(Washington) Des centaines d’invités, une fanfare au grand complet et des drapeaux à foison dans les jardins de la Maison-Blanche : Joe Biden a apposé lundi sa signature sous un gigantesque plan d’infrastructures, une rare éclaircie pour un président impopulaire.

« Voilà mon message aux Américains : les États-Unis vont de nouveau aller de l’avant et votre vie va changer pour le meilleur », a déclaré un président visiblement ragaillardi.

Devant lui, des parlementaires, des membres de son gouvernement et des syndicalistes frigorifiés, malgré le soleil de cette fin d’après-midi de novembre, ce qui ne les a pas empêchés d’applaudir et d’acclamer les divers orateurs.

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Joe Biden, confronté à de mauvaises nouvelles économiques et de désastreux sondages, voulait que cette cérémonie en grande pompe illustre sa vision d’une Amérique capable de consensus, d’une terre de « possibilités ».

La loi, péniblement votée il y a une dizaine de jours par la Chambre des représentants, consacre 1200 milliards de dollars à la rénovation ou construction de ponts, routes, bornes pour voitures électriques, canalisations d’eau.

Elle doit aussi permettre de développer les transports publics et l’internet à haut débit.  

Le tout, selon Joe Biden, mettra les États-Unis en position de « gagner la compétition » face à la Chine — le président américain et son homologue chinois Xi Jinping auront d’ailleurs, lundi en soirée, une réunion virtuelle.

Le texte a récolté des voix de l’opposition républicaine, au grand dam de Donald Trump — le milliardaire voulait lui aussi lancer un grand programme d’infrastructures, qui n’a jamais vu le jour.

L’ancien président a fustigé les 13 élus républicains qui ont voté en faveur du texte à la Chambre des représentants.

L’une de ses fidèles, Marjorie Taylor Greene, les a même qualifiés de « traîtres », et a fait circuler les numéros de téléphone de leurs bureaux.  

De fait, peu de ténors de l’opposition lundi sur les pelouses de la Maison-Blanche, malgré l’insistance de Joe Biden à saluer le fait que cette loi ait été soutenue par des élus des deux partis, dans un pays où les clivages partisans sont chauffés à blanc.

Rob Portman, sénateur républicain de l’Ohio, a bien pris la parole, mais lui n’a pas à craindre des représailles des pro-Trump : il ne se représentera pas en 2022, lors d’élections législatives de mi-mandat qui s’annoncent très compliquées pour Joe Biden et le parti démocrate.

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Le sénateur républicain de l’Ohio, Rob Portman

Sondage

Si les projets de Joe Biden sont populaires auprès des Américains, sa cote de confiance ne cesse de baisser depuis le retrait chaotique d’Afghanistan cet été.

La dernière enquête d’opinion du Washington Post et de la chaîne ABC, publiée dimanche, établit la cote de confiance du président américain à 41 %.  

Seulement 39 % des Américains approuvent sa politique économique, et ils sont 70 % à juger que la situation économique aux États-Unis est mauvaise.

La première puissance économique mondiale est repartie en fanfare, elle connaît aussi une poussée d’inflation et des problèmes d’approvisionnement, tandis que la Maison-Blanche n’a pas, comme elle se le promettait, complètement tourné la page de la pandémie.

De quoi peser sur le quotidien de cette classe moyenne à laquelle Joe Biden ne cesse de promettre des jours meilleurs.

La poussée des prix complique aussi un autre grand projet du président américain, moins consensuel que le plan d’infrastructures : 1750 milliards de dollars de dépenses sociales et d’aides à la transition énergétique, qui doivent être examinées cette semaine par la Chambre des représentants, puis être votées par le Sénat.

Là, impossible de compter sur un soutien des républicains, dont certains crient au « socialisme », le pire épouvantail possible dans l’imaginaire politique américain.

Il faudra convaincre les sénateurs démocrates les plus au centre, et en particulier Joe Manchin (Virginie-Occidentale) et Kyrsten Sinema (Arizona), tous deux présents à la cérémonie lundi.

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La sénatrice démocrate de l’Arizona, Kyrsten Sinema

La seconde, très discrète en public, a surpris en prenant la parole, et Joe Biden lui a rendu hommage dans son propre discours.

La signature de la loi sur les infrastructures lundi est moins un point final que le début d’une vaste offensive de communication de la Maison-Blanche.

Cette semaine, Joe Biden ira faire le service après-vente de ce texte, et la promotion de celui qui reste à vanter, dans l’État du New Hampshire (mardi) et dans la grande ville industrielle de Detroit (mercredi).