«Flics! Porcs! Assassins!» Des bandes de jeunes lapidaient lundi le ministère de l'Intérieur et divers commissariats à Athènes et ailleurs en Grèce, après la mort d'un adolescent, abattu par un policier. Des échauffourées opposaient protestataires et forces de l'ordre juste devant le Parlement.

D'après les autorités, 37 policiers ont été blessés par des projectiles à Athènes durant le week-end. Près d'une trentaine de civils ont été soignés pour des blessures légères dans divers hôpitaux du pays.Ces émeutes, les pires qu'ait connues la Grèce depuis des années, ont éclaté samedi soir après le décès d'Alexandros Grigoropoulos, 15 ans, dans le quartier athénien d'Exarchia.

Deux policiers disent avoir été pris pour cibles par une trentaine de jeunes et avoir alors tiré une grenade assourdissante et trois coups de semonce. Cependant, des témoins contredisent leur version, affirmant que l'un d'eux a sciemment visé les protestataires.

Les deux agents ont été arrêtés et inculpés, l'un de meurtre et l'autre de complicité.

La dernière fois qu'un jeune avait été abattu par la police, lors d'une manifestation en 1985, les émeutes avaient duré des semaines.

Depuis samedi soir, des vitrines de magasins été brisées, des voitures et des banques incendiées, et ce par dizaines.

A Athènes lundi, avant les manifestations prévues, des lycéens ont bloqué des rues en érigeant des barricades. Des dizaines de jeunes occupaient deux universités, la loi grecque interdisant à la police d'entrer dans les campus.

Des bandes de jeunes ont attaqué commissariats de police et même le ministère de l'Intérieur à coups de jets de pierres. Les protestataires se sont frottés aux unités anti-émeutes devant le Parlement. «Flics! Porcs! Assassins!» scandaient-ils.

A Thessalonique, la deuxième ville du pays, des jeunes ont aussi brisé des vitrines de magasins et lapidé un commissariat. A une soixantaine de kilomètres de là, à Veria, quelque 400 lycéens affrontaient à coups de pierres la police anti-émeute. A Chania, la principale ville de Crète, leurs camarades ajoutaient aux pierres des chaises cassées et autres bouts de bois.

Chaque fois, la police répliquait à coups de gaz lacrymogènes. Des violences étaient également signalées à Trikala, dans le centre de la Grèce, où un officier aurait été blessé.

Le Premier ministre Costas Karamanlis a lancé lundi un appel au calme. «Tous les événements dangereux et inacceptables commis sous le coup de l'émotion qui a suivi cet incident tragique ne peuvent pas être tolérés et ils ne le seront pas», a-t-il déclaré lors d'une intervention télévisée en direct. «L'Etat protégera la société.»

Eclaboussé par des scandales financiers, le gouvernement conservateur du Premier ministre Costas Karamanlis est de plus en plus impopulaire. Ses réformes économiques ont été accueillies par des manifestations, parfois violentes.

Son parti, la Nouvelle Démocratie, ne dispose actuellement que de 151 députés sur les 300 sièges que compte le Parlement. De 152 après les législatives anticipées de septembre 2007, sa majorité s'est récemment réduite, M. Karamanlis ayant congédié un député qui avait ouvertement critiqué son gouvernement.

Désormais et pour la première fois depuis huit ans, les socialistes sont constamment en tête dans les sondages.

Le président grec Karolos Papoulias a envoyé un télégramme de condoléances aux parents d'Alexandros Grigoropoulos. «Cette mort a porté un coup à tout le pays», écrit-il. «Je suis certain que les responsables devront rendre des comptes».

A Athènes et au Pirée, les écoles sont restées fermées lundi en signe de deuil, tandis que la protestation gagnait d'autres capitales européennes.

A Berlin, une quinzaine de jeunes ont occupé le consulat grec. A Londres, des protestataires ont retiré le drapeau bleu et blanc de l'ambassade de Grèce pour hisser la bannière rouge et noire des anarchistes. Une manifestation a également eu lieu devant la représentation diplomatique grecque de Nicosie, à Chypre.