L'extrême droite autrichienne s'interroge sur son avenir après la mort samedi de son chef historique Jörg Haider, dans un accident de voiture, alors que ses deux courants venaient de s'imposer ensemble comme deuxième force politique lors des législatives de septembre.

Si le jeune patron du FPÖ, Heinz-Christian Strache, 39 ans, semble pouvoir s'appuyer sur un socle solide de 17,5% de l'électorat, qui l'a hissé à la troisième place au scrutin du 28 septembre, le BZÖ, plus populiste, fait face à une crise majeure après la disparition à 58 ans de son chef charismatique. Tombé à moins de 4% dans les sondages en début d'année alors que Jörg Haider avait décidé de se retirer dans sa province de Carinthie (sud), son parti a réalisé le score inattendu de 10,7% grâce au retour de son patron sur la scène politique nationale cet été.

«Hors de son fief traditionnel de Carinthie, le BZÖ sans Haider n'a probablement aucune chance de survie au niveau national», estime le politologue Peter Ulram, résumant un sentiment largement partagé dimanche en Autriche.

Le résultat du BZÖ «n'était pas une victoire du BZÖ, mais provenait uniquement du rayonnement de Haider», selon Frank Staud, rédacteur en chef du quotidien Tiroler Tageszeitung. Le Kleine Zeitung renchérit: «sans Haider, le BZÖ n'est qu'une coquille vide».

La direction du parti devait se réunir dimanche à Vienne pour désigner son nouveau patron, probablement à titre intérimaire, en l'absence de dauphin.

«Personne n'a la carrure pour succéder à Haider», estime M. Ulram, que ce soit Peter Westenthaler, chef du BZÖ jusqu'à cet été, ou Ursula Haubner, la soeur aînée de Haider.

Dans ce contexte, les spéculations sur un rapprochement, voire une fusion avec le frère ennemi du FPÖ se multiplient.

Ancien proche de M. Haider, le député européen FPÖ Andreas Mölzer a jugé qu'«une coopération, quelle que soit sa forme, pourrait être le legs de M. Haider».

Le secrétaire général du BZÖ, Stefan Petzner, a répliqué «ne pouvoir ni ne vouloir» aborder une telle réflexion à ce stade.

Un éventuel rapprochement entre les deux partis a «gagné en probabilité», a admis M. Ulram, «mais il continue de se heurter à de fortes animosités personnelles réciproques».

Créé en 2005, le BZÖ est en effet issu d'un schisme fratricide au sein du FPÖ. Jörg Haider avait été contraint d'abandonner la formation à Heinz-Christian Strache après avoir été mis en minorité par les «ultras», les pangermanistes xénophobes et nationalistes, qui l'avaient porté à la tête du parti en 1986.

Les deux leaders, qui en cumulé ont recueilli 28,2% des voix le mois dernier, talonnant les sociaux-démocrates du SPÖ (29,3%), avaient pourtant esquissé mercredi un rapprochement en déclarant leurs querelles personnelles terminées et en annonçant une proposition commune de loi de relance économique.

M. Strache avait cependant repris ses attaques deux jours plus tard, éloignant la perspective d'une coopération des deux partis dans l'opposition et a fortiori dans un gouvernement.

Le nouveau patron du SPÖ, Werner Faymann, chargé de former un gouvernement, a exclu de gouverner avec l'extrême droite, mais cette hypothèse n'a pas été écartée par les conservateurs de l'ÖVP, à qui l'appui du BZÖ et du FPÖ fournirait également la majorité absolue.

En attendant, pour plusieurs éditorialistes la disparition de M. Haider accroît encore la possibilité d'une grande coalition gauche-droite.

«Sans Haider, le BZÖ n'est plus un partenaire de gouvernement sérieux. Et sa force d'opposition est très affaiblie», juge M. Ulram.

L'extrême droite autrichienne a notamment profité en septembre de l'échec de 21 mois de coalition entre le SPÖ et l'ÖVP, qui a amené ces deux partis à leurs plus bas niveaux électoraux historiques.