La police française a appréhendé hier le chef présumé de l'appareil militaire de l'ETA, Garikoïtz Asiazu Rubina, infligeant un nouveau coup dur à l'organisation terroriste basque.

L'homme de 35 ans, surnommé Txeroki ou Cherokee, a été arrêté au milieu de la nuit dans un immeuble de Cauterets, en Hautes-Pyrénées, en présence d'une femme identifiée par les médias espagnols comme une militante recherchée de l'ETA.

 

Des armes, de faux papiers ainsi que deux ordinateurs y ont été saisis.

L'arrestation du militant, soupçonné de l'assassinat de deux policiers espagnols, a été rendue publique en début de journée par la ministre de l'Intérieur française, Michèle Alliot-Marie.

Saluant l'excellente collaboration entre autorités espagnoles et françaises, elle a précisé que le détenu serait très probablement transféré rapidement à Madrid pour subir son procès.

Le premier ministre espagnol Jose Luis Zapatero s'est félicité de l'arrestation. Aujourd'hui, l'ETA est plus faible et la démocratie espagnole est plus forte, a-t-il déclaré, avant d'insister, à l'attention de ses compatriotes, sur le fait que l'organisation n'avait pas pour autant perdu sa capacité à infliger de la douleur.

Riposte à craindre

Les analystes étaient réservés hier quant à l'impact qu'aura l'arrestation sur les capacités opérationnelles du groupe terroriste, qui a perpétré plusieurs attentats au cours des derniers mois. Notamment devant l'université de Pampelune, où un carnage a été évité pratiquement par miracle.

Il est très difficile de prédire si cette opération va plonger l'ETA dans une crise transitoire ou marquer le début de la fin, souligne en entrevue Diego Muro, spécialiste de la mouvance radicale basque à l'European University Institute de Florence.

L'organisation, dit-il, voudra frapper rapidement par un attentat pour bien faire comprendre qu'elle est toujours forte. Mais l'action viendra plus probablement d'une cellule semi-autonome que d'une opération coordonnée par les hauts dirigeants, placés sur la défensive.

Un autre membre important de l'ETA, José Ignacio de Juana Chaos, s'est rendu hier aux autorités à Belfast, en Irlande du Nord. Il avait été libéré dans la controverse en août après avoir purgé 21 ans de prison pour son rôle dans une longue série d'attentats meurtriers,

L'ex-prisonnier faisait depuis peu l'objet d'un mandat d'arrestation européen. Il avait omis la semaine dernière de répondre à la convocation d'un juge d'instruction espagnol qui a ouvert une enquête contre lui pour apologie du terrorisme.

Plus de 600 militants de l'organisation, incluant plusieurs chefs influents, sont aujourd'hui détenus en Espagne et en France. Les cellules de l'ETA utilisent parfois le territoire hexagonal comme base de repli.

La lutte contre le terrorisme basque, qui a fait plus de 800 morts en 40 ans, revient à l'avant-plan alors que la question du statut du Pays Basque en Espagne demeure plus que jamais d'actualité.

Référendum bloqué

Le président nationaliste de la Communauté autonome du Pays Basque, Juan Jose Ibarretxe, avait fait voter cet été la tenue d'un référendum devant ouvrir la voie à des négociations de paix avec l'ETA ainsi qu'une autonomie accrue pour la région de deux millions d'habitants. L'initiative a cependant été bloquée par le Tribunal constitutionnel espagnol.

Selon Diego Muro, seule une fraction marginale de la population soutient l'ETA et ses méthodes violentes.

Il relève, à titre indicatif, que l'aile politique de l'organisation, Batasuna, avait récolté environ 10% des voix aux élections parlementaires basques avant d'être interdite par Madrid en 2003.

C'est l'appui maximal que l'on peut imaginer puisque les personnes qui ont voté pour Batasuna n'approuvaient pas nécessairement la violence d'ETA. Ce serait comme dire que tous les partisans du Sinn Féin, en Irlande du Nord, soutenaient les attentats de l'IRA, prévient le spécialiste.