La France vient de faire un affront sans nom aux milliers de soldats anglais - et canadiens - tués lors du débarquement de Normandie en omettant d'inviter la reine d'Angleterre Élisabeth II aux cérémonies de commémoration prévues la semaine prochaine.

C'est du moins l'opinion du Daily Mail, quotidien populaire anglais, qui pourfend depuis quelques jours «l'incurie» diplomatique de l'Élysée en attaquant tous azimuts le président français Nicolas Sarkozy.

 

Le chef d'État est tellement pressé de se faire photographier sur les plages normandes avec le président américain Barack Obama à l'occasion du 65e anniversaire du Débarquement qu'il est prêt à «oublier» les morts anglais et canadiens, écrit le journaliste Stephen Glover.

M. Sarkozy, tranche le scribe, est un «egomaniaque» qui devient «une source d'embarras croissante pour ses compatriotes et une source d'amusement pour le reste de l'Europe».

Élargissant l'analyse, M. Glover affirme voir dans le comportement de Nicolas Sarkozy le reflet d'une «psychose nationale plus profonde» qui empêche la France de digérer la Seconde Guerre mondiale et la pousse à nier le rôle joué par la Grande-Bretagne dans la libération de son territoire.

Mercredi, le porte-parole du gouvernement français, Luc Chatel, a cherché à écarter la polémique en soulignant que les cérémonies prévues la semaine prochaine étaient d'abord «franco-américaines».

Des cérémonies élargies regroupant des représentants de tous les pays concernés ont eu lieu par le passé et d'autres auront lieu «à l'avenir», a-t-il ajouté en précisant qu'une invitation avait été faite à M. Brown après que Londres eut manifesté son intérêt.

«Ce n'est pas à la France de définir la représentation britannique», a souligné M. Chatel en ajoutant que la reine était «évidemment» la bienvenue si elle souhaite participer.

Bien que sa présence n'ait pas été évoquée par le porte-parole lors de son point de presse, le premier ministre canadien Stephen Harper figure aussi parmi les personnes invitées par l'Élysée.

Son entourage ne montrait guère d'empressement hier à se lancer dans la mêlée diplomatique relativement à la nécessité d'inviter la reine. «Je préfère que vous référiez vos questions à ce sujet à Buckingham Palace», a indiqué le porte-parole de M. Harper, Dimitri Soudas.

Au dire du correspondant parisien du Times de Londres, Charles Bremner, toute l'affaire est une tempête dans un verre d'eau puisque la reine ne s'attendait pas à être invitée cette année. Un point confirmé hier par un porte-parole de la famille royale.

Il n'y a aucune colère, a précisé M. Bremner, qui reproche à Nicolas Sarkozy d'avoir gaffé en cherchant, pour satisfaire son désir «d'auto-promotion», à se retrouver seul avec Barack Obama à une date aussi sensible.

Le journaliste Jean-Michel Apathie, de la radio RTL, estime que la diplomatie française s'est placée dans un «sacré guêpier» en rêvant d'images où «l'on verrait, seuls, Nicolas Sarkozy et Barack Obama, les pans de veste balayés par le vent de la liberté...»

Reprenant l'histoire sous un autre angle que le Daily Mail, il estime que l'épisode reflète la volonté de la France de se mesurer à la puissance américaine.

«Nous continuons de vivre dans l'illusion d'un tête-à-tête avec l'Amérique. Nous continuons... à refuser la domination d'un pays si jeune... sur un pays saturé d'épreuves et qui a naguère illuminé le monde par la puissance de ses idées», conclut M. Apathie.