(Washington) Des Américains vulnérables sont obligés de rationner leurs médicaments face aux prix démesurés imposés par l’industrie pharmaceutique, accuse un rapport publié vendredi, fruit d’une enquête parlementaire de plus de trois ans.

Cette enquête est fondée sur l’examen de 12 médicaments, distribués par 10 groupes dont les prix ont collectivement augmenté plus de 250 fois aux États-Unis en cinq ans, selon le rapport.

Contrairement à d’autres pays, aucune autorité centrale n’encadre le prix des médicaments aux États-Unis, où seule la concurrence peut pousser les compagnies pharmaceutiques à réduire leurs prix. Or, pour de nombreux traitements, quelques laboratoires se partagent le marché et les prix ont connu des envolées qui défraient la chronique.

« L’enquête de la commission permet de lever le voile sur l’augmentation constante, injuste et injustifiée des prix des médicaments par les entreprises pharmaceutiques », a déclaré Carolyn Maloney, l’élue du Congrès à la tête de cette étude, lors d’une conférence de presse.

Réunions clandestines pour de l’insuline

La présentation de ce rapport de 269 pages était accompagnée du témoignage de Mindy Salango, une femme diabétique de Virginie-Occidentale qui dit en être réduite à organiser des réunions clandestines pour échanger avec d’autres malades de l’insuline, un médicament commun aussi vital pour eux que l’oxygène, mais hors de prix en pharmacie.

Nous ne sommes pas des criminels, et nous nous réunissons dans des stationnements comme si nous étions des criminels.

Mindy Salango, une diabétique qui paie 350 dollars par mois pour son insuline.

Parmi les autres médicaments dans le viseur des élus : l’antalgique Lyrica de Pfizer, qui coûte selon eux quatre fois plus cher qu’en 2004.

PHOTO JB REED, ARCHIVES

Des capsules d’analgésique Lyrica, de Pfizer, dont le prix américain a quadruplé depuis 2004.

L’enquête accuse aussi l’industrie pharmaceutique d’avoir « concentré ses augmentations de prix aux États-Unis pendant de nombreuses années, tout en maintenant ou en réduisant les prix dans le reste du monde. »

Un coup de pouce au plan Biden

Les élus démocrates espèrent que le rapport fera pencher le public en faveur du gigantesque plan d’investissements de Joe Biden, actuellement en débat au Congrès, qui prévoit une refonte de la couverture maladie et imposerait notamment un plafond de 35 dollars par mois sur les prix de l’insuline.

« Ce projet de loi impose la main pesante de l’État dans l’armoire à pharmacie des États-Unis », accuse au contraire le lobby pharmaceutique américain PhRMA. « Et l’on sait que, quand les bureaucrates fixent le prix des médicaments, les patients à terme ont moins accès aux traitements et aux remèdes. »