Des dizaines de milliers de personnes manifestaient vendredi en France à l'occasion de la fête du travail du 1er mai marquée, pour la première fois de son histoire, par l'unité des syndicats qui dénoncent la politique du président Nicolas Sarkozy face à la crise.

Plus de 280 défilés unitaires sont prévus dans tout le pays dont le plus important dans l'après-midi à Paris, par un temps généralement clément, voire ensoleillé. Autre première pour ce défilé du 1er mai, devenu «fête du travail» chômée depuis 1947 en France, la participation des partis politiques de gauche (opposition).

Quelque 50 000 personnes, selon les organisateurs, manifestaient à Bordeaux (sud-ouest) de 15.000 à 30.000 à Toulouse (sud-ouest) et entre 8500 et 35 000 à Marseille (sud).

De nombreux salariés du secteur privé touché par les suppressions d'emplois à la chaîne, ouvraient les marches comme à Compiègne, au nord de Paris, avec les ouvriers du groupe Continental (pneumatiques) qui prévoit la fermeture d'un site employant plus d'un millier de personnes.

A Grenoble, se succédaient au micro des salariés de Caterpillar (engins de chantier) également touchés par les suppressions d'emplois prévues par le groupe américain. Derrière un cercueil, défilaient des salariés de l'équipementier automobile allemand Schaeffler, dont une usine va être fermée dans la région. «Du travail, pas la mort», peuvait-on lire sur la banderole des Schaeffler.

Les syndicats espèrent faire aussi bien, voire mieux que les deux précédentes manifestations qui ont réuni entre 1,2 et 3 millions de personnes le 19 mars et entre 1 et 2,5 millions le 29 janvier.

Le ministre du Travail Brice Hortefeux a quant à lui minimisé la portée historique des manifestations unitaires, estimant jeudi qu'elles avaient un air de «déjà vu» en 2002 et 2003.

Ce mouvement est dirigé contre la politique du gouvernement accusé de ne pas suffisamment relancer la consommation et de maintenir certaines réformes contestées (hôpital, éducation..). Est aussi visé le patronat, soupçonné de profiter de la crise pour multiplier les plans sociaux tout en continuant d'empocher des dividendes.

Dans un pays où la contestation s'est radicalisée comme nulle part ailleurs en Europe, les Français sont, selon un sondage publié jeudi, 72% à soutenir la nouvelle journée de mobilisation, ainsi que les revendications des syndicats sur l'emploi, le pouvoir d'achat et la relance économique.

La fièvre sociale en France, avec quelques conflits emblématiques dans des groupes internationaux comme Continental ou Caterpillar, s'est traduite par des grèves dures, des blocages d'usine, des séquestrations de patron et - dans un cas- la mise à sac de bureaux.

Si le gouvernement «reste sourd à une nouvelle mobilisation historique, on sera assez proche d'une situation de crise assez forte», a jugé vendredi le Benoît Hamon, porte-parole du parti socialiste.

La détérioration du marché du travail en France, sous l'effet de la crise économique, a été particulièrement marquée depuis le début de l'année, avec plus de 240.000 nouveaux demandeurs d'emploi qui portent le total à 2,44 millions.

Nicolas Sarkozy, qui avait annoncé en décembre un plan de relance de 26 milliards augmenté en janvier d'une enveloppe de 2,6 milliards d'euros en faveur des ménages les plus fragiles, a déjà répondu qu'il gardait le «cap dans la tempête» excluant toute idée de relance par une augmentation du pouvoir d'achat.

Le gouvernement français estime que sa stratégie de relance par l'investissement est confortée par la relative résistance de la France face à la crise. Il estime à 2,5% la contraction de l'activité en 2009, contre 6% en Allemagne par exemple.