(Washington) Joe Biden a annoncé lundi, au côté du premier ministre irakien Moustafa al-Kazimi, une « nouvelle phase » de la présence militaire américaine en Irak, avec une fin annoncée de toute « mission de combat » qui ne remet pas en cause la présence de troupes dans le pays.

« Nous ne serons pas à la fin de l’année dans une mission de combat » en Irak mais « notre coopération contre le terrorisme continuera même dans cette nouvelle phase », a dit le président américain dans le bureau Ovale, où il avait invité le chef de l’exécutif irakien.

« La relation va évoluer complètement vers un rôle de formation, conseil, assistance et partage de renseignements » des forces irakiennes engagées contre le groupe djihadiste État islamique (EI), et « il n’y aura plus de forces avec une mission de combat d’ici au 31 décembre 2020 » en Irak, a précisé le département d’État américain dans un communiqué.  

Selon ce même texte, « les États-Unis réaffirment leur respect de la souveraineté et des lois irakiennes et s’engagent à fournir les ressources dont l’Irak a besoin pour préserver son intégrité territoriale. »

« Plus solide que jamais »

« Notre relation est plus solide que jamais », a dit le premier ministre irakien, qui cherche à consolider sa position très précaire, à trois mois des élections législatives.

À la tête d’un pays ravagé par la corruption, la pauvreté et la pandémie, où frappent encore des cellules dormantes de l’EI, Moustafa al-Kazimi est tiraillé entre l’allié américain et de puissantes factions pro-Iran.

Dans les faits, les experts n’attendent pas de changement majeur, la présence militaire américaine dans le pays n’étant, de fait, plus considérée comme une force d’intervention active.

La majorité des troupes américaines, envoyées en 2014 dans le cadre d’une coalition internationale pour aider Bagdad à défaire l’EI, ont été retirées sous la présidence de Donald Trump. Et officiellement, les quelque 2500 militaires américains encore déployés dans le pays ne combattent pas et jouent déjà un rôle de « conseillers » et de « formateurs ».

Avec cette fin annoncée de la « mission de combat », le premier ministre irakien espère reprendre un peu l’ascendant sur les puissantes factions pro-Téhéran regroupées au sein du Hachd al-Chaabi, coalition à la fois paramilitaire et intégrée à l’État.

Ces factions, qui sont soupçonnées d’avoir mené depuis le début de l’année une cinquantaine d’attaques contre les intérêts américains en Irak, réclament le départ pur et simple de toutes les troupes déployées par Washington.

Mais cela paraît très improbable, alors que des cellules résiduelles de l’EI restent actives dans le pays.

Ne pas reproduire l’erreur de 2011

Le groupe djihadiste a revendiqué un attentat meurtrier il y a un peu plus d’une semaine dans la capitale irakienne.

Ramzy Mardini, spécialiste de l’Irak au Pearson Institute de l’université de Chicago, fait valoir que le président américain risquerait de subir un « coût politique » conséquent si le scénario de 2011 se reproduisait. À savoir un retrait américain largement considéré comme une erreur stratégique majeure, qui a permis l’émergence de l’EI.

L’Irak est par ailleurs un maillon important du dispositif stratégique des États-Unis, qui mènent les opérations de la coalition antidjihadiste en Syrie voisine.

Et pas question pour Washington d’abandonner le pays à l’influence iranienne, en plein regain de tensions entre Iran et États-Unis – même si ces derniers entendent toujours sauver l’accord international de 2015 sur le nucléaire iranien.

Vendredi encore, une attaque au drone a été menée sur une base abritant des militaires américains au Kurdistan (nord), sans faire de victimes.

Un « Comité de coordination des factions de la résistance irakienne », considéré comme une façade pour les groupes pro-Iran, a redemandé « le retrait total de toutes les forces américaines », faute de quoi les attaques se poursuivraient.