(Washington) Élue républicaine depuis à peine six ans et jugée trop « progressiste » par d’influents conservateurs, Elise Stefanik est pourtant pressentie, à 36 ans, pour rejoindre les sommets de son parti. Une ascension fulgurante qui s’explique par un seul nom : Donald Trump.        

C’est grâce à sa défense sans faille du milliardaire, y compris dans ses accusations sans fondement de fraudes électorales, que cette élue arrivée au Congrès avec des positions modérées a gagné ses galons de « Trumpiste ».  

Elle « a mon soutien complet et total » : l’ex-président républicain a adoubé cette semaine l’élue d’une circonscription rurale de New York, en lice pour remplacer sa bête noire, Liz Cheney, au poste de numéro trois des républicains à la Chambre des représentants.

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Donald Trump

Un vote pour démettre la fille de l’ancien vice-président Dick Cheney de ses fonctions, qui consistent notamment à porter « le message » du parti en interne et auprès des électeurs, devrait avoir lieu mercredi.  

Élue conservatrice du Wyoming, elle a perdu le soutien des autres chefs du parti après ses vives critiques de Donald Trump.

Elle fut l’une des rares chez les républicains à voter en faveur de sa mise en accusation pour « incitation à l’insurrection » lors de l’assaut du Capitole du 6 janvier. Le milliardaire avait ensuite été acquitté par le Sénat, au terme de sa deuxième procédure, historique, d’« impeachment ».  

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Les républicains reprochent à Liz Cheney ses positions anti-Trump.

Si son groupe parlementaire vote contre Liz Cheney, le scrutin interne pour la remplacer devrait suivre les jours suivants. Et Elise Stefanik a de bonnes chances de l’emporter, forte du soutien de l’ex-président, dont l’influence reste immense chez les républicains.

« Une progressiste »

Une perspective surprenante au regard du bilan de chacune : entre janvier 2019 et janvier 2021, 93 % des votes de Liz Cheney étaient alignés avec les positions de Donald Trump, selon le site FiveThirtyEight, contre seulement 65 % pour l’élue de New York, qui figure en outre parmi les parlementaires les plus enclins à travailler avec les démocrates.  

Elise Stefanik est « une progressiste », a tonné le « Club for Growth », une organisation conservatrice, après l’adoubement de Donald Trump.  

Diplômée de Harvard, elle avait travaillé à la Maison-Blanche pour George W. Bush de 2006 à 2009. À 30 ans, elle fut la plus jeune femme à être élue au Congrès.

Arrivée sur la colline du Capitole en janvier 2015, Elise Stefanik avait au départ tenu ses distances avec Donald Trump, d’abord candidat puis président.

En 2017, elle avait ainsi voté contre sa grande réforme fiscale. Et exprimé son désaccord avec plusieurs de ses décisions, dont le retrait des États-Unis de l’accord de Paris sur le climat.

« Une nouvelle star »

C’est lors de la première procédure de destitution du républicain, dans l’affaire ukrainienne, qu’Elise Stefanik s’est fait connaître du grand public… et de Donald Trump.  

« Une nouvelle star » : cet avide téléspectateur avait apprécié la farouche défense médiatique que l’élue de son État de New York lui offrait.  

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Elise Stefanik questionne des témoins lors d'une séance du Comité du renseignement de la Chambre des représentants, en novembre 2019.

C’était fin 2019. Depuis, Elise Stefanik s’est aussi rangée derrière les accusations de fraudes électorales martelées pendant des mois par le milliardaire après sa défaite à la présidentielle de novembre dernier, malgré l’échec de ses dizaines de recours judiciaires.

Ces allégations avaient culminé lors de l’assaut du Capitole par des manifestants pro-Trump, aux cris de « Stop the Steal » (« Stop au vol » de l’élection).  

Ce jour-là, le Congrès votait pour certifier la victoire du démocrate Joe Biden.  

Elise Stefanik avait signé les objections aux résultats de quatre États clés, et voté, juste après cet assaut meurtrier, contre la certification de l’élection en Pennsylvanie.

Reste que chez la base trumpiste, le scepticisme règne, beaucoup se souvenant trop bien des positions modérées de la parlementaire.

Comme pour mieux les convaincre, Elise Stefanik a fait ces derniers jours la tournée d’émissions ultraconservatrices, en faisant écho aux grands thèmes du défenseur de l’« Amérique d’abord », sur la Chine, contre la famille Biden ou sur les fraudes électorales présumées.

Et en tentant de se présenter en rassembleuse.  

« Je veux envoyer le message clair que nous formons une même équipe », a-t-elle affirmé dans le balado de Steve Bannon, ex-conseiller de Donald Trump.  

« Et cela veut dire travailler avec l’[ex-]président et travailler avec tous nos excellents élus républicains du Congrès ».  

« On ne peut pas faire l’unité en réconciliant la vérité et les mensonges », a protesté dimanche Adam Kinzinger, un des rares élus républicains à s’en prendre ouvertement à l’ex-président. « Et le mensonge, c’est de dire que l’élection a été volée », a-t-il ajouté sur la chaîne CBS.