(NEW YORK) Pour le cinquième soir de suite samedi, les États-Unis ont été le théâtre de manifestations organisées en réaction à la mort de George Floyd, alors que Donald Trump a attribué à des groupes d’extrême gauche la responsabilité des violences survenues la veille dans plusieurs villes américaines.

Adoptant un ton autoritaire, le président a promis que son administration mettrait fin de « façon nette » à cette « violence collective », qui a fait deux morts vendredi, l’un à Detroit, au Michigan, l’autre à Oakland, en Californie.

À Minneapolis, foyer original de la colère provoquée par la mort de l’Afro-Américain de 46 ans pendant son arrestation par la police lundi soir, la tension a baissé d’un cran, au moins momentanément, après l’annonce par le gouverneur de l’État, Tim Walz, de la mobilisation sans précédent de 13 000 soldats de la Garde nationale de l’État.

PHOTO KEREM YUCEL, AGENCE FRANCE-PRESSE

Des fleurs ont été déposées à l’endroit où George Floyd est mort. Samedi, des centaines de personnes sont venues s’y recueillir. 

Le gouverneur démocrate a cependant décliné l’offre du Pentagone de mettre à la disposition de Minneapolis des unités de la police militaire. Offre appuyée par Donald Trump, qui a critiqué la façon dont les responsables de l’État et de la ville du Midwest avaient géré les manifestations sur leur territoire au cours des quatre journées précédentes.

« Il faut qu’ils soient plus durs », a déclaré le président sur la pelouse de la Maison-Blanche avant de s’envoler pour la Floride, où il a assisté au lancement de la fusée de SpaceX.

Après le décollage réussi, le chef de la Maison-Blanche a mis sur le compte de l’extrême gauche les violences qui ont éclaté après la mort de George Floyd, pour laquelle l’ex-policier Derek Chauvin, qui s’est agenouillé pendant près de neuf minutes sur son cou, a été inculpé pour meurtre au troisième degré et homicide involontaire vendredi. Il a notamment mis en cause le mouvement Antifa, qui emploie souvent la violence pour lutter contre les groupes d’extrême droite.

Une mémoire « déshonorée »

« La mémoire de George Floyd est déshonorée par les émeutiers, les pilleurs et les anarchistes », a déclaré Donald Trump au cap Canaveral, site du lancement de la fusée de SpaceX. « La violence et le vandalisme sont orchestrés par Antifa et d’autres groupes radicaux d’extrême gauche qui terrorisent les innocents, détruisent les emplois, fragilisent les commerces et incendient des immeubles. »

Nous ne pouvons pas laisser un petit groupe de criminels et de vandales détruire nos villes et saccager nos communautés.

Donald Trump, président des États-Unis 

Des manifestations se sont déroulées dans plusieurs grandes villes américaines, dont New York, Los Angeles, Chicago, Philadelphie, Atlanta, Miami et Washington. Certaines d’entre elles ont donné lieu à des affrontements entre manifestants et policiers et à des actes de vandalisme, notamment à Chicago, à Los Angeles et à New York, où des véhicules de patrouille ont été incendiés et des commerces endommagés. Elles ont cependant attiré moins de participants que la veille.

PHOTO THOMAS URBAIN, AGENCE FRANCE-PRESSE

Un cocktail Molotov a été lancé à l’intérieur d’une fourgonnette qui était occupée par quatre policiers. « C’est un miracle qu’aucun policier n’ait été tué », a déclaré le chef de la police de New York, Dermot Shea. Sur la photo, le véhicule calciné. 

Comme l’ont fait ses homologues de Minneapolis et de Philadelphie, entre autres, le maire de Los Angeles a annoncé l’imposition d’un couvre-feu devant entrer en vigueur à 20 h samedi soir et prendre fin à 5 h ce dimanche matin.

À Minneapolis, un nombre impressionnant de policiers en tenue antiémeute ont commencé à disperser des centaines de manifestants à coups de bombes de gaz lacrymogène et de fumigènes environ 40 minutes après le début du couvre-feu.

Ces policiers de l’État du Minnesota étaient appuyés par des soldats de la Garde nationale.

  • New York
De violents incidents ont fait des blessés au sein des forces de l’ordre. Plus de 200 personnes ont été arrêtées.

    PHOTO WONG MAYE-E, ASSOCIATED PRESS

    New York
    De violents incidents ont fait des blessés au sein des forces de l’ordre. Plus de 200 personnes ont été arrêtées.

  • Houston
Gabrielle Thompson, nièce de George Floyd, s’est adressée à la foule avant de fondre en larmes. 

    PHOTO MARK FELIX, AGENCE FRANCE-PRESSE

    Houston
    Gabrielle Thompson, nièce de George Floyd, s’est adressée à la foule avant de fondre en larmes. 

