(Washington) Lutte contre l’avortement, levées de restrictions sur les armes à feu ou combat farouche contre les mesures anti-COVID-19 : trois gouverneurs républicains rivalisent de décisions conservatrices avec déjà un œil sur la prochaine présidentielle américaine, comme engagés dans une course au plus trumpiste des trumpistes.

Car près de huit mois après son départ de la Maison-Blanche, l’ex-président américain Donald Trump reste le grand faiseur de rois chez les républicains.

Certes, le milliardaire flirte ouvertement avec une nouvelle candidature lors de la présidentielle de 2024.  

Mais en attendant son éventuelle annonce, qui n’arriverait que bien plus près de cette échéance, ses héritiers apparents occupent le terrain sans confirmer leurs ambitions présidentielles, en tentant de s’attirer les suffrages des électeurs trumpistes.  

Avec en première ligne trois gouverneurs qui jouent leur réélection dès 2022 : les dirigeants de deux des plus gros États républicains, Greg Abbott, gouverneur du Texas et Ron DeSantis en Floride, ainsi que la gouverneure du petit État conservateur du Dakota du Sud, célèbre pour son mont Rushmore, Kristi Noem.  

« La question n’est pas tant qui sera le prochain Trump, mais qui est en meilleure position pour attirer les électeurs de Trump », souligne le stratège républicain John Feehery.  

« Qui peut le mieux se faire entendre des électeurs ouvriers qui se sentent méprisés par l’Establishment politique ? Qui peut remporter la primaire des téléspectateurs de Fox », la chaîne prisée des conservateurs, dit-il à l’AFP.  

« Les bonnes grâces de Trump »

Au Texas, Greg Abbott, 63 ans, a signé une loi ultra-controversée, entrée en vigueur mercredi, qui rend l’immense majorité des avortements illégaux. Ce même jour, 666 nouvelles lois ont commencé à être appliquées dans ce vaste État, dont une qui permet aux Texans de porter leur arme à feu partout avec eux, sans autorisation spéciale.

En Floride, Ron DeSantis, 42 ans, a notamment limité les restrictions imposées sur le port d’armes et compliqué l’accès à l’avortement. Face à la pandémie de COVID-19, il a opté pour une relance rapide de l’économie après les premiers mois de fermeture.

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Ron DeSantis

Occupant une place de choix dans les grands rassemblements conservateurs et dans les émissions phare ces derniers mois, Kristi Noem, 49 ans, s’est aussi imposée en rivale potentielle.  

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Kristi Noem

Cet été dans l’Iowa – une étape traditionnelle des candidats qui veulent signaler leur intérêt pour la Maison-Blanche – elle a déclaré qu’elle « détest(ait) réellement » l’Amérique sous la présidence du démocrate Joe Biden.

De façon plus surprenante, celle qui se pose en grande défenseure de la liberté face aux mesures anti-COVID-19 a aussi décoché des flèches en direction d’autres gouverneurs républicains, les accusant d’avoir « réécrit l’Histoire » en « prétendant » qu’ils n’avaient pas fermé leurs économies pendant la pandémie.

Une pique que beaucoup ont vue comme destinée à Ron DeSantis.  

En plus de ces batteries de mesures, les trois gouverneurs s’emparent régulièrement des grands sujets qui embrasent la politique américaine, comme les droits des personnes transgenres ou les mesures antiracisme défendues par les démocrates.

« Parfois en politique, il s’agit plus de ceux qui sont contre vous plutôt que de ce que vous soutenez », explique à l’AFP Kyle Kondik, politologue de l’université de Virginie. « Ces trois gouverneurs ont cherché la bagarre avec la gauche à plusieurs reprises, et je pense que leurs militants apprécient. »

Pour les élections parlementaires de mi-mandat, prévues en novembre 2022, Donald Trump a déjà déclaré son soutien à Greg Abbott, « un combattant », mais n’a pas encore décerné son précieux parrainage aux deux autres.  

Quant à la présidentielle encore lointaine de 2024, c’est Ron DeSantis – « un type super » selon l’ex-président – qui apparaît le mieux placé dans les sondages informels républicains ne prenant pas en compte Donald Trump.  

Selon John Feehery, le plus important pour les candidats républicains est de « rester dans les bonnes grâces de Trump et de ne pas se mettre à dos » ses électeurs.  

Mais tous les pronostics resteront purement théoriques si, comme il le prédit, le 45e président des États-Unis entre dans l’arène :

« Je pense que Trump va se représenter et qu’il remportera la nomination. »