(Washington) Les hôpitaux américains auront selon toute vraisemblance beaucoup de mal à faire face à l’afflux de malades engendré par l’épidémie de nouveau coronavirus, qui continue à se propager rapidement, selon une étude de chercheurs d’Harvard.

Une équipe de chercheurs du Harvard Global Health Institute a modélisé neuf hypothèses différentes en jouant sur la vitesse de transmission de la maladie et le nombre de cas. Dans toutes les hypothèses sauf deux, la vaste majorité des unités de soins intensifs du pays seront débordées.

Une situation similaire en Italie, le deuxième pays le plus touché après la Chine, a forcé le personnel soignant à devoir prendre des décisions difficiles sur qui soigner en premier, notamment à qui attribuer un respirateur, vital pour les personnes en détresse respiratoire.  

Le nombre total de personnes qui seront in fine infectées reste inconnu – la Chine dénombre plus de 80 000 cas, mais une nouvelle étude parue dans la revue Science suggère que le nombre réel pourrait être bien plus élevé compte tenu de la transmission possible entre des personnes avec peu ou pas de symptômes.

Quel que soit le nombre final de cas, la manière la plus efficace de sauver des vies est de ralentir la vitesse des nouvelles infections – ou « aplatir la courbe », selon l’expression utilisée par les experts.  C’est ce que démontre de nouveau l’étude des chercheurs d’Harvard.

Dans le meilleur des scénarios envisagés, 20 % de la population adulte est infectée, soit environ 50 millions de personnes, sur une période de 18 mois. Dans cette hypothèse, la plupart des hôpitaux du pays auraient assez d’unités de soins intensifs pour faire face à l’épidémie si elles libèrent 50 % des lits occupés par des patients non atteints de la COVID-19.

La pire des projections envisage que 60 % de la population adulte, soit 150 millions de personnes, soient infectées en l’espace de 6 mois seulement. Dans ce cas, même avec tous les lits libérés, la majorité des hôpitaux du pays seraient cinq fois en dessous