Le Parlement français devrait voter lundi en faveur du maintien des soldats engagés en Afghanistan, plus d'un mois après la mort de dix d'entre eux qui a suscité en France des interrogations sur la stratégie de l'OTAN face aux talibans.

La France, qui participe à la Force internationale d'assistance à la sécurité (Isaf) de l'OTAN et à l'opération américaine Enduring Freedom, a déployé 2.600 hommes en Afghanistan même, et quelque 700 autres dans les pays voisins et dans l'Océan indien.

Le Premier ministre François Fillon devrait défendre le principe d'une poursuite des opérations militaires, conjuguées à des actions de reconstruction de l'Afghanistan, devant députés et sénateurs qui devraient, sans suspense, approuver ce maintien.

M. Fillon doit aussi préciser quels moyens supplémentaires seront mis à disposition des troupes françaises sur le terrain (drones, hélicoptères, spécialistes du renseignement...), tirant les leçons de l'embuscade tendue par les talibans le 18 août, au cours de laquelle dix soldats français ont été tués.

Le débat risque d'être alimenté par des informations du journal canadien Globe and Mail, qui a fait état samedi d'un rapport «secret» de l'OTAN selon lequel les Français avaient manqué de munitions et de moyens de communication, face à des rebelles bien équipés.

Mais l'Otan a démenti dimanche l'existence d'un tel rapport, de même que Paris, qui a évoqué des «rumeurs».

A la quasi unanimité, la droite, majoritaire, devrait serrer les rangs derrière M. Fillon. Tous les centristes devraient également voter oui, tandis que l'opposition socialiste «ne demandera pas le retrait des troupes».

Depuis octobre 2001 et le début de l'intervention française aux côtés de la coalition internationale en Afghanistan, 24 militaires français ont été tués dans ce pays dans des combats ou dans des accidents ou attentats.

Plusieurs voix au sein de la majorité s'interrogent toutefois, tout comme à gauche, sur la stratégie française et celle de l'OTAN, évoquant un risque d'«enlisement».

Relancées par l'embuscade d'août, ces interrogations sont alimentées par la dégradation de la situation sécuritaire en Afghanistan, les attaques contre les ONG, les quantités astronomiques de drogue produites sur le sol afghan ou encore la coexistence de deux forces étrangères dans ce pays, sous commandement de l'OTAN (50.000 hommes) et américain (20.000 hommes).

Autre sujet d'inquiétude: la situation au Pakistan voisin, en proie à une vague d'attentats islamistes, dont le dernier a fait au moins 60 morts samedi au moment où les Etats-Unis multiplient les tirs de missiles dans les zones tribales du nord-ouest.

L'Otan reconnaît que 4.800 incidents sérieux se sont produits en Afghanistan les huit premiers mois de 2008, contre autant pour 2007 tout entière.

Quant au directeur de l'Office des Nations unies contre la drogue et le crime (ONUDC), Antonio Maria Costa, il vient d'appeler l'Alliance atlantique à s'engager résolument dans la lutte contre la production de stupéfiants en Afghanistan, un «business» de 3 milliards de dollars annuels, selon lui.

Jusqu'à présent, Paris s'en est tenu à la stratégie adoptée lors du sommet de l'Alliance à Bucarest, début avril, et dont Nicolas Sarkozy avait fait un préalable au déploiement de renforts français: 700 hommes arrivés cet été dans l'est de l'Afghanistan.

La déclaration de Bucarest prône un engagement «dans la durée», une «approche globale», civile et militaire, un transfert progressif des responsabilités aux Afghans et une approche régionale associant les «voisins de l'Afghanistan, en particulier le Pakistan».