La Russie a proposé mercredi un sommet rassemblant à la fois les pays consommateurs de gaz russe et l'Ukraine samedi à Moscou pour tenter de débloquer l'approvisionnement des Européens, qui menacent les deux parties en conflit d'actions en justice si la situation perdure.

«Je propose de convoquer un sommet des Etats consommateurs de gaz russe et des pays de transit à Moscou, samedi 17» janvier, a déclaré le président Dmitri Medvedev, de sa résidence de Barvikha, dans la banlieue de la capitale russe.

«J'espère que cette réunion (...) permettra de parvenir à sortir de la situation actuelle et permettra d'éviter ce type de situations à l'avenir», a poursuivi M. Medvedev, qui a précisé avoir fait part de cette proposition au président de la Commission européenne, José Manuel Barroso.

Du côté de l'UE, la présidence tchèque a réagi en se bornant à avertir que la crise du gaz aurait des «conséquences politiques» sur les relations de Bruxelles avec la Russie et l'Ukraine dans le cas où elle ne serait pas rapidement réglée.

Quelques heures plus tôt, M. Barroso avait haussé le ton, menaçant ces deux Etats d'actions en justice des compagnies gazières européennes si les livraisons à l'UE n'étaient pas rétablies de manière «urgente».

Quant au président ukrainien Viktor Iouchtchenko, il «a souligné à maintes reprises que l'Ukraine était prête à participer à toute discussion constructive», a déclaré Bogdan Sokolovski, son conseiller chargé de la sécurité énergétique.

Celui-ci a néanmoins refusé de préciser si M. Iouchtchenko allait assister au sommet, notant seulement que «l'invitation officielle n'avait pas encore été envoyée».

Dmitri Medvedev, qui s'exprimait en présence des chefs des gouvernements bulgare Sergueï Stanichev, slovaque Robert Fico et moldave Zinaïda Grecianii ainsi que de leur homologue russe, Vladimir Poutine, a insisté sur le fait que «le blocage des livraisons par l'Ukraine continue».

«Nous ne devrions pas être les otages de la situation politique qui prévaut dans d'autres pays (...) malheureusement nous sommes tous des otages de la situation politique là-bas, des otages de la crise politique en Ukraine», a jugé le président russe.

Ioulia Timochenko, le Premier ministre ukrainien qu'un conflit oppose à Viktor Iouchtchenko depuis des mois, a, quant à elle, promis dans la matinée que l'Ukraine rétablirait le transit du gaz par son territoire dès que la Russie le lui ferait à nouveau parvenir. Elle s'est en outre dite prête à rencontrer Vladimir Poutine.

Mardi, une tentative de reprendre les livraisons à destination du Vieux Continent avait échoué, laissant des centaines de milliers d'Européens grelotter pour la deuxième semaine consécutive.

«Les responsables de la Commission européenne devraient user de leur influence sur l'Ukraine pour assurer l'approvisionnement en gaz», a estimé M. Poutine mercredi.

Il a par ailleurs réfuté les arguments de l'Ukraine, qui dit ne pas pouvoir laisser passer le gaz sur son territoire dans le gazoduc choisi par la Russie, sinon l'est et le sud ukrainiens en seraient privés.

«Si, sur un plan politique, le président Iouchtchenko prétend qu'il n'a pas bloqué le transit vers l'Europe, dans la pratique on voit bien que c'est le cas», a commenté le Premier ministre russe.

Les autorités à Kiev ont pour leur part affirmé que Gazprom cherchait à ternir l'image de l'Ukraine en tant que pays de transit fiable, en choisissant un itinéraire «impossible» pour transporter le gaz vers l'Europe.

Les chefs des gouvernements bulgare et slovaque n'ont pas non plus été avares en critiques pendant leur séjour à Moscou, tout en se refusant à trancher entre les belligérants.

«La pire chose de mon point de vue est que des millions de citoyens d'Europe se sentent pris en otages et que des centaines de milliers de personnes souffrent vraiment», s'est emporté le Bulgare Sergueï Stanichev.

Gazprom a proposé que l'Ukraine ponctionne ses réserves pour approvisionner la Slovaquie et la Moldavie, et d'accorder un montant de gaz équivalent à l'Ukraine pour compenser.

D'ores et déjà, ce géant gazier a perdu 1,1 milliard de dollars de chiffre d'affaires depuis le 1er janvier en raison de la crise avec l'Ukraine, a regretté le président Medvedev.

Moscou avait coupé l'approvisionnement de l'Ukraine le 1er janvier 2009 et a ensuite accusé Kiev de siphonner le gaz destiné aux Européens, d'où la décision de la Russie d'interrompre le 7 janvier toutes ses livraisons de gaz vers l'Europe afin de mettre un terme à ce «vol».