Le père incestueux autrichien Josef Fritzl, jugé depuis lundi devant la Cour d'assises de Sankt-Pölten, près de Vienne, a été confronté mardi au témoignage vidéo de sa fille Elisabeth, qu'il a séquestrée et violée pendant 24 ans dans sa cave aménagée en cachot.

«Josef Fritzl a déjà tout dit», a affirmé son avocat, Rudolf Mayer, interrogé par l'AFP peu avant l'ouverture de l'audience, laissant entendre que son client s'abstiendrait d'intervenir mardi dans les débats. Il a aussi indiqué que Fritzl n'avait pas arrêté de «stratégie» particulière pour se défendre lors du procès qui se poursuivra à huis-clos, procédure habituelle pour assurer la protection des victimes.

En revanche, l'accusé a pu être photographié pour la première fois de face mardi, alors qu'il maintenait jusque-là son visage caché par un grand classeur bleu devant les photographes et les caméras autorisés à filmer en dehors des audiences à huis-clos. Un photographe de l'agence de presse autrichienne APA, la seule autorisée à travailler au sein du Tribunal avec la chaîne de la télévision publique ORF, a pu prendre ce cliché à l'issue de la pause-déjeuner.

Les onze heures d'enregistrement de la déposition d'Elisabeth, victime d'un «martyre inimaginable», selon la formule de la Procureure Christiane Burkheiser, constituent le principal témoignage des victimes mis à la disposition des jurés.

Au sein de la famille Fritzl, seul l'un des frères d'Elisabeth, Harald, a accepté de livrer lui aussi un témoignage filmé d'environ une heure, selon le porte-parole du Tribunal Franz Cutka.

Tous les autres membres de la famille, y compris l'épouse de l'accusé, et les six enfants de l'inceste, ont refusé de témoigner, comme le Code pénal autrichien les y autorise.

Le témoignage d'Elisabeth, qui répond aux questions de la Procureure et de l'avocat de Fritzl, sera visionné par petites séquences.

Lundi, Josef Fritzl avait plaidé coupable d'inceste, de viols, séquestration et menaces, mais avait récusé les chefs d'accusation de meurtre et esclavage. Il nie en effet toute responsabilité dans la mort en 1996, dans la cave-cachot de la demeure familiale à Amstetten, à 130 km à l'ouest de Vienne, deux jours après sa naissance, d'un nourrisson auquel il aurait, selon sa fille, refusé des soins extérieurs. L'accusation de meurtre est passible de la prison à vie.

Il a également rejeté l'accusation d'esclavage, passible de 10 à 20 ans de détention et jugée pour la première fois en Autriche. Seule la peine la plus lourde s'appliquera à Josef Fritzl.

Outre le témoignage d'Elisabeth, la Cour pourrait entendre un exposé de la psychiatre Adelheid Kastner. Elle avait dans son rapport, dont des extraits ont filtré dans la presse, conclu à la responsabilité pénale de l'accusé tout en soulignant qu'il souffrait de troubles graves de la personnalité.

Ses conclusions pourraient jouer un rôle-clé dans le verdict final, prévu a priori pour vendredi, voire jeudi.

D'autres expertises concernent la mort du nourrisson et le dispositif de verrouillage électronique des portes de la cave-cachot installé par Fritzl, ingénieur de formation et bricoleur passionné.

Il avait lui-même aménagé ce réduit de 40 m2, incluant deux petites chambres, une cuisine avec salle de douche mais sans fenêtre et donc dépourvu de ventilation. Il y régnait en permanence, selon la Procureure, une «atmosphère morbide et une odeur de moisi».

La presse autrichienne s'est surtout intéressée à la personnalité de Josef Fritzl au lendemain de l'ouverture du procès. Le quotidien populaire Kronen Zeitung a titré «Lâche jusqu'au tout dernier moment», allusion au fait qu'il ait caché son visage, et Heute a illustré cette photo d'un «Maintenant, il a des remords, 25 ans après, il est trop tard».