Le Premier ministre ukrainien, Ioulia Timochenko, a mis en garde vendredi contre des élections anticipées qui feraient perdre au camp pro-occidental sa majorité et menacerait cette ancienne république soviétique d'un retour en arrière en matière d'intégration européenne.

«Si on est dans l'impasse ... je n'exclus pas que le parlement puisse décréter des élections législatives et présidentielle anticipées», a déclaré le Premier ministre dans une interview à cinq agences de presse occidentales, dont l'AFP.Le camp pro-occidental perdrait alors sa majorité au Parlement et l'Ukraine ferait «un virage à 180 degrés» en matière d'intégration européenne, projet crucial pour le président Viktor Iouchtchenko, a averti Mme Timochenko, en conflit aigu avec ce dernier.

«Après de nouvelles législatives anticipées, la majorité pro-européenne va disparaître au Parlement (...) Dans le pire des cas, cela représentera un virage à 180 degrés en ce qui concerne l'intégration européenne et les réformes à l'intérieur du pays», a ajouté Mme Timochenko.

Elle a toutefois admis que son bloc pourrait former une «union contre nature» avec l'opposition pro-russe pour éviter les législatives anticipées, mais a refusé d'entrer dans les détails.

«J'espère que nous allons d'ici une semaine renouveler la coalition démocratique», a-t-elle dit, en ajoutant qu'elle ferait tout pour éviter des élections anticipées.

Timochenko, l'a quittée en septembre après l'adoption d'une série de lois réduisant les pouvoirs présidentiels.

Si cette alliance n'est pas renouvelée ou une nouvelle coalition n'est pas formée d'ici à la mi-octobre ou même, selon certains experts, début octobre, le chef de l'Etat a le droit de dissoudre le Parlement et de convoquer de nouvelles législatives, après déjà un scrutin parlementaire anticipé en septembre 2007.

Une perspective peu rassurante pour Mme Timochenko qui n'a dans ce cas aucune garantie de son retour au gouvernement.

Or, le Premier ministre est allée jusqu'à menacer le chef de l'Etat, dont elle était le bras droit lors de la présidentielle houleuse de 2004, d'une présidentielle anticipée.

«Je considère qu'il serait logique (en cas de législatives anticipées) d'organiser simultanément des élections parlementaires et présidentielle», a-t-elle déclaré.

Le bloc Timochenko et le parti présidentiel ont officiellement entamé mercredi des négociations visant à restaurer leur union, éventuellement avec la participation d'un petit bloc, Litvine. Ces pourparlers ont cependant été marqués par plusieurs disputes entre les participants.

Mme Timochenko avait maintes fois appelé le président et ses partisans à revenir au sein de la coalition rejetant néanmoins les conditions avancées par le chef de l'Etat (abolition des lois antiprésidentielles et résolution conjointe condamnant l'intervention militaire russe en Géorgie).

Sur le plan international, le Premier ministre a dit espérer pouvoir signer «avant la fin d'octobre» un accord avec la Russie sur les livraisons de gaz à l'Ukraine en 2009 et au-delà.

Elle a promis de «lutter» pour obtenir un tarif plus bas que celui de 400 dollars les 1.000 m3 évoqué par Moscou, contre 179,5 dollars actuellement, et nié tout liaison entre «le prix du gaz et le format de la future coalition», alors que selon la presse Moscou chercherait à la pousser vers une alliance avec les pro-russes.

Enfin, Mme Timochenko a rejeté l'idée du président Iouchtchenko de passer rapidement à des «relations du marché» dans la question du stationnement en Ukraine de la flotte russe de la mer Noire.