  • Minneapolis

Touché par un projectile de caoutchouc, un manifestant peine à se relever. 

    PHOTO LEAH MILLIS, REUTERS

    Minneapolis

    Touché par un projectile de caoutchouc, un manifestant peine à se relever. 

  • Washington
Les protestataires se sont fait entendre près du Capitole. 

    PHOTO YURI GRIPAS, REUTERS

    Washington
    Les protestataires se sont fait entendre près du Capitole. 

  • Columbus
Des policiers ont aspergé des manifestants de gaz poivré.

    PHOTO KYLE ROBERTSON, ASSOCIATED PRESS

    Columbus
    Des policiers ont aspergé des manifestants de gaz poivré.

  • Philadelphie

Parmi la foule, on comptait des enfants. 

    PHOTO JOE LAMBERTI, ASSOCIATED PRESS

    Philadelphie

    Parmi la foule, on comptait des enfants. 

  • Atlanta
Des manifestants ont lancé des pièces pyrotechniques en direction des forces de l’ordre. 

    PHOTO SHANNON STAPLETON, REUTERS

    Atlanta
    Des manifestants ont lancé des pièces pyrotechniques en direction des forces de l’ordre. 

  • Chicago
Des protestataires ont incendié des voitures de police et pillé des commerces. 

    PHOTO ASHLEE REZIN GARCIA, ASSOCIATED PRESS

    Chicago
    Des protestataires ont incendié des voitures de police et pillé des commerces. 

  • Miami
L’escouade antiémeute a été dépêchée au centre-ville.

    PHOTO WILFREDO LEE, ASSOCIATED PRESS

    Miami
    L’escouade antiémeute a été dépêchée au centre-ville.

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Gauchistes ou suprémacistes ?

Contrairement à Donald Trump, les responsables du Minnesota n’ont pas seulement imputé aux groupes de l’extrême gauche la responsabilité des violences des derniers jours à Minneapolis.

Le gouverneur Tim Walz a estimé que 80 % des personnes arrêtées vendredi à Minneapolis et à Saint Paul, ville voisine, provenaient d’autres États que le sien. Le chef du département de la Sécurité publique du Minnesota, John Harrington, a précisé de son côté qu’environ 40 des personnes arrêtées appartenaient à des groupes suprémacistes blancs ou au crime organisé.

Les deux responsables ont également fait état d’informations indiquant que des groupes suprémacistes blancs et des criminels avaient utilisé les réseaux sociaux et le « dark web » pour organiser les violences qui ont contribué aux pillages et aux incendies criminels.

Les gens qui font cela ne sont pas des citoyens de Minneapolis. Ils viennent principalement de l’extérieur de la région pour attaquer tout ce que nous avons construit.

Jacob Frey, maire de Minneapolis

À Washington, avant que Donald Trump ne lui emboîte le pas, le procureur général des États-Unis, William Barr, a pointé le doigt dans une tout autre direction. Il a attribué les violences aux groupes d’extrême gauche qui « exploitent la situation pour accomplir leur propre dessein distinct et violent ».

« À plusieurs endroits, il apparaît que la violence est planifiée, organisée et dirigée par des groupes anarchistes d’extrême gauche, qui emploient des tactiques propres à l’Antifa », a déclaré William Barr lors d’une conférence de presse.

« Les chiens les plus féroces »

Donald Trump, lui, n’a rien fait pour calmer le jeu en début de journée.

Dans une série de tweets matinaux, il a utilisé des images évocatrices de violence en vantant la façon dont les agents des Services secrets avaient maîtrisé les manifestants qui s’étaient massés devant la Maison-Blanche vendredi soir.

« La foule était dense et très bien organisée, mais personne ne s’est approché des clôtures, a-t-il tweeté. Si quelqu’un l’avait fait, on l’aurait accueilli avec les chiens les plus féroces et les armes les plus menaçantes. Les gens auraient vraiment été blessés, pour ne pas dire plus. »

Un peu plus tard dans la matinée, le président s’est également réjoui en gazouillant à propos d’un rassemblement éventuel de ses partisans devant la Maison-Blanche samedi soir.

« Ce soir, d’après ce que je comprends, on organise une soirée MAGA à la Maison-Banche », a-t-il tweeté en faisant référence au slogan de sa première campagne présidentielle (Make America Great Again).

Avant le départ de Donald Trump pour la Floride, un journaliste lui a demandé si un rassemblement partisan était approprié en ce moment de grandes divisions raciales et politiques aux États-Unis.

« MAGA signifie “Rendre à l’Amérique sa grandeur”. Ces gens aiment notre pays », a-t-il répondu en parlant de ses partisans. « Au fait, ils aiment les Afro-Américains, ils aiment les Noirs », a-t-il ajouté.

Aux dernières nouvelles, la soirée MAGA à la Maison-Blanche n’a pas eu lieu.