L'attaque meurtrière d'une caserne de l'armée britannique, dans laquelle deux soldats ont été tués samedi, a ravivé la crainte d'un retour à la violence en Irlande du Nord et d'une déstabilisation d'un processus de paix encore fragile.

Le premier ministre britannique Gordon Brown a dénoncé dimanche une «lâche» attaque, en promettant qu'«aucun meurtrier ne pourra faire dérailler un processus de paix qui a le soutien des gens en Irlande du Nord». Samedi vers 15h40 HAE, des hommes lourdement armés ont attaqué le quartier général d'un régiment du génie à Massereene, dans le comté d'Antrim, à environ 25 km au nord-ouest de Belfast.

Le ministère britannique de la Défense a confirmé le décès de deux soldats. La police nord-irlandaise (PSNI) a précisé que quatre autres personnes --deux militaires et deux livreurs de pizzas-- avaient été blessées, l'une d'entre elles étant dans un état critique.

La PSNI a confirmé que les assaillants étaient au nombre de trois, deux tireurs et un complice au volant d'une voiture à bord de laquelle ils ont pris la fuite. Armés de mitraillettes, ils ont ouvert le feu depuis leur voiture, alors que les livreurs venaient d'arriver à la base.

Sans hésitation, ils se sont ensuite approchés pour tirer à nouveau sur les blessés à terre, selon le commissaire Derek Williamson, qui a parlé de «meurtre de masse». Les deux soldats tués étaient âgés d'une vingtaine d'années et s'apprêtaient à être envoyés en Afghanistan.

Le dernier soldat britannique décédé en Irlande du Nord avait été tué en février 1997.

Un an plus tard, le 10 avril 1998, étaient signés les accords de paix dits du Vendredi saint, qui mirent un terme aux «Troubles», les 30 années de violences ayant causé depuis 1969 la mort d'environ 3.500 personnes.

Depuis, l'Ulster a connu des soubresauts sporadiques. L'attaque de samedi n'a pas été revendiquée, mais les républicains dissidents, opposés au processus de paix et à l'origine d'une recrudescence de la violence dans la province ces derniers mois, ont été pointés du doigt.

Le plus important de ces groupes est l'IRA-véritable, né en octobre 1997 d'une scission avec l'Armée républicaine irlandaise (IRA), et qui s'est fait connaître en commettant le 15 août 1998 l'attentat d'Omagh, le plus sanglant du conflit avec 29 morts.

 

L'IRA, la principale milice catholique d'Irlande du Nord, a pour sa part renoncé à la violence et démantelé son arsenal en 2005.

L'attaque est survenue alors que le chef de la PSNI Hugh Orde a confirmé cette semaine que des soldats allaient être chargés de mener des opérations secrètes de surveillance des dissidents.

Quelques jours plus tôt, M. Orde avait averti que la menace d'attaques contre des policiers et des militaires n'avait jamais été aussi élevée depuis une décennie.

Plus d'une dizaine de tentatives de meurtres contre des policiers ont ainsi été enregistrées ces 18 derniers mois.

Et fin janvier, une voiture piégée avec une bombe de 136 kg à bord avait été découverte près d'une école à Castlewellan (sud-est). Elle devait à l'origine viser une base militaire britannique, mais ce projet avait été abandonné, à en croire un appel téléphonique reçu par la police.

Cette escalade de la violence suscite des craintes pour la stabilité du gouvernement de Belfast, au sein duquel protestants et catholiques se partagent le pouvoir depuis le 8 mai 2007.

Le premier ministre nord-irlandais Peter Robinson, chef du Parti unioniste démocrate (DUP/protestant), a condamné un «acte futile (commis) par ceux qui n'ont aucun soutien public et aucune perspective de réussir dans leur campagne». «Cela ne réussira pas», a-t-il estimé.