Le Parquet russe a déclaré mardi avoir établi que la Géorgie avait commis un acte de «génocide» contre les Ossètes pendant la guerre éclair d'août, tout en révisant à la baisse son bilan des morts, civils et militaires.

«On peut dire que nous avons été témoins du génocide du peuple ossète», a dit le chef du comité d'enquête du Parquet russe, Alexandre Bastrykine, en présentant ses premières conclusions dans un «Livre blanc des crimes contre l'Ossétie du Sud».

Le livre réunit quelque 200 témoignages de victimes civiles et militaires -presque toujours anonymes, pour «assurer la sécurité de leurs auteurs», selon les éditeurs- ainsi que des photos des ruines de Tskhinvali (la capitale de l'Ossétie du Sud), de restes calcinés de chars géorgiens et des cartes des hostilités.

Une «habitante de Tskhinvali, née en 1969» déclare ainsi : «sur la route, j'ai vu des chars géorgiens tirer sur des voitures de civils. Une Lada dans laquelle se trouvait un couple a été touchée et les passagers ont été brûlés (...) J'ai vu également un groupe de quatre personnes, peut-être une famille, s'arrêter devant un blindé en pensant que c'étaient des Russes. Mais c'étaient des Géorgiens et ils ont tiré sur eux».

Un «habitant de Guisel, né en 1975», raconte comment il a vu des soldats géorgiens «tuer deux personnes en leur tirant dessus, les lacérant et les égorgeant».

L'enquête, ouverte en août, a établi que «162 civils sud-ossètes avaient été tués» pendant cette guerre de cinq jours déclenchée par l'intervention militaire géorgienne en Ossétie du Sud le 7 août, qui provoqua une riposte massive des Russes.

Quarante-huit militaires russes -dont dix soldats des forces russes de maintien de la paix déployées dans la province géorgienne rebelle d'Ossétie du Sud depuis une guerre dans les années 1990- ont également péri, et deux militaires sont toujours portés disparus, selon le Parquet.

Un bilan établi le 3 septembre par le parquet militaire faisait état de 71 militaires russes tués et 340 blessés.

En plein conflit, le gouvernement ossète a d'abord affirmé que 1.600 personnes avaient été tuées à Tskhinvali, l'ambassadeur de Russie à Tbilissi faisant même état d'«au moins 2.000 civils tués». Ce bilan a été ensuite révisé à la baisse à «environ 500 morts» par les autorités ossètes.

«Notre enquête est toujours en cours jusqu'au mois d'avril, ces chiffres ne sont donc pas définitifs», a souligné M. Bastrykine.

Mais «l'important n'est pas le chiffre, l'important c'est que nous avons établi qu'il s'agissait d'une action consciente et planifiée (des Géorgiens) pour détruire les Ossètes en tant que groupe ethnique», a expliqué l'enquêteur russe.

Ces témoignages «nous permettent de poser la question de la responsabilité des dirigeants (géorgiens) quelles que soient leurs fonctions», a déclaré M. Bastrykine.

«Nous espérons (...) une réaction objective et impartiale de la communauté internationale», a-t-il ajouté en n'excluant pas «la création d'un organe judiciaire international spécial» pour enquêter sur ce conflit.

Le Premier ministre russe Vladimir Poutine avait été le premier à parler de «génocide», le 10 août, en soulignant que «la majorité des Ossètes sont des citoyens russes».

Mardi, Tbilissi a de nouveau qualifié les accusations de Moscou de «mensonges cyniques».

«La Russie parlait devant le monde entier de milliers de civils tués par l'armée géorgienne en Ossétie du Sud (..) Ce n'est rien d'autre qu'une campagne de propagande du Kremlin», a déclaré à l'AFP Alexandre Lomaïa, qui était secrétaire du Conseil national de Sécurité de la Géorgie pendant la guerre.