La justice française a prononcé mercredi la relaxe des six responsables jugés pour la mort de 117 personnes qui ont développé la maladie de Creutzfeldt-Jakob, dite maladie de la «vache folle» après avoir été traitées dans les années 1980 à l'hormone de croissance.

Les familles des victimes, choquées par ce jugement, ont immédiatement crié leur colère et affirmé qu'elle se tournaient vers la ministre de la Justice Rachida Dati pour obtenir un nouveau procès en appel.

Près de vingt ans après le premier cas en France, six responsables du domaine médical et pharmaceutique, comparaissaient pour «graves fautes d'imprudence et de négligence» dans la collecte, l'extraction et le conditionnement de cette hormone, fabriquée à l'époque à partir de l'hypophyse, une glande crânienne prélevée sur les cadavres.

C'est parce que certains lots étaient infectés que 117 personnes, traitées enfants en raison de leur petite taille, sont mortes à ce jour de la maladie de Creutzfeldt-Jakob (MCJ) après une longue et terrible agonie.

Le tribunal correctionnel de Paris a dédouané les six responsables estimant qu'à l'époque des faits, les connaissances scientifiques ne leur permettaient pas d'établir avec certitude le risque de contamination.

Selon le jugement, rien ne permet de penser que ces hauts responsables «avaient conscience à partir de 1980 (...) d'exposer les malades traités par ce médicament au risque de contamination par la MCJ».

Parmi eux figurent Fernad Dray, 86 ans, responsable de l'extraction et de la purification de l'hormone dans son laboratoire de l'Institut Pasteur, Marc Mollet, 84 ans, responsable du conditionnement au sein de la Pharmacie centrale des hôpitaux (PCH), Elisabeth Mugnier, 59 ans, pédiatre responsable de la collecte des hypophyses dans les hôpitaux, et Micheline Gourmelen, 72 ans.

La relaxe avait été requise pour Henri Cerceau, 71 ans, directeur de la PCH de 1981 à 1991 et Jacques Dangoumau, 73 ans, directeur de la pharmacie et du médicament au ministère de la Santé de mars 1982 à avril 1987.

Un septième prévenu, Jean-Claude Job, ancien responsable de l'association France-Hypophyse, particulièrement visé par les parties civiles car il avait le monopole du traitement, est mort en octobre.

Le tribunal a néanmoins retenu une responsabilité civile pour Elisabeth Mugnier et Fernand Dray, qui devront verser des dommages et intérêts à quelques victimes, celles qui n'ont pas encore été dédommagées par l'Etat au nom de la solidarité nationale.

Ce jugement, rendu en 10 minutes, intervient après 16 ans d'instruction et quatre mois de procès fleuve durant lesquels les familles des victimes sont venues raconter leur tragédie.

Il était très attendu après le fiasco de l'enquête globale sur le scandale du sang contaminé par le sida, soldé en 2003 par un non-lieu général qui avait provoqué un tollé en France.

«C'est une deuxième mort que l'on vit, c'est terrible pour des parents, je crois qu'il n'y a pas d'égalité dans la justice», s'est insurgée Jeanne Goerrian, présidente de l'Association des victimes de l'hormone de croissance (AVHC).

Le président de l'Association française des transfusés (AFT) Olivier Duplessis a dénoncé un «mépris insupportable» qui «confirme l'impunité systématique des scandales sanitaires, après celui du sang contaminé où les transfusés ont été privés de procès».

L'avocat d'une dizaine de victimes de l'hormone de croissance, Me François Honnorat, a dénoncé un jugement «absurde» et «dangereux» car il revient selon lui à disculper des groupes pharmaceutiques qui mettent des produits à risque sur le marché.

Les traitements à l'hormone de croissance dans les années 80 ont provoqué la mort à ce jour de 117 jeunes sur les 1.698 enfants trop petits qui avaient reçu ce traitement.