(Houston) Dans la voiture de Marilyn Bragg, au Texas : les cinq armes à feu de son mari défunt. « Je ne veux pas de ça chez moi, je ne sais même pas tirer », affirme la retraitée avant de les confier aux autorités.

Dans cet État américain, meurtri par les fusillades, les initiatives se multiplient pour offrir aux habitants une chance de se débarrasser de leurs pistolets, fusils, et armes semi-automatiques, en toute sécurité.

« J’ai des petits-enfants, je ne veux pas qu’ils aient accès à ça », insiste Marilyn Bragg depuis la métropole de Houston, où serpente une longue file de voitures, jusqu’à un site de dépôt d’armes à feu.

Au bout de la queue, les conducteurs sont invités à laisser leurs armes dans leur coffre ou sur la banquette arrière, pour inspection.

Des policiers spécialisés s’approchent alors et vérifient que les armes sont bien déchargées et immatriculées.

Il leur arrive souvent de découvrir plus d’une dizaine d’armes dans le véhicule.

« Je pense que c’est un super programme », assure Stuart Wolf, 11 armes à l’arrière de son camion. « Il n’y a pas vraiment d’autre moyen sûr que celui-ci pour s’en séparer », estime le sexagénaire.

Au total, 793 armes seront remises aux forces de l’ordre au cours de cette journée samedi.

En échange, les participants se voient remettre des bons d’achat : 50 dollars pour une arme qui ne fonctionne plus, 100 pour une carabine, et 200 pour un fusil semi-automatique, cette arme utilisée dans tant de fusillades aux États-Unis.

« Nous avons déjà assez d’armes, et il y en a certaines que nous déposons dont nous n’avons pas besoin », confie Kenneth Blackmon, aux côtés de sa femme, Loretta.

« Alors pourquoi les garder ? Il faut s’en débarrasser », plaide l’homme de 69 ans, en remettant sept armes. D’autant que les vols d’armes à feu sont récurrents, et dangereux, insiste-t-il.

El Paso, Ulvade…

« Les vols d’armes à feu ont augmenté de 16 % au cours des dix dernières années », abonde Rodney Ellis, un responsable du comté qui entoure Houston.

Au Texas, les fusillades sont quotidiennes.

« Depuis 2009, plus de personnes sont mortes dans des fusillades meurtrières au Texas que dans n’importe quel autre État américain », affirme Rodney Ellis.

Selon les chiffres de la police fédérale, le FBI, en 2020, le taux de criminalité violente de cet État – 446,5 cas pour 100 000 habitants – était nettement supérieur à la moyenne nationale, qui est de 398,5.

Un exemple, parmi tant d’autres : il y a quelques jours, une personne a été tuée et trois autres blessées par balles lors d’une altercation dans un centre commercial d’El Paso, ville frontalière du Mexique.

Le drame s’est produit à seulement quelques pas de là où un jeune suprémaciste blanc avait tué 23 personnes dans un supermarché prisé de la communauté hispanique en 2019.

Le Texas sera marqué à jamais par l’effroyable tuerie d’Uvalde, quand un Américain, tout juste majeur, avait provoqué un bain de sang dans une école primaire, tuant 19 enfants et deux enseignantes.

Cet immense État de 30 millions d’habitants est aussi l’un de ceux où il est le plus facile de se procurer une arme.

Le port d’armes y est autorisé sans restriction, au nom du deuxième amendement de la Constitution américaine.

Mais pour Rodney Ellis, le responsable du comté, les auteurs de la Constitution – rédigée au XVIIIe siècle – n’auraient jamais pu imaginer la modernité des armes à feu d’aujourd’hui.

« Donc jusqu’à ce que l’on arrive à changer les mentalités et qu’on parvienne à un encadrement raisonnable des armes à feu dans ce pays, ce type d’initiative est le genre de choses que nous devons faire. »