(Washington) Les discours rassembleurs, la main tendue à l’opposition, c’est du passé : Joe Biden, qui veut essayer de sauver son précaire contrôle du Congrès lors d’élections cet automne, lâche désormais ses coups contre la droite « extrême » acquise aux idées de Donald Trump.

Mercredi, à l’occasion d’un discours sur l’économie, le président démocrate a lancé une attaque, inhabituelle, contre les projets des républicains et plus particulièrement contre ce qu’il a appelé le « mouvement “MAGA” ».

« Ce mouvement MAGA est vraiment l’organisation politique la plus extrême de l’histoire américaine, de l’histoire américaine récente », a-t-il lâché.

Au travers de cet acronyme, qu’il a répété plusieurs fois, Joe Biden vise évidemment l’ancien président Donald Trump et son slogan « Make America Great Again » (rendre à l’Amérique sa grandeur).

Le président avait commencé son mandat avec la volonté de tourner la page Trump, en prônant le rassemblement, en assumant d’être « ennuyeux » avec de grands projets de réformes, en vantant le redressement économique et les succès de la lutte contre la COVID-19.

Trump en épouvantail

A quelques mois des élections législatives de mi-mandat, historiquement difficiles pour le parti du président, Joe Biden, très impopulaire à cause d’une inflation galopante, a changé de cap.

Il n’est plus question de faire oublier Donald Trump, mais au contraire de l’agiter comme un épouvantail, sans le nommer directement. Les démocrates veulent aussi investir un terrain qu’ils ont semblé éviter jusqu’ici : les « culture wars », ces débats de société qui agitent l’Amérique depuis des décennies, mais qui se sont envenimés ces dernières années au point de diviser le pays en deux camps irréconciliables.  

En jeu : le genre, la sexualité, l’éducation des enfants, la religion, les armes à feu, les questions raciales et la lecture de l’histoire américaine – en particulier quand il s’agit d’esclavage et de ségrégation.  

L’un des sujets les plus brûlants, c’est bien sûr l’avortement, objet d’une révélation explosive lundi. Selon le site Politico, la Cour suprême américaine s’apprête à dynamiter le droit constitutionnel à l’IVG qu’elle avait établi en 1973.  

Joe Biden, ce catholique fervent, s’est fait le premier défenseur du droit à l’avortement. Et surtout, il accuse les républicains, décidés à interdire l’IVG dans de nombreux États qu’ils contrôlent, de vouloir mener d’autres attaques contre les acquis de société, que ce soit la contraception ou le mariage pour tous.

« Que se passera-t-il si un État dit que les enfants LGBTQ “ne peuvent plus aller dans les mêmes salles de classe que les autres enfants ? », a-t-il ainsi demandé mercredi.

« Tout-Puissant »

Le démocrate a ressorti récemment l’une de ses expressions préférées : « Ne me comparez pas au Tout-Puissant, mais à son alternative. »

En clair, Joe Biden, impuissant à convaincre les Américains de ses succès, entend peindre sous les couleurs les plus sinistres le camp d’en face.

« Vous allez l’entendre dire ce mantra beaucoup plus souvent » a assuré mercredi sa porte-parole Jen Psaki.

Reste à savoir dans quelle mesure Donald Trump va imprimer sa marque sur la campagne des républicains pour les élections de mi-mandat.

Le tonitruant milliardaire a commenté avec une retenue inhabituelle le revirement annoncé de jurisprudence de la Cour suprême concernant le droit à l’avortement.

Dans une interview avec le site internet de la chaîne conservatrice Fox, l’ancien président n’a pas ouvertement applaudi la haute juridiction, qui porte son empreinte puisqu’il y a nommé pas moins de trois juges sur neuf.

Estimant que la question du droit à l’IVG devait être laissée aux États, il a déclaré, à propos de l’avortement : « Je pense que j’ai des soutiens des deux côtés. » Selon tous les sondages, la majorité des Américains ne souhaitent pas revenir sur le droit à l’avortement tel qu’il existe.

Une nouvelle venue mardi de l’Ohio — État industriel du Midwest où Joe Biden se rend d’ailleurs vendredi — est venue confirmer son influence persistante sur le parti.

Son poulain, J. D. Vance, y a remporté une primaire républicaine disputée et essayera de ravir le siège du sénateur actuel, un démocrate.

« Il faut absolument que je remercie le 45e président des États-Unis », a lancé mardi le candidat, qui dans le passé avait violemment critiqué le milliardaire républicain, avant de lui faire allégeance.