale provoqué par la révélation des abus du système de notes de frais, s'inquiètent pour leur siège alors que des élections législatives doivent être convoquées au plus tard en juin 2010.

Lord Falconer, ancien ministre des Finances et figure emblématique du Labour, a renouvelé son appel à un départ de Gordon Brown lundi dans le Times.

«C'est tellement difficile pour Gordon Brown, après 12 ans en tant que premier ministre ou ministre des Finances de représenter le changement de façon convaincante», a souligné Charles Falconer.