(Mission) Une femme du Kansas qui allègue que des relations sexuelles consensuelles avec un ami dans son dortoir d’université se sont transformées en une agression terrifiante a pris les choses en main lorsque les procureurs ont refusé de porter des accusations de viol. Elle a convoqué un grand jury de citoyens, s’appuyant sur une loi d’État vieille de 134 ans.

Madison Smith, 22 ans, a recueilli les centaines de signatures nécessaires pour former le grand jury après que le procureur du comté eut résolu l’affaire en permettant à Jared Stolzenburg de plaider coupable de voies de fait graves et de bénéficier d’une probation de deux ans.

Mme Smith, qui a obtenu son diplôme plus tôt ce mois-ci du Bethany College à Lindsborg, au nord de Wichita, fait partie d’une génération de femmes encouragées à rendre publiques leurs agressions dans la foulée du mouvement #metoo.

« Cela se produit dans tout le pays, dans le monde entier, (les histoires) des victimes et des survivants sont minimisées par les procureurs qui ne les croient pas », a-t-elle déclaré. « Et ce n’est pas correct parce que la culture du viol est omniprésente, nous devons nous en débarrasser, et l’un des moyens de le faire est de diffuser nos histoires. »

Le Kansas est l’un des six États qui permettent aux citoyens de demander la formation d’un grand jury. La loi de 1887 a été rarement utilisée jusqu’à ce que des militants antiavortement commencent à le faire pour forcer des enquêtes de grand jury sur des cliniques d’avortement. Elle a depuis été utilisée pour s’attaquer à des librairies pour adultes et pour contester le droit de l’ancien secrétaire d’État du Kansas, Kris Kobach, de se présenter en tant que candidat républicain au poste de gouverneur.

Mais le cas de Mme Smith, qui sera examiné en septembre, est considéré comme la première fois qu’une personne disant avoir été victime d’une agression sexuelle l’utilise, a souligné Kathy Ray de la Coalition du Kansas contre la violence sexuelle et domestique.

Le processus de recherche d’un grand jury n’a pas été facile. Mme Smith a dû se tenir debout dans un stationnement pour raconter son histoire à des inconnus afin de recueillir des centaines de signatures, puis recommencer lorsque la première pétition a été rejetée pour des raisons techniques.

Certains des inconnus qu’elle a approchés lui ont arraché le stylo des mains quelques minutes seulement après qu’elle eut commencé à parler, la serrant dans ses bras et lui chuchotant à l’oreille pour que les autres à proximité ne puissent pas entendre qu’ils avaient eux-mêmes été agressés sexuellement dans le passé.

« Ils étaient très reconnaissants que je me batte, que je combatte simplement le système judiciaire et que j’essaie d’apporter un changement dans le monde, parce qu’ils avaient eu trop peur pour se battre », se souvient-elle.

Mais Mme Smith estime qu’il s’agit du seul moyen d’obtenir justice pour la présumée attaque de février 2018.

Le procureur du comté de McPherson, Gregory Benefiel, a expliqué à la mère de Mme Smith dans une conversation enregistrée que le dossier était compliqué parce que Mme Smith n’avait pas retiré son consentement verbalement pendant la rencontre. Mme Smith a souligné que c’était parce qu’il l’étouffait.

« Je pense que n’importe qui peut réaliser que si vous ne pouvez pas respirer, vous ne pouvez pas parler », a-t-elle déclaré.

Mme Smith a raconté que l’attaque s’était produite après qu’elle fut tombée sur Jared Stolzenburg alors qu’elle faisait la lessive et qu’elle était retournée dans sa chambre au Bethany College, où ils avaient eu des relations sexuelles. C’était initialement consensuel, mais il a ensuite commencé à la gifler et à l’étrangler, rendant difficile sa respiration, a déclaré Mme Smith lors de l’audience de détermination de la peine de Jared Stolzenburg en août 2020.

« Je pensais vraiment qu’il allait me tuer, et que la seule façon dont j’allais quitter la pièce était dans un sac mortuaire », a raconté Mme Smith.

« Il m’étranglait pendant 20 ou 30 secondes à la fois et je commençais à perdre connaissance », a-t-elle dit.

Jared Stolzenburg n’a pas de numéro de téléphone répertorié et n’a pas immédiatement répondu à un message sur Facebook.

Le procureur Benefiel a déclaré dans une entrevue à l’Associated Press que les crimes sexuels sont « extrêmement difficiles à poursuivre » parce que les jurés recherchent « ce type de preuve à la “CSI” ». Il a déclaré qu’il ne pouvait pas commenter les détails de ce dossier, mais a ajouté qu’il pensait que Mme Smith et lui voulaient tous deux la même chose : « la vérité et la justice ».