Une semaine après le curieux happening que Ségolène Royal a offert à ses sympathisants au Zénith de Paris, la chose continue de faire le bonheur des humoristes et des sociologues.

Samedi soir, dans son émission On n'est pas couché, Laurent Ruquier a repris de longs passages de sa performance publique. On la voit, nouvelle coiffure ondulée, tunique indienne sur des jeans, sans micro, esquisser des pas de danse avant de se livrer à des confidences sur «les gentils coups bas» (de la part de ses rivaux socialistes), «les charmantes épreuves personnelles» (son divorce), etc. Puis elle fait scander «Fra-ter-ni-té, Fra-ter-ni-té» aux 4000 spectateurs présents. Cela avait fait dire à un vieux pilier de la gauche du parti, Henri Emmanuelli: «C'est entre le show business et le rassemblement de secte.»

Hier, dans le Journal du dimanche, Michèle Stouvenot se demandait s'il s'agissait «d'un remake de Star Ac' ou d'une parodie de Chantal Goya» (célèbre chanteuse pour enfants). La veille, dans le Figaro, le sociologue Michel Maffesoli avait constaté: «Lorsque la fièvre du samedi soir atteint les personnages publics, la politique est transfigurée.» Mais il ajoutait: «Est-ce une bonne nouvelle?»

Le fin mot de l'histoire, c'est que, après 11 ans d'un règne assez peu glorieux à la tête du PS, François Hollande, l'ex-mari de Ségolène Royal, quitte son poste. Et elle est candidate à sa succession. Cette candidature est à la fois logique - Ségolène a obtenu 17 millions de suffrages - et discutable, puisque, avec 46,9% des voix, elle a obtenu l'un des plus mauvais résultats jamais enregistrés par la gauche.

Poids lourds

Mais pour succéder à Hollande, il faut d'abord obtenir la majorité absolue au congrès du PS, qui aura lieu à Reims à la mi-novembre. Pour l'essentiel, elle affrontera deux poids lourds: le maire de Paris, Bertrand Delanoë, soutenu par une majorité de barons du parti, et l'ancienne ministre Martine Aubry, mairesse de Lille, qui a également des alliés importants.

Chacun des trois a déposé une «motion», selon le rituel socialiste, qui prévoit un vote de tous les militants du pays le 6 novembre prochain. On saura alors quels sont les appuis réels de Ségolène Royal. En novembre 2006, elle avait remporté triomphalement l'investiture de son parti avec 56% des voix. Mais elle paraissait de loin la meilleure candidate possible, et le PS venait de recruter quelque 75 000 nouveaux adhérents, des jeunes que séduisait la «madone du PS».

Aujourd'hui plus de 50 000 d'entre eux sont repartis, et il s'agit dans un premier temps d'élire le chef d'un parti, pas forcément un candidat pour 2012. Dans ce contexte, Royal s'estimerait comblée si sa motion obtenait plus de 30% ou arrivait simplement en tête devant les deux autres. Mais on n'est plus en novembre 2006, et elle n'est même pas sûre de d'atteindre les 25%. Avec, en plus, la perspective de trouver en face d'elle une coalition hostile.

En novembre 2006, elle avait fait une campagne d'image en dehors du parti et gagné, presque par surprise, l'investiture. Aujourd'hui, il n'y a plus de surprise possible. Seulement un très fort sentiment de rejet.

Et sa «performance» du Zénith n'arrange pas les choses. Fin de partie pour Ségolène?