(New York) Donald Trump enverra-t-il des policiers fédéraux à New York et dans d’autres bastions démocrates confrontés à une flambée de criminalité ? Le bras de fer est engagé, notamment avec sa ville natale, alors que le président républicain a fait du retour de « l’ordre » un de ses slogans pour la présidentielle de novembre.  

Le maire de New York, Bill de Blasio, s’est insurgé mardi contre la menace brandie la veille par le président américain d’envoyer des forces fédérales dans la capitale économique américaine.

Si M. Trump envoyait des agents fédéraux, « cela ne ferait qu’ajouter aux problèmes » et « nous l’attaquerions immédiatement en justice pour arrêter ça », a déclaré le maire lors d’un point presse.

« Ce serait un nouvel exemple des mesures illégales et anticonstitutionnelles prises par le président », a-t-il ajouté.

La veille, les maires démocrates de Portland, Seattle, Chicago, Atlanta, Kansas City et de la capitale fédérale Washington avaient envoyé une lettre au ministre américain de la Justice, William Barr, et au directeur du ministère de la Sécurité Nationale, Chad Wolf, pour s’opposer au « déploiement unilatéral » de forces fédérales dans leurs villes.  

Aux États-Unis, les municipalités sont en principe en charge des méthodes utilisées face à la criminalité.

Revenant sur l’envoi ces derniers jours de policiers fédéraux à Portland, dans l’Oregon - où des agents, en tenue de camouflage et sans badge d’identification, ont procédé à des arrestations contestées-les maires ont estimé que leurs interventions avaient contribué à « une escalade » de tensions, et comparé la méthode aux « tactiques utilisées par des régimes autoritaires ».  

La chef des démocrates à la Chambre des Représentants, Nancy Pelosi, a même comparé les agents fédéraux à des « unités d’assaut ».  

« Gauchistes » laxistes

Mais le président, très critiqué pour sa gestion de la pandémie et devancé dans les derniers sondages par son rival démocrate Joe Biden, a fait du retour du « droit et de l’ordre » un slogan de campagne, à trois mois et demi de l’élection présidentielle.

Son gouvernement rejette toute accusation d’abus de pouvoir : son patron de la Sécurité intérieure a justifié mardi l’envoi d’agents à Portland par la nécessité de protéger certains bâtiments fédéraux de la ville ciblés depuis des jours par les manifestants.  

« Si nous n’étions pas là, ils brûleraient le bâtiment », a affirmé Chad Wolf. Il a qualifié les manifestants de « violents anarchistes », et dénoncé l’inaction des responsables locaux face à eux.

Le sujet est porteur pour le camp républicain, dans un contexte de poussées de violences urbaines dans le sillage des manifestations contre les brutalités policières qui ont suivi la mort de George Floyd fin mai.  

« On ne va pas laisser tomber New York, Chicago, Philadelphie, Detroit et Baltimore », a déclaré Donald Trump lundi, taxant leurs élus démocrates de « gauchistes radicaux » laxistes.

C’est à Chicago, ville à la criminalité endémique où le président a jugé la situation « pire qu’en Afghanistan », que des agents fédéraux devraient arriver rapidement, selon la maire démocrate Lori Lightfoot.

Initialement vent debout contre cette éventualité, la maire a adopté un ton plus conciliant mardi soir, indiquant avoir obtenu des assurances selon lesquelles les agents fédéraux viendraient simplement renforcer les agences fédérales déjà présentes dans la ville.  

« Ce que je comprends, c’est que nous allons recevoir des ressources supplémentaires », a déclaré la maire. « Nous avons des informations selon lesquelles ce ne sera pas un déploiement dans le style de Portland ».

Un nouvel épisode de violence armée a eu lieu mardi à Chicago, où quatorze personnes ont été blessées dans une fusillade lors de funérailles, a annoncé la police.

Une voiture « a commencé à tirer sur les participants à des funérailles » qui ont à leur tour ouvert le feu sur le véhicule, a indiqué un responsable de la police.

Après une chute constante depuis le milieu des années 1990, New York, ville où Donald Trump a fait fortune, a aussi vu la criminalité repartir cette année – surtout depuis juin – avec des fusillades et meurtres en hausse de respectivement 60 % et 23 % depuis janvier.

La métropole dispose de la plus importante police municipale du pays, avec 36 000 agents. Mais beaucoup d’entre eux ont critiqué les réformes adoptées après les manifestations « Black Lives Matter » (La vie des Noirs compte) pour réduire les brutalités policières, et leur moral est au plus bas, selon certains responsables.

Pour le maire Bill de Blasio, la menace de Donald Trump d’envoyer des agents supplémentaires pourrait n’être que du « bluff ». Mais même s’il passait à l’acte, leur impact serait « minimal ».  

« Cela ne ferait qu’ajouter de la douleur et de la confusion, peut-être que c’est ce que (M. Trump) veut », a-t-il déclaré mardi.