(New York) Populaire pendant la pandémie de COVID-19, le gouverneur démocrate de l’État de New York, Andrew Cuomo, a été accablé mardi par les conclusions d’une enquête indépendante l’accusant d’avoir harcelé sexuellement une dizaine de femmes, ce qu’il a aussitôt nié.

Malgré ces dénégations, les appels à la démission se sont multipliés dans son camp, jusqu’au président Joe Biden.

« Je pense qu’il devrait démissionner », a affirmé depuis la Maison-Blanche le président des États-Unis, considéré comme un ami d’Andrew Cuomo.

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« Je pense qu’il devrait démissionner », a affirmé Joe Biden.

La présidente démocrate de la Chambre des représentants, Nancy Pelosi, a aussi demandé au gouverneur de quitter son poste, après la publication de ce rapport explosif de 165 pages, qui vient renforcer les accusations.

Âgé de 63 ans, gouverneur depuis 2011 de l’État de New York, où il a déjà été réélu en 2014 et 2018, et pressenti pour se représenter en 2022, Andrew Cuomo se retrouve de plus en plus fragilisé. Une chute radicale pour ce politique expérimenté, qui s’était révélé comme une véritable vedette au plus fort de la pandémie de coronavirus au printemps 2020.  

Selon l’enquête diffusée mardi, Andrew Cuomo « a harcelé sexuellement plusieurs femmes et, ce faisant, violé la loi fédérale et celle de l’État » de New York, a affirmé la procureure de l’État, Letitia James, lors d’une conférence de presse, annonçant du même coup la fin des investigations de son côté.

Service de protection

Parmi onze victimes figurent d’anciennes et actuelles fonctionnaires de l’État, dont une femme qui avait été affectée au service de protection du gouverneur, à la demande même d’Andrew Cuomo, après qu’il l’eut rencontrée en novembre 2017, décrit le rapport.

« Baisers et étreintes non désirées », « commentaires inappropriés », gestes déplacés, le rapport attribue une longue liste d’actes répréhensibles au gouverneur, accusé à plusieurs reprises d’avoir posé ses mains de manière indécente sur ses employées.

Andrew Cuomo a de nouveau rejeté les accusations.

« Je n’ai jamais touché quelqu’un de manière inappropriée ou fait des avances sexuelles inappropriées », a-t-il réagi, dans une déclaration filmée depuis son bureau.  

À l’heure actuelle, une enquête qui peut aboutir à la destitution du gouverneur a d’ores et déjà été ouverte devant le Parlement de l’État de New York et le chef de file des démocrates à la chambre basse, Carl Heastie, a promis mardi d’accélérer la procédure.

Le procureur du comté d’Albany, la capitale de l’État, David Soares, a évoqué de son côté une « enquête criminelle en cours » et a encouragé d’éventuelles victimes à se faire connaître.

Selon les conclusions de l’enquête réclamée par Letitia James, le gouverneur et des membres de son personnel ont « aussi pris des mesures de représailles à l’encontre d’au moins une employée pour avoir témoigné » contre le gouverneur, sur fond d’« environnement de travail toxique ».

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La procureure générale de l’État, Letitia James en conférence de presse.

« Vous ne pouviez pas dire non »

« C’était une culture où vous ne pouviez pas dire non au gouverneur », a résumé Joon Kim, l’un des responsables de l’enquête, qui s’exprimait aux côtés de la procureure.

Andrew Cuomo avait longuement été entendu par les enquêteurs le 17 juillet.

Durant son intervention mardi, il s’est employé à nier les accusations ou à les relativiser, affirmant notamment qu’il lui arrivait « d’embrasser les gens sur le front, sur la joue », ou de les étreindre, une habitude pour les mettre à l’aise, selon lui.

Dans un document de 85 pages qu’il a ensuite fait diffuser pour se défendre, il joint des photos de l’actuel ou d’anciens présidents américains, Joe Biden, George W. Bush ou Barack Obama, serrant ou embrassant d’autres personnes.

« Je comprends maintenant qu’il y a des questions générationnelles ou culturelles que, franchement, je n’avais pas totalement saisies. Et j’ai appris de cela », a-t-il ajouté, dans un début de mea culpa.

Il a notamment affirmé avoir fait appel à un expert pour établir de nouvelles règles et procédures en matière de lutte contre le harcèlement sexuel au sein de son administration.

Homme politique expérimenté, Andrew Cuomo s’était élevé au rang de figure nationale pendant la pandémie de COVID-19, beaucoup reconnaissant sa compétence et sa poigne pour gérer la situation lorsque New York et sa région avaient été l’épicentre de la crise sanitaire, au printemps 2020.

Certains voyaient déjà ce fils de gouverneur, ex-ministre du gouvernement de Bill Clinton et ami de Joe Biden, briguer la Maison-Blanche.

Mais un an plus tard, sa position avait été fragilisée par les premiers témoignages de harcèlement sexuel. Il avait aussi été mis en difficulté par des accusations d’avoir minimisé le bilan de la COVID-19 dans les maisons de retraite de l’État.