Les Inuits du Groenland devaient voter massivement mardi en faveur d'une autonomie élargie proposée par leurs dirigeants, leur ouvrant la voie à l'indépendance totale du Danemark qui règne sur ce territoire stratégique de l'Arctique depuis près de trois siècles.

Tous les partis, à l'exception d'un seul, les Démocrates (minoritaires), ont appelé à voter «Aap» (oui) lors de ce référendum décisif sur une plus grande autonomie, négociée âprement avec le Danemark qui confère pour la première fois au Groenland le droit à l'autodétermination et lui assure d'être reconnu en tant que peuple.

Quelque 39.000 électeurs étaient appelés à voter. Les bureaux ont ouvert mardi à 09H00 locales (12HOO GMT) dans 80 villes et villages du Groenland et devaient fermer à 20H00 (23H00 GMT) tandis que les résultats étaient attendus vers minuit heure locale (03H00 GMT, mercredi).

Selon un dernier sondage paru lundi, le «oui» l'emporterait massivement. 61% des Groenlandais voteraient pour, contre 15% non. 19% étaient par ailleurs encore indécis et 5% ont dit leur intention de ne pas voter.

Le Groenland, 57.000 habitants (dont 50.000 Inuits et 7.000 Danois de la métropole), bénéficie d'un statut d'autonomie interne depuis 1979.

Si le «oui» l'emporte, le gouvernement local (sociaux-démocrates et libéraux) obtiendra le droit non négligeable de contrôler les ressources minérales (pétrole, gaz, or, diamants, uranium, zinc, plomb) de l'île.

Cette île, la plus grande du monde, occupe en outre une position stratégique dans l'Arctique entre l'Europe et les Etats-Unis. Elle abrite d'ailleurs une base radar américaine à Thulé, au nord-ouest, qui devait jouer un rôle essentiel dans le programme antimissiles de l'administration du président américain Bush.

Un «oui» n'aura pas d'influence sur la politique étrangère et de sécurité de l'île, qui demeure du ressort de Copenhague ni sur l'avenir de la base américaine de Thulé, assure toutefois le gouvernement de Nuuk.

Un accord a été signé en 2004 à Igaliku (Groenland) sur la modernisation de l'accord de défense de 1951 passé par Copenhague et Washington.

Il met cette base radar à niveau dans le cadre du système antimissiles américains, a ainsi rappelé Josef Motzfeldt, ancien ministre groenlandais des Affaires étrangères.

M. Motzfeldt était signataire à l'époque de cet accord avec son homologue danois Per Stig Moeller et l'ex-secrétaire d'Etat américain Colin Powell, signe d'un nouveau droit de regard du Groenland sur les affaires le concernant.

L'île renfermerait en outre d'importantes réserves d'hydrocarbures, selon des estimations de scientifiques américains, en particulier au pôle nord, qui suscite les convoitises d'autant plus que le réchauffement climatique, constaté ces dernières années, pourrait en faciliter la prospection et l'exploitation.

Mais ce territoire, qui renferme 10% des réserves d'eau douce de la planète, est le plus menacé par le réchauffement climatique en Arctique.

Aujourd'hui, les Groenlandais vivent essentiellement de la pêche, et 87% des prises sont exportées, mais des subsides annuelles de l'Etat danois.

Ces derniers s'élevaient en 2007 à 3,2 milliards de couronnes (430 millions d'euros), soit près de la moitié du budget de l'île.

Pour réduire cette dépendance, le Groenland mise sur l'exploitation de ses ressources minérales, donnant à ce référendum un relief supplémentaire.