(Genève) Les États-Unis ont annoncé lundi leur intention de « s’impliquer » à nouveau dans le Conseil des droits de l’homme de l’ONU, jugeant que la politique de la chaise vide de Donald Trump avait laissé le champ libre à des régimes autoritaires.

Le nouveau président Joe Biden « a donné instruction au département d’État de s’impliquer immédiatement et avec force » dans la plus haute instance des Nations unies chargée des droits humains, a annoncé dans un communiqué le chef de la diplomatie américaine Antony Blinken.

L’administration Biden revient sans illusions.

« Nous savons que le Conseil des droits de l’homme est un organe plein de défauts, qui a besoin de réformer son programme, sa composition, et ses priorités, y compris l’attention disproportionnée qu’il porte à Israël », a expliqué le secrétaire d’État.

Mais « pour être en mesure de s’attaquer aux insuffisances du Conseil et s’assurer qu’il remplit son mandat, les États-Unis doivent être présents à la table et faire usage de tout le poids de notre rôle de fer de lance en matière de diplomatie », a-t-il estimé, marquant ainsi la rupture avec une administration Trump qui avait choisi de quitter de nombreuses instances internationales.

Ce vide « a été utilisé à leur avantage par des pays qui ont un programme autoritaire », a dénoncé Antony Blinken, sans nommer personne, mais visant clairement la Chine et la Russie, entre autres.

« Nous le faisons parce que nous savons que le moyen le plus efficace de réformer et d’améliorer le Conseil est de travailler avec lui sur le plan des principes », avait expliqué plus tôt le chargé d’affaires américain Mark Cassayre, dans un message préenregistré diffusé lors d’une réunion par visioconférence de cette instance.

« Quand il fonctionne comme il se doit, le Conseil des droits de l’homme met en exergue les pays qui ont le pire bilan en matière des droits de l’homme et il peut être un forum important pour ceux qui combattent l’injustice et la tyrannie », a encore souligné Antony Blinken.

Les États-Unis vont donc retrouver leur statut d’observateur, a-t-il précisé, promettant de travailler pour apporter « des changements positifs » avec les « amis » de Washington.

Le chargé d’affaires a pour sa part assuré que les États-Unis feraient aussi le ménage chez eux. Il a rappelé que Joe Biden s’était engagé à mettre fin au racisme systémique, alors que le conseil avait critiqué les violences, notamment policières, contre la communauté afro-américaine.

La diplomatie suisse a salué ce retour d’un tweet, et Julian Braithwaite, ambassadeur du Royaume-Uni auprès de l’ONU à Genève, a estimé que l’organisation mondiale en serait plus forte.

Organisation « hypocrite »

L'Union américaine pour les libertés civiles (ACLU), influente association américaine, aussi salué le retour de Washington, tout en soulignant que la « crédibilité » du nouveau gouvernement dépendrait de sa capacité à « passer de la parole aux actes concrets pour promouvoir les droits humains aux États-Unis et à l’étranger ».

Le Conseil dont le siège est à Genève est « chargé de renforcer la promotion et la protection des droits de l’homme dans le monde » et de « formuler des recommandations » en cas de « violations ».  

Il est composé de 47 États membres — dont certains sont régulièrement dénoncés eux-mêmes pour leurs atteintes aux droits humains — qui sont élus par l’Assemblée générale des Nations unies.  

L’administration Trump avait annoncé avec fracas en juin 2018 qu’elle quittait le Conseil en dénonçant « l’hypocrisie » d’un organe « servant ses propres intérêts, qui fait des droits de l’homme un sujet de moquerie ».

Nikki Haley, alors ambassadrice des États-Unis auprès de l’ONU, l’avait accusé de protéger « les auteurs de violations des droits de l’homme » et de constituer « un cloaque de partis pris politiques ».

Cette décision avait illustré la défiance de Donald Trump envers les organismes multilatéraux.

L’ancien conseiller de Donald Trump à la sécurité nationale John Bolton a d’ailleurs estimé que Joe Biden avait « tort de vouloir revenir » dans le Conseil.

Le président Biden a fait du retour sur la scène multilatérale, après quatre années de désengagement et de diplomatie unilatéraliste, une priorité. Dès son premier jour à la Maison-Blanche, il a annoncé le retour des États-Unis dans les Accords de Paris sur le climat et au sein de l’Organisation mondiale de la santé.