L’ex-sénateur républicain Bob Dole, figure de la politique américaine et candidat défait à la Maison-Blanche, est mort dimanche matin à l’âge de 98 ans. La nouvelle a déclenché un afflux d’hommages pour ce « héros de guerre ».

« [Bob Dole] était vu comme un très gros joueur du Parti républicain jusqu’à la fin du XXsiècle. C’est quelqu’un qui a été largement associé à la droite religieuse. Il était assez conservateur », explique Rafael Jacob, politicologue et chercheur associé à la chaire Raoul-Dandurand en études stratégiques et diplomatiques de l’Université du Québec à Montréal (UQAM).

Vétéran de la Seconde Guerre mondiale et trois fois candidat à l’investiture républicaine, Bob Dole s’était finalement lancé dans la course à la présidence en 1996, mais avait été battu par Bill Clinton.

Peu après l’annonce de sa mort par la fondation de sa femme, Elizabeth Dole, le président Joe Biden a salué un « homme d’État américain comme il y en a peu », « un héros de guerre », mais aussi « un ami » ayant « un sens de l’honneur et de l’intégrité infaillible ».

« Les États-Unis ont perdu l’un de leurs héros, notre famille a perdu son roc », a déclaré la famille Dole dans un communiqué.

En février, il avait annoncé être atteint d’un cancer avancé des poumons.

Le sénateur Bob Dole était un grand homme qui a vécu une vie extraordinaire au service de l’Amérique et il manquera profondément à tous ceux qui ont eu le privilège de le connaître.

Mike Pence, ex-vice-président

Le sénateur Bernie Sanders, figure de la gauche, a salué un homme qui avait « servi son pays avec courage sur le champ de bataille, et avec dignité au Sénat ».

La présidente de la Chambre des représentants, Nancy Pelosi, a ordonné dimanche la mise en berne des drapeaux du Capitole, selon son chef de cabinet.

De « héros de guerre » à sénateur

Né le 22 juillet 1923, Robert Joseph Dole a grandi à Russell, petite ville du Kansas.

« Avant sa carrière politique, il a eu une carrière militaire très distinguée », indique M. Jacob. Rentré médaillé, mais gravement blessé de la Seconde Guerre mondiale, il subit plusieurs opérations pendant trois ans. Il doit réapprendre à marcher et finit par retrouver la maîtrise de son corps, à l’exception du bras droit.

Il entre au Congrès en 1961, d’abord comme représentant, puis comme sénateur du Kansas, entamant une carrière parlementaire de 35 ans. « C’était le sénateur le plus puissant dans les années 1990 », ajoute M. Jacob.

Bob Dole, écarté par Ronald Reagan en 1980 dans la bataille pour la candidature républicaine à la présidence puis par George Bush père en 1988, persiste et l’emporte en 1996. Mais le sortant Bill Clinton s’imposera facilement face à l’homme de 73 ans.

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Bob Dole et Bill Clinton saluant la foule lors d’un rassemblement à Hartford, au Connecticut, en octobre 1997

Dans la semaine qui a suivi sa défaite, il s’est rendu à l’émission de fin de soirée de David Letterman, où il a donné une longue entrevue dans laquelle il a ri de lui-même et de sa défaite. « C’était toujours clair qu’il reconnaissait sa défaite, qu’il était bon joueur et qu’il souhaitait le meilleur pour le président et pour la suite des choses », se remémore M. Jacob.

Il s’agit de tout un contraste avec la défaite de Donald Trump, soutient le politicologue.

Il avait un profond respect des normes américaines pour ne serait-ce que la démocratie.

Rafael Jacob, politicologue et chercheur associé à la chaire Raoul-Dandurand en études stratégiques et diplomatiques de l’UQAM

Dans les années qui ont suivi sa défaite, il est demeuré présent dans le Parti républicain. « En 2016, il est devenu le seul ancien candidat du parti à appuyer Donald Trump », précise M. Jacob.

Il a continué à s’attaquer aux démocrates, combattant notamment le projet de réforme de l’assurance maladie du président Barack Obama.

« Pour quelqu’un de son âge, il restait relativement accessible au public. Il donnait encore des entrevues il y a à peine quelques mois. Ce n’est pas tous les ex-politiciens qui, aussi tard dans leur vie, étaient aussi peu reclus », ajoute-t-il.

Bob Dole était marié à Elizabeth Dole, qui a elle-même connu une brillante carrière politique en occupant les fonctions de secrétaire aux Transports, secrétaire au Travail et sénatrice de la Caroline du Nord.

À l’extérieur de la politique, il a fait de la publicité à la télévision pour Pepsi et Viagra.