(Washington) À l’entendre en campagne, Donald Trump n’avait jamais envisagé la défaite.  

Privé d’un second mandat par la victoire de Joe Biden, il va désormais devoir se pencher sur une question épineuse : à quoi ressemblera sa vie après son départ de la Maison-Blanche le 20 janvier 2021 ?

S’il évoque régulièrement sa vie d’avant la politique – « J’avais une vie si magnifique » – il est moins bavard sur celle d’après.

Sa passion revendiquée du golf pourrait le pousser à fréquenter les verts avec encore plus d’assiduité. Samedi, au moment même où les chaînes de télévision américaines annonçaient sa défaite, il se trouvait dans son club de Sterling, en Virginie, non loin de Washington.

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Donald Trump jouait au golf samedi dans son club de Sterling, en Virginie, non loin de Washington.

À l’aune des quatre années écoulées, un seul scénario semble difficile à imaginer : le retrait discret et l’anonymat.

Le retour à la télévision ?

À l’heure de la reconversion, Donald Trump pourrait être de nouveau tenté par le petit écran.

Si son nom comme promoteur immobilier était connu dans les années 80 et 90, c’est The Apprentice qui lui a permis de pousser la porte de tous les foyers américains.

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Donald Trump lors d’un évènement promotionnel pour Celebrity Apprentice, en janvier 2015.

Co-producteur de cette émission de télé-réalité qu’il a présentée entre 2004 et 2015, il a réussi, en dépit des hauts et des bas de son empire immobilier, à projeter une image d’homme d’affaires à poigne et charismatique.

Dans une grande salle de réunion de la Trump Tower, le magnat de l’immobilier recevait les candidats et en écartait un par émission, en usant de sa phrase devenue rituelle : « You’re fired ».

À plusieurs reprises depuis son arrivée à la Maison-Blanche, il a déploré le positionnement de Fox News, pas assez trumpiste à son goût.

Les téléspectateurs « veulent une alternative maintenant. Et moi aussi ! », tweetait-il il y a quelques mois.

2021 pourrait être l’occasion de se lancer, soit à partir d’une feuille blanche (mais l’investissement initial pourrait être prohibitif), soit à partir de chaînes existantes « amies », telles que One America News et NewsMax TV.

Les tribunaux ?

Une fois la Maison-Blanche quittée, l’horizon judiciaire de Donald Trump pourrait s’assombrir grandement.

À New York, il est visé par deux enquêtes qui pourraient chacune lui valoir des poursuites.

La première, pénale et initiée par le procureur de Manhattan, Cyrus Vance, vise de possibles faits de fraude fiscale, d’escroquerie à l’assurance et manipulations comptables.

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Le procureur de Manhattan, Cyrus Vance

La seconde, civile, a été lancée par la procureure de l’État de New York Letitia James et cherche à déterminer si la Trump Organization a menti sur la taille de ses actifs pour obtenir des prêts et des avantages fiscaux.

D’autres procédures pourraient refaire surface lorsqu’il aura quitté le 1600 Pennsylvania Avenue.

La tentation 2024 ?

Si, à l’inverse de ses trois prédécesseurs-Barack Obama, George W. Bush et Bill Clinton – il a échoué à obtenir un second mandat, il n’a pas subi la déroute dans les urnes que lui prédisaient certains.

Dans une élection à la participation record, il a obtenu 70 millions de voix (contre 74 millions pour Joe Biden) et pourrait donc être tenté de rester au cœur des débats.

En théorie, rien ne l’empêche de tenter de nouveau sa chance dans quatre ans.

La Constitution interdit de faire plus de deux mandats, mais en faire deux non consécutifs est une possibilité.

Un seul homme a réussi ce pari : Grover Cleveland, à la fin du XIXe siècle. Élu en 1884, il fut battu en 1888, puis élu de nouveau en 1892. Il est, dans les livres d’histoire, à la fois le 22e et le 24e président des États-Unis.

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Grover Cleveland a été élu en 1884, battu en 1888 et puis élu de nouveau en 1892.

Au-delà des innombrables obstacles politiques à surmonter (le « Grand Old Party » pourrait être tenté de tourner la page du trumpisme), la question de l’âge pourrait aussi se poser.

Grover Cleveland avait 56 ans début de son deuxième mandat. Donald Trump en aurait 78.

Mick Mulvaney, l’un de ses anciens directeurs de cabinet, aujourd’hui envoyé spécial des États-Unis en Irlande du Nord, a ouvertement évoqué cette idée dès jeudi.

« Je m’attends clairement à ce que le président reste impliqué en politique et je pense qu’il fera partie des gens qui seront probablement candidats en 2024 », a-t-il déclaré.

Prendre la route ?

Sur le ton à la fois provocateur et ironique qu’il affectionne, le 45e président de l’histoire a évoqué plusieurs « pistes » ces derniers mois.

En juin à la Maison-Blanche il avait évoqué, sur le ton de l’humour, la possibilité d’un road trip avec sa femme Melania Trump.

« Peut-être que j’irai à New York par la route avec la première dame. Je pense que je vais acheter un camping-car et voyager avec la première dame ».

Dans un registre moins romantique, il s’est interrompu il y a quelques jours lors d’un rassemblement de campagne en Pennsylvanie pour admirer les camions garés à distance.

« Jolis camions ! Vous pensez que je pourrais grimper dans l’un d’eux et filer ? J’adorerais ça, juste conduire et tailler la route ».

Lors d’un déplacement à The Villages, la plus grande communauté de retraités en Floride, il avait évoqué une option plus paisible.

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The Villages, la plus grande communauté de retraités des États-Unis, située à une heure de route d’Orlando, en Floride.

« Je vais déménager dans The Villages. Ce n’est pas une mauvaise idée. Elle me plaît même beaucoup ! ».

Reste une option plus radicale.

« Je ne vais pas me sentir très bien », déclarait-il, il y a quelques semaines évoquant l’humiliation que représenterait selon lui une défaite face à « Joe l’Endormi ».

« Peut-être que je vais devoir quitter le pays ».