(Washington) Fermeté vis-à-vis de la Chine, apaisement avec l’Union européenne, la future secrétaire au Trésor américain Janet Yellen a dévoilé mardi les grandes lignes de la politique commerciale de l’administration Biden.

Auditionnée devant le Sénat en vue de sa confirmation à ce prestigieux ministère, Mme Yellen, 74 ans, a annoncé que les États-Unis allaient s’inscrire dans le sillage de l’administration Trump à l’égard de Pékin.

« Nous devons nous attaquer aux pratiques abusives, injustes et illégales de la Chine », a résumé la future secrétaire au Trésor, reprenant des accusations portées maintes fois par le président sortant Donald Trump.

Citant « le vol de la propriété intellectuelle », « les transferts forcés de technologies américaines » ou « les subventions illégales », Mme Yellen estime comme son prédécesseur, Steven Mnuchin, que ces pratiques causent du tort aux entreprises américaines.  

Pékin a des pratiques qui lui donnent un avantage « injuste », a-t-elle également déploré.

Donald Trump « a eu raison » d’avoir une position « plus ferme face à la Chine », a reconnu de son côté Antony Blinken, le futur secrétaire d’État du président désigné des États-Unis, tout en déplorant la méthode.

C’est au nom de la défense des entreprises et travailleurs américains que Donald Trump avait déclenché en 2018 une guerre commerciale contre la deuxième puissance économique du monde.  

Le conflit aura duré près de deux ans jusqu’à la signature d’un accord en janvier 2020 qui prévoit plus d’achats de produits américains, mais maintient une grande partie des tarifs douaniers américains et chinois.

L’administration Biden va déployer tout un arsenal d’outils pour lutter contre ces pratiques, a déclaré Mme Yellen sans donner de détails.

Si les maux identifiés sont inchangés et la volonté de les combattre intacte, l’administration Biden va en revanche changer de méthode : Washington ne fera plus cavalier seul dans son offensive contre la Chine.

S’appuyer sur les alliés

« Nous allons travailler avec nos alliés », a assuré Mme Yellen, en référence notamment aux pays de l’Union européenne qui déplorent également les pratiques commerciales chinoises.

Il faut coopérer avec les alliés « au lieu de les dénigrer », a renchéri Antony Blinken. Et, a-t-il dit, il faut « participer et diriger les institutions internationales plutôt que de s’en désengager ».  

Donald Trump a, lui, vanté son bilan, estimant que son administration avait « uni les nations du monde pour faire face à la Chine comme jamais auparavant ».

Pour gérer le conflit avec Pékin, l’administration Biden pourra compter sur Katherine Tai, qui va occuper le poste influent de représentant américain au Commerce (USTR). Elle avait défendu, sous l’administration Obama, les États-Unis devant l’Organisation mondiale du commerce (OMC) sur des désaccords avec la Chine.

L’une des façons de rallier les Européens sera de jouer la carte de l’apaisement sur les dossiers délicats tels que celui de la fiscalité des géants du numérique.

Vers un accord avec l’UE sur le numérique ?

Prenant le contre-pied de son prédécesseur qui avait mis fin aux discussions dans le cadre de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), Janet Yellen a souligné que cette taxe « permettrait de percevoir une juste part des entreprises, tout en maintenant la compétitivité de nos entreprises et en diminuant les incitations […] aux activités offshore que nous ne voulons certainement pas récompenser ».

L’administration Trump avait aussi menacé la France de représailles sous forme de droits de douane supplémentaires sur des produits emblématiques comme le champagne, en rétorsion à la mise en œuvre d’une taxation française en attendant une taxation dans le cadre de l’OCDE.  

Mais, elle a finalement suspendu leur application. Reste à savoir si l’administration Biden va les lever définitivement.

Également désireuse de retrouver une relation normalisée avec Washington, la Commission européenne a, elle, proposé à Washington un « nouveau programme transatlantique pour un changement planétaire ».

Il s’agit « d’instaurer un dialogue spécifique avec les États-Unis sur la responsabilité des plateformes en ligne et des grandes entreprises technologiques, de travailler ensemble sur la fiscalité équitable et les distorsions du marché et d’élaborer une approche commune pour protéger les technologies critiques ».

Pour l’heure, l’administration Biden n’a pas encore fait savoir si elle était favorable à ces propositions.

Autre sujet : les dévaluations monétaires pour favoriser les exportations, notamment chinoises.

Sur ce point, Janet Yellen a promis que le niveau du dollar américain serait « fixé par les marchés ».

Son ministère combattra « toutes les tentatives des pays étrangers de manipuler artificiellement les valeurs monétaires pour obtenir un avantage injuste dans le commerce », a-t-elle assuré.