Un an et demi après sa défaite à la présidentielle française, Ségolène Royal, dont le projet a remporté vendredi le vote des militants socialistes, apparaît en position de force pour diriger le PS, mais la guerre des chefs menace la crédibilité du principal parti d'opposition.

Contre toute attente, le projet de centre-gauche de Mme Royal a obtenu vendredi le plus de voix (29%) des quelque 130.000 militants appelés à voter, devant celles des maires de Paris Bertrand Delanoë et de Lille Martine Aubry (environ 25% chacun), ses principaux rivaux dans la lutte pour le leadership socialiste.

A quelques jours du congrès de Reims (du 14 au 16 novembre), dans l'est de la France, cette victoire place Mme Royal en position de force pour briguer la succession de François Hollande, son ancien compagnon, à la tête du parti.

Mais sitôt les résultats connus, les luttes intestines qui minent le PS ont repris au grand jour, avec l'annonce tonitruante du départ de deux de ses membres, dont le sénateur Jean-Luc Mélenchon, figure de l'aile gauche du parti, qui a annoncé son intention de créer un nouveau mouvement «sans concession face à la droite».

M. Mélenchon était partisan du projet de Benoît Hamon, le quadragénaire qui monte au sein du PS et a réalisé un bon score de 19%.

L'actuel patron du PS, François Hollande, qui soutenait la motion de Bertrand Delanoë, a pour sa part immédiatement prévenu que le score de son ex-compagne «ne lui permettait pas d'être majoritaire dans le Parti socialiste».

Il a appelé les quatre principaux courants à «chercher ensemble les voies d'un rassemblement», et a prévu «des jours difficiles» pour le PS si une majorité ne se dégageait pas.

Le maire de Paris Bertrand Delanoë, qui apparaissait jusque là comme le favori du scrutin, a rejeté par avance la stratégie de Mme Royal, favorable à une alliance avec les centristes, manoeuvre qu'elle avait déjà tentée entre les deux tours de la présidentielle.

Les partisans de Martine Aubry ont évoqué «un coup de tonnerre sur l'appareil du parti» après les résultats, et Benoît Hamon de son côté a maintenu sa candidature pour le poste de Premier secrétaire du PS.

«Il va falloir que le vote soit respecté», a répliqué Ségolène Royal, en estimant que le vote «lui donnait une légitimité» pour diriger le PS. Mais elle a précisé qu'elle ne faisait pas acte de candidature pour l'instant, et s'est posée en rassembleuse, soignant son image de proximité à l'égard des militants et de distance vis-à-vis de l'appareil.

Reconnaissant que sa majorité était relative, elle a indiqué qu'elle téléphonerait dès vendredi à ses principaux rivaux, pour entamer des discussions «avec tout le monde, sans exclusive», et notamment avec Benoît Hamon.

Lors du Congrès de Reims, les différents courants du PS devront tenter de faire une synthèse pour désigner leur leader, qui sera formellement élu par les militants le 20 novembre.

Qui qu'il soit, le successeur de François Hollande aura la lourde tâche de redresser une formation qui a essuyé trois défaites successives à la présidentielle depuis 1995, dans la perspective de celle de 2012.

S'il a remporté les municipales de mars, le PS n'apparaît pas encore comme porteur d'un projet d'alternative crédible à Nicolas Sarkozy, laissant le terrain de l'opposition au trotskiste Olivier Besancenot et au centriste François Bayrou.