Les autorités indiennes de sûreté nucléaire ont révélé jeudi avoir mis au jour quasiment l'ensemble d'une chaîne complexe et non réglementée en Inde de fabrication de pièces métalliques contaminées par une substance radioactive découverte sur des boutons d'ascenseurs en France.

«Nous sommes en train de remonter toute la filière», a déclaré à l'AFP Satya Pal Agarwal, directeur du département de sûreté nucléaire de l'Agence de l'énergie atomique d'Inde.

Le géant américain Otis a décidé mercredi de retirer des boutons de plus de 500 ascenseurs en France car ils sont contaminés par des traces de cobalt 60, un produit radioactif.

Au total, quatre sociétés indiennes seraient impliquées dans la chaîne industrielle de fabrication d'éléments en acier composant ces boutons. Ces bouts de métaux irradiés semblent provenir initialement d'une fonderie qui aurait importé de la ferraille de récupération pour la recycler, a expliqué M. Agarwal.

L'Agence indienne coopère depuis plusieurs jours avec l'Autorité de sûreté nucléaire française (ASN) qui enquête aussi sur le circuit international d'approvisionnement de la société française Mafelec. Celle-ci a en effet importé d'Inde des pièces métalliques utilisées pour fabriquer les boutons dans lesquels les traces de cobalt 60 ont été détectées.

Mafelec a livré ensuite ces boutons d'ascenseurs à Otis.

Ces composants en acier utilisés par Mafelec lui ont été fournis par les entreprises indiennes Bunts et Laxmi Electronics qui se sont approvisionnées auprès de l'aciérie SKM Steels, elle-même se fournissant dans la fonderie Vipras Casting, a détaillé M. Agarwal.

D'abord, «les fonderies doivent absolument contrôler l'eventuelle contamination des matériaux qu'ils achètent avant de les faire fondre. C'est arrivé aujourd'hui avec Vipras; demain cela pourra se passer avec quelqu'un d'autre», a averti le responsable. Et «nous avons conseillé aux exportateurs d'acheter des contrôleurs (de radioactivité) avant d'envoyer à l'étranger leurs biens manufacturés», a-t-il poursuivi.

Mais, M. Agarwal l'admet, il reste un chaînon manquant: les autorités indiennes n'ont pas identifié jusqu'à présent la source d'approvisionnement en ferraille de la fonderie Vipras. Les forges indiennes achètent leurs matières premières à des intermédiaires, lesquels peuvent très bien les importer de l'étranger, comme d'Europe ou des États-Unis.

Le marché de la ferraille est en plein essor en Inde, dopé par le boom de l'industrie et de la construction. Mais le secteur des fonderies est informel, peu ou pas surveillé et manque de réglementations en termes de sécurité et de santé publique.

En 2004, dix ouvriers indiens avaient été tués dans l'explosion d'un laminoir artisanal où des bouts de ferraille contenaient des munitions d'armes à feu.