(New York) Les compagnies aériennes américaines préparent leurs clients à ce qui pourrait s’avérer être un week-end de fête nationale du 4 juillet compliqué, au moment où le secteur gère difficilement le retour massif des passagers dans ses avions.

Yu Su, un chercheur universitaire en informatique, s’est retrouvé coincé samedi dernier à Charlotte, en Caroline du Nord quand son vol de correspondance pour rentrer chez lui dans l’Ohio n’est jamais parti.

La compagnie n’a annulé son vol de 20 h 30 qu’à minuit passé, après de nombreux reports qui ont créé « l’illusion de l’espoir », dit Yu Su, à qui aucune explication claire du problème n’a été apportée.

Des déboires comme le sien sont monnaie courante ces jours-ci aux États-Unis, les journaux titrant sur le « chaos » des aéroports en amont du week-end du 4 juillet, quand le pays fête son indépendance.

Les problèmes sont tels qu’ils ont attiré l’attention des autorités à Washington.

Les sites de suivi d’avions rapportent chaque jour l’annulation de plusieurs centaines de vols, le retard de milliers d’autres.

Y’a-t-il un pilote dans l’avion ?

Si les aides fédérales ont permis aux compagnies aériennes américaines de ne pas limoger en masse du personnel pendant la pandémie, des milliers de salariés — incités à la retraite ou au départ par leur employeur — ont quitté le secteur quand les avions restaient cloués sur le tarmac.

Par rapport à la période prépandémie, les compagnies aériennes aux États-Unis emploient 15 % de personnel en moins. Mais doivent gérer près de 90 % du volume de passagers pré-2020, selon les analystes de la société de conseil Third Bridge.

Pour Crystal Fricker, dont le vol vers Indianapolis a été annulé une heure avant son départ de Raleigh en Caroline du Nord, c’est bien le manque de personnel qui a fait défaut.

Dans l’incapacité de trouver d’autres vols pour elle et ses deux collègues, le groupe a conduit près de 11 heures pour arriver à l’heure aux réunions du jour.

« Quasiment chaque vol que j’ai pris a eu du retard », a déclaré cette cheffe d’une entreprise de semences.

Selon Peter McNally, de Third Bridge, le manque de pilotes représente le problème le plus aigu.

« Il n’y a pas de solution à court terme », déclare-t-il à l’AFP. « Le problème devient bien plus prononcé lors de ces pics saisonniers ».

Les compagnies aériennes affirment travailler pour résoudre le problème, intensifiant leurs campagnes de recrutement de pilotes et d’autre personnel et réduisant leurs capacités de 15 % cet été par rapport à ce qui était initialement prévu.

Tout en reconnaissant que le manque de pilotes demeure un défi, les compagnies pointent également du doigt d’autres facteurs dont la météo, les absences de personnel en raison de la COVID-19, et le manque de contrôleurs aériens dans certains aéroports.

À boulets rouges

Face à ces tentatives de justification, l’autorité de régulation aérienne (FAA) a rejeté certains des arguments, affirmant avoir ajouté des contrôleurs aériens dans les zones à forte demande.

« Les gens s’attendent, quand ils achètent un billet d’avion, à arriver à leur destination de manière sûre, efficace, fiable et bon marché », a souligné la FAA.

« Après avoir reçu 54 milliards de dollars d’aide durant la pandémie pour permettre aux compagnies d’éviter de vastes licenciements et la banqueroute, le peuple américain mérite que l’on réponde à ses attentes », a poursuivi l’autorité.

Le sénateur Bernie Sanders, figure de la gauche américaine, a tiré à boulets rouges sur le secteur en dénonçant le chaos et les prix « outrageusement élevés », et en réclamant des amendes pour les retards et annulations.

Dans un message jeudi aux clients réguliers de la compagnie, le patron de Delta Ed Bastian a reconnu des niveaux de perturbation actuels « inacceptables », mais en avançant que les efforts de recrutement allaient soulager ces problèmes.

La situation « ne va pas changer du jour au lendemain, mais nous sommes en bonne voie pour une reprise stable » de l’activité, a-t-il écrit.

United Airlines, de son côté, s’attend à près de 5,2 millions de passagers rien que sur la période du 4 juillet, une augmentation de 24 % par rapport à 2021, et un retour à 92 % des niveaux prépandémie.

À l’instar de United et Delta, American Airlines est en pleine campagne de recrutement de pilotes et d’autre personnel. L’entreprise a embauché 800 nouveaux pilotes cette année, avait déclaré début juin son patron Robert Isom.

Et selon plusieurs médias, sa filiale régionale Envoy Air offre à ses pilotes de tripler leur paie pour leurs trajets du mois prochain, afin d’éviter au maximum les perturbations.