(Washington) Nouvel épisode de la guerre Washington-Pékin : la Chambre des représentants a adopté vendredi un projet de loi pour localiser sur le territoire américain la fabrication de puces électroniques, essentielles à la production de téléphones intelligents et de voitures.

Hasard du calendrier, le texte a été voté — à 222 voix contre 210 — quelques heures seulement après le lancement des Jeux olympiques d’hiver de Pékin, censés être une nouvelle expression de l’influence chinoise et que les États-Unis ont décidé de boycotter diplomatiquement.

Le « America COMPETES act » prévoit 52 milliards de dollars pour revitaliser l’industrie américaine des semi-conducteurs, aujourd’hui essentiellement fabriqués en Asie, et indispensables pour la fabrication de voitures, téléphones intelligents et équipement médicaux.

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Une des quatre méga-usines de semi-conducteurs de la compagnie Taiwan Semiconductor Manufacturing Company (TSMC), photographiée à Taichung, Taiwan, le 2 septembre 2021.

Avec la pandémie, les industriels ont vu ces réserves de puces fondre à un niveau alarmant.

L’administration Biden assure que cette pénurie a un effet direct sur l’inflation galopante aux États-Unis qui mine les ménages américains… et fait plonger la cote de popularité du dirigeant démocrate.

Le président américain a applaudi le vote « crucial » de vendredi, qui permettra selon lui aux États-Unis de « devancer la Chine et le reste du monde au 21e siècle ».

« Impératif économique »

Le projet de loi de la Chambre des représentants provisionne aussi 45 milliards de dollars pour renforcer la chaîne d’approvisionnement américaine.

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Le géant des puces Intel a déjà annoncé la construction à partir de la fin de l’année de deux usines de semi-conducteurs dans l’Ohio, ancien bastion de la production d’acier. Ci-haut, l’usine d’Intel de Chandler, en Arizona, photographiée le 2 octobre 2020.

Un texte similaire avait déjà été adopté au Sénat en juin, voté par des élus des deux partis. Mais une navette parlementaire sera nécessaire pour harmoniser les deux projets, préfigurant de longues tractations sur la colline du Capitole.

Le texte de la Chambre répond « à l’impératif économique et de sécurité nationale de soutenir l’industrie et les travailleurs américains », a souligné sa présidente Nancy Pelosi vendredi. Il permet aux États-Unis « de ne pas être à la merci d’autres pays », a-t-elle plaidé lors d’une conférence de presse.

Mais à la quasi-unanimité, les républicains de la Chambre se sont opposés au texte, estimant qu’il fait trop peu pour forcer Pékin à rendre des comptes sur ses violations des droits humains et prévoit trop d’investissements contre le changement climatique.

La Chine, en guerre économique avec les États-Unis depuis l’ère Trump, est pourtant l’un des rares sujets sur lesquels le président démocrate s’est inscrit dans la continuité de son prédécesseur républicain.

Pékin accuse quant à lui Washington d’exagérer une soi-disant menace chinoise.

« Made in America »

Le président américain avait aussi souligné fin janvier l’énorme potentiel économique de ces puces en prenant l’exemple des voitures, dont 4 % des composants sont actuellement des semi-conducteurs. En 2030, ceux-ci représenteront 20 % de la fabrication des automobiles.

Il avait pressé les industriels à faire revenir la production aux États-Unis, appelant à un avenir « made in America » (« fabriqué en Amérique »).

Le géant des puces Intel a dans la foulée annoncé la construction à partir de la fin de l’année de deux usines de semi-conducteurs dans l’Ohio, ancien bastion de la production d’acier.

Joe Biden a aussi exhorté le Congrès à se mettre en ordre de marche et adopter sans tarder un texte final approuvé par les deux chambres. « L’Amérique ne peut pas se permettre d’attendre », a-t-il plaidé.

Son administration espère à demi-mot pouvoir brandir ces investissements lors du grand discours de politique générale du président, prévu le 1er mars.  

« Il n’y a aucune raison que cela traîne pendant des mois », a abondé la secrétaire américaine au Commerce, Gina Raimondo.