La France célèbrait mardi le 90e anniversaire de l'armistice de la guerre 1914-1918, dont elle fut le principal champ de bataille, avec une cérémonie internationale à Douaumont présidée par le président Nicolas Sarkozy, en présence notamment du prince Charles.

Cette journée du souvenir avait une tonalité particulière: au premier rang des cérémonies organisées un peu partout en France, il n'y a pas de Poilus, ces combattants de 14-18 que les livres d'histoire montrent le regard vide, fusil Lebel à l'épaule, dans des tranchées boueuses et jonchées de cadavres.

Le dernier d'entre eux, Lazare Ponticelli, s'est éteint le 12 mars à 110 ans. Parce qu'il pensait que cela serait «un affront à ceux qui sont morts» avant lui, il avait longtemps refusé des funérailles nationales avant de revenir sur sa décision peu avant sa mort. Un hommage solennel lui avait été rendu aux Invalides en présence du président Sarkozy.

Quatre combattants de la grande guerre sont encore vivants à ce jour, trois Britanniques et un Américain.

Les cérémonies ont été placées mardi sous le signe de l'Europe par le président français Nicolas Sarkozy, en présence notamment du prince Charles et du président de la commission européenne José Manuel Barroso.

   «La construction de l'Europe, la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme, l'Organisation des Nations Unies» sont, a affirmé M. Sarkozy qui assure la présidence tournante de l'Union européenne, «les plus belles traductions» du «sursaut de la conscience» qui a suivi les horreurs de 14-18 et de 39-40.

   M. Sarkozy a choisi, pour ces célébrations de l'armistice du 11 novembre, le fort de Douaumont, haut lieu de la meurtrière bataille de Verdun de 1916.

   Le prince Charles, héritier de la couronne d'Angleterre et son épouse Camilla, qui avaient dîné la veille au palais de l'Elysée étaient présents, comme le grand-duc Henri et la grande-duchesse Maria Teresa de Luxembourg, le président de la Commission européenne José Manuel Barroso et le président du Parlement européen l'Allemand Hans-Gert Pöttering.

   Le nouveau président du Bundesrat (chambre haute du Parlement) Peter Müller représentait l'Allemagne, la chancelière Angela Merkel étant à Varsovie pour les cérémonies du 90e anniversaire de l'indépendance de la Pologne.

Alors qu'une polémique a surgi en France sur le nombre opportun des journées de mémoire à partir d'un rapport qui doit être présenté mercredi, le secrétaire d'État aux anciens combattants Jean-Marie Bockel a estimé mardi qu'il valait «mieux garder les commémorations telles qu'elles sont, qu'elles soient nationales ou pas».

«Tant qu'il y aura des gens pour les faire vivre, des médias pour relayer ce qu'elles racontent comme tragédies, comme combats, nous les ferons vivre», a-t-il affirmé sur la radio RTL.

Rompant avec la tradition, M. Sarkozy, qui préside l'Union européenne jusqu'à la fin de l'année, se déplacera à l'ossuaire de Douaumont, construit dans les années 20 pour accueillir les restes des 300.000 victimes de Verdun. En 300 jours et 300 nuits de combats de février à décembre 1916, 26 millions d'obus furent tirés par les artilleries rivales.

M. Sarkozy devait ensuite se rendre au cimetière allemand proche du site.

Le premier ministre François Fillon devait pour sa part se rendre également à Rethondes, au Nord de Paris, où fut signé l'armistice mettant fin à la «der des der».

Comme le dernier des poilus français, légionnaire engagé en 1914 à 17 ans, ils furent 8,5 millions de soldats à être mobilisés en France. 1,4 million, dont de nombreux tirailleurs des colonies françaises d'Afrique, n'en revinrent pas. La plupart avaient entre 18 et 25 ans. En France et en Allemagne, un soldat engagé sur six a été tué.

L'Allemagne perdit 1,9 millions d'hommes, la Russie 1,7 millions, la Grande-Bretagne 760 000.

«En 1918, la France était le champ de bataille de l'Europe, en 2008 elle préside une Europe réconciliée avec elle-même, qui oeuvre pour la paix dans le monde», a dit M. Bockel.