(Chicago) Un million de foyers américains privés d’électricité, des milliers de vols annulés, des autoroutes fermées et des accidents parfois mortels : aux États-Unis, l’avant-veille de Noël a été perturbée vendredi par une tempête hivernale d’une rare intensité.

« Historique » selon le service météorologique américain (NWS), elle a donné lieu à d’importantes chutes de neige, des rafales glacées et des températures descendant jusqu’à - 48 °C par endroits, capables de transformer de l’eau bouillante en gouttelettes de glace en un instant.

Vendredi matin, plus de 240 millions de personnes, soit 70 % des Américains, étaient concernées par des alertes ou des appels à la prudence aux États-Unis.

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Antonio Smothers tente de faire démarrer son véhicule à Nashville, au Tennessee, vendredi.

Le phénomène a provoqué le chaos dans les transports. Une tuile au moment où des millions d’Américains déferlent sur les routes et dans les aéroports pour les fêtes de fin d’année.

Dans l’État de New York, une interdiction de se déplacer a été émise dans le comté d’Erie. « On reste chez nous […] Je ne peux pas voir de l’autre côté de la rue » à cause de la neige, a déclaré à l’AFP Jennifer Orlando, touchée par cette interdiction dans la ville de Hamburg.

À cause de l’accident d’un véhicule entré en collision avec une ligne électrique, elle s’est retrouvée privée de courant durant environ quatre heures, a-t-elle raconté.

Jusqu’à environ 1,5 million de foyers ont été privés d’électricité vendredi, notamment en Caroline du Nord, dans le Maine ou encore en Virginie, selon le site spécialisé PowerOutage.us. Vendredi soir, ils étaient encore un million dans le noir.

La tempête était particulièrement impressionnante par son ampleur, s’étendant de la frontière canadienne au nord jusqu’à la frontière mexicaine au sud.

À El Paso au Texas, des refuges ont ainsi été ouverts pour que les migrants venus du Mexique puissent se protéger des risques d’hypothermie face aux températures négatives.

Mais beaucoup sont trop méfiants pour accepter cette offre et nombre d’entre eux « dorment simplement enroulés dans des couvertures », a expliqué à l’AFP Rosa Falcon, bénévole de 56 ans.

Chaos dans les transports

Vendredi soir, le site spécialisé FlightAware recensait 5500 vols annulés aux États-Unis, les aéroports les plus touchés étant ceux de Seattle, New York, Chicago et Detroit.

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Un voyageur regarde le tableau des arrivées et des départs à l’aéroport national Reagan d’Arlington, en Virginie, vendredi.

Pour arriver jusqu’à Los Angeles, Christine Lerosen n’a pas pu embarquer à Vancouver au Canada et a dû persuader son frère de la conduire jusqu’à Seattle, pour prendre un autre avion, avec une escale à Denver.

« Mon vol au départ de Seattle a été retardé, mon vol au départ de Denver a été retardé et maintenant ils ont perdu mon bagage », a-t-elle soupiré auprès de la chaîne ABC7.

Plusieurs États ont déclaré l’état d’urgence, comme New York, l’Oklahoma, le Kentucky, la Géorgie et la Caroline du Nord. Avec une visibilité proche de zéro, le blizzard et le gel qui affectent une bonne partie du pays, les routes sont devenues très dangereuses.

« Les gens doivent rester chez eux, ne pas s’aventurer sur les routes, a prévenu sur CNN le gouverneur du Kentucky, Andy Beshear. Votre famille veut vous voir à la maison pour Noël, mais elle veut surtout vous voir en vie. »

Il a confirmé que trois personnes étaient mortes sur les routes du Kentucky. Dans l’Oklahoma, au moins deux personnes ont perdu la vie sur la route, selon l’agence responsable de la gestion des urgences dans cet État.

Dans l’Ohio, une collision massive d’une cinquantaine de véhicules sur une autoroute a fait au moins un mort, selon les médias locaux. Dans le Michigan, la circulation sur une autoroute a été interrompue vendredi en milieu de matinée, à cause d’un accident impliquant neuf semi-remorques.

« Bombe dépressionnaire »

Cette tempête d’une rare intensité est causée par une « bombe dépressionnaire » : un puissant conflit entre deux masses d’air, une très froide en provenance de l’Arctique et l’autre tropicale venue du golfe du Mexique, aggravé par le fait que la pression atmosphérique a chuté très vite, en moins de 24 heures.

Ce type de tempête n’intervient « qu’une fois par génération », selon le National Weather Service américain à Buffalo.

À Chicago, où il faisait vendredi autour de - 20 °C dans la journée, l’organisation d’aide aux sans-abri Night Ministry s’est inquiétée du nombre de lits mis à disposition par la Ville, insuffisant selon elle.

« Certains des gens que nous accueillons maintenant sont devenus sans-abri juste cette année, a expliqué à l’AFP le major Caleb Senn, responsable de l’Armée du Salut à Chicago. Certains ont vraiment peur. C’est la première fois qu’ils sont à la merci de la nature sans endroit où aller. »

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De la brume s’élève au-dessus du lac Michigan, à Chicago, vendredi matin.

Le Canada doit lui aussi affronter ce phénomène, avec des alertes au froid extrême, à la tempête, voire au blizzard, lancées pour une grande majorité du territoire.

Mais à Toronto, les températures glaciales n’ont pas rebuté Jennifer Campbell, venue faire des achats de Noël de dernière minute dans le centre-ville.

« Nous avons de grosses tempêtes régulièrement et nous nous adaptons, a lâché cette touriste venue de l’Ontario. Nous sommes canadiens, c’est notre manière de faire. »