Rama Yade vient d'être qualifiée de « femme la plus populaire de France « par l'hebdomadaire Le Nouvel Observateur. Notre collaborateur nous explique comment la secrétaire d'État aux Droits de l'homme de Nicolas Sarkozy, icône de la diversité et vraie pro de la politique, a séduit les Français.

«Rama Yade? Elle impressionne par son assurance, son savoir-faire et... son ambition, explique un diplomate canadien qui l'a côtoyée à plusieurs reprises. Bien sûr, elle occupe pour l'instant un poste essentiellement symbolique, mais elle manoeuvre avec beaucoup de sens politique. Elle devrait aller loin...»

 

À 32 ans, la benjamine du gouvernement français a en effet un bel avenir devant elle. Le secrétariat d'État aux Droits de l'homme tout juste créé auquel elle était nommée en mai 2007 n'a rien d'un ministère majeur. De la part de Nicolas Sarkozy, cette création relevait plutôt de la communication politique, pour ne pas dire de la poudre aux yeux.

Il n'empêche que, d'une certaine manière, la belle et jeune diplômée de Sciences Po a déjà brillamment gagné son premier pari: accéder à une véritable existence médiatique et politique, alors qu'elle aurait bien pu rester cantonnée au rôle de caution «immigrée», condamnée à faire de la figuration dans les photos officielles.

La plus populaire

Dans les plus récents sondages sur la cote de popularité des personnalités politiques, Rama Yade est tout en haut de la liste. Désormais très loin de sa rivale Rachida Dati, autre femme issue de l'immigration, star politique tombée en disgrâce.

Les Français aiment les héros sans tache. Le parcours de Rama Yade tient un peu du conte de fées. Elle est née à Dakar et n'est arrivée en France qu'à l'âge de neuf ans et demi. Son père était un conseiller du président Senghor, mais a abandonné sa femme et ses quatre filles en France pour rentrer au Sénégal.

La mère de Rama, jadis professeure à Dakar, a dû faire des ménages pour boucler les fins de mois. Et elle a élevé ses filles dans un HLM de Colombes, en banlieue parisienne. Accéder au conseil des ministres de la France à 30 ans avec un tel cursus, après un bref passage comme haut fonctionnaire au Sénat, est donc un véritable exploit.

Son bilan au gouvernement? C'est une autre histoire. Le 10 décembre dernier, journée des Droits de l'homme, c'est son ministre de tutelle Bernard Kouchner en personne qui déclarait que la création de ce secrétariat d'État était «une erreur». Il venait de découvrir que politique étrangère et droits de l'homme ne faisaient pas bon ménage.

Et en effet que peut faire la jeune Rama Yade alors que la France, comme tous les pays, traite avec des pays pas trop démocratiques? On l'a vue faire une sortie virulente contre le Libyen Kadhafi, mais cela n'a pas empêché ce dernier de venir faire une visite officielle interminable en France et de narguer Paris. Lorsque Sarkozy est allé en Chine, Rama Yade a été écartée du voyage. En Tunisie, elle a été priée de se faire invisible. Comme le disait l'ancien président de Médecins sans frontières, Rony Brauman, «la création de ce secrétariat d'État est une absurdité, ou alors il aurait fallu l'affecter aux Droits de l'homme... en France».

Rama Yade aurait pu sombrer dans l'indifférence générale. Ou le ridicule. Avec un mélange de séduction médiatique, de capacité à encaisser les coups et d'habileté dans le maniement de la langue de bois, elle a réussi à se faire prendre au sérieux par le petit monde politico-médiatique.

À la fin de l'année dernière, Nicolas Sarkozy lui proposait avec insistance de devenir numéro un sur la liste de ses candidats UMP aux élections européennes? Elle avait le «culot» de décliner publiquement cette offre et d'affronter le courroux présidentiel, mais sans se faire virer du gouvernement. Du coup, elle devenait celle qui avait osé dire non à Sarkozy.

Beau début de carrière pour la «benjamine» qui, avec beaucoup de professionnalisme, lorgne désormais sur une implantation politique locale... à Colombes, dans ce département des Hauts-de-Seine qui est également un fief sarkozyen. Rama Yade a du temps devant elle. Et aux législatives de 2012, elle aura 35 ans à peine.