L'ex-premier ministre français Dominique de Villepin a accusé lundi le président Nicolas Sarkozy d'être intervenu «ouvertement» dans l'instruction judiciaire de l'affaire Clearstream, scandale politico-judiciaire complexe, dont il se dit le «bouc émissaire».

«Depuis quatre ans, une thèse s'est imposée dans ce dossier, et cette thèse n'est pas neutre parce qu'elle a été imposée par Nicolas Sarkozy», s'est insurgé sur la radio Europe 1 M. de Villepin, renvoyé devant un tribunal correctionnel notamment pour «complicité de dénonciation calomnieuse».

«Dès l'origine, j'ai été désigné comme le bouc émissaire», dénonce également M. de Villepin dans le quotidien le Parisien-Aujourd'hui en France. «Tout s'est mis en place alors pour un véritable lynchage médiatique et judiciaire. Comment aurait-il pu en être autrement dès lors que le plus haut responsable de l'Etat intervient ouvertement dans le processus ?», affirme-t-il.

L'affaire avait éclaté en 2004. Elle avait pour but de discréditer plusieurs personnalités censées avoir touché des pots-de-vins, via la société financière luxembourgeoise Clearstream, à l'occasion de la vente de frégates françaises à Taïwan en 1991.

Leurs noms figuraient sur de faux listings de titulaires de comptes chez Clearstream, sur lesquels des pots-de-vin auraient été versés. Le nom de Nicolas Sarkozy y était mentionné et la justice a considéré que le but de cette falsification de fichiers visait à le déstabiliser dans la course à la présidentielle de 2007, qu'il a finalement remportée.

La justice a aussi estimé qu'il existait des éléments suffisants pour estimer que Dominique de Villepin a pu participer à cette machination.

Nicolas Sarkozy et M. de Villepin ont fait partie des mêmes gouvernements, sous la présidence de Jacques Chirac, et étaient rivaux pour la présidentielle. Le premier a occupé les portefeuilles de l'Intérieur et des Finances, tandis que le second a été ministre des Affaires étrangères, de l'Intérieur, puis Premier ministre.

«Il n'est pas acceptable qu'il puisse y avoir dans notre pays une telle confusion entre les intérêts privés d'une partie civile et la responsabilité publique du président de la République», affirme Dominique de Villepin, prévenant qu'«une justice sous influence ouvrirait la voie à une justice politique».