Le scandale des notes de frais a entraîné vendredi une première sanction au sein du gouvernement britannique, tandis qu'un sondage montrait que le Labour de Gordon Brown tout comme l'opposition pourraient en subir le contrecoup lors des élections européennes.

Un sous-secrétaire d'Etat britannique à la Justice, Shalik Malik, a été suspendu de son poste dans l'attente des résultats d'une enquête sur ses notes de frais, a annoncé Downing Street. C'est la première fois qu'un membre du gouvernement du Premier ministre travailliste Gordon Brown est suspendu dans le cadre du scandale des notes de frais excessives des députés et ministres.

M. Brown a demandé à un de ses conseillers d'enquêter sur les révélations du quotidien Daily Telegraph, qui affirme que M. Malik s'est fait rembourser 66v 827 livres (75 000 euros) pour une résidence secondaire à Londres, alors qu'il ne paierait que 100 livres (112 euros) par semaine, un loyer inférieur au marché, pour sa résidence principale située en dehors de la capitale.

Un porte-parole de M. Brown a précisé que les conclusions de l'enquête devraient être rendues d'ici quelques jours. M. Malik pourrait reprendre ses fonctions s'il était blanchi et aucun remplaçant n'a pour l'instant été nommé, a-t-il ajouté.

M. Malik, qui se serait également fait rembourser 730 livres (817 euros) pour un fauteuil de massage, a assuré qu'il s'agissait de «dépenses légitimes» et promis de donner à une oeuvre caritative le millier de livres qu'il a obtenu du Parlement pour l'achat d'un home-cinéma.

Le scandale des notes de frais a déjà fait tomber deux têtes: l'ancien ministre travailliste Elliot Morley a été suspendu du Labour, et l'un des principaux conseillers du chef des Conservateurs David Cameron, Andrew MacKay, a démissionné de ses fonctions.

M. Morley aurait perçu indûment plus de 16 000 livres (18 000 euros) en remboursement d'intérêts d'un crédit immobilier qui était pourtant déjà arrivé à échéance. Il a plaidé une «erreur» comptable mais une association de défense des contribuables a réclamé une enquête policière contre l'ex-ministre, également visé par une campagne lancée par le tabloïde The Daily Mail exigeant la poursuite des députés coupables d'«abus flagrants».

M. MacKay a quant à lui obtenu le remboursement d'une partie d'un prêt immobilier pour une résidence londonienne tandis que son épouse, également député, se faisait indemniser pour leur deuxième maison en province. «Inacceptable», a tranché le leader conservateur David Cameron.

Les électeurs pourraient eux aussi sanctionner leurs représentants.

Les intentions de vote en faveur des Tories pour les élections européennes, qui se tiennent le 4 juin au Royaume-Uni, ont chuté de neuf points en une semaine, de 37% à 28%, tandis que le Labour a reculé de trois points, de 22% à 19%, selon un sondage YouGov paru dans le tabloïde The Sun.

Plusieurs politiciens ont par ailleurs évoqué la possibilité que le mécontentement des électeurs fasse le lit de l'extrême droite. Cela «pourrait renforcer le vote en faveur du BNP» (British National Party), l'extrême droite britannique, a estimé Clare Short, ancienne ministre travailliste également éclaboussée par le scandale.

Jeudi, la secrétaire d'Etat aux Collectivités locales, Hazel Blears, avait déjà jugé que l'affaire «alimentait cette frénésie selon laquelle tous les politiciens seraient les mêmes... et c'est exactement le terrain du BNP».

«Le vote-sanction dû au scandale des notes de frais est un bonus supplémentaire», a reconnu à l'AFP le président du BNP, Nick Griffin. La formation a sorti des affiches montrant des députés travaillistes et conservateurs à tête de cochon se disputant des liasses de billets. «Punissez les cochons», titre le poster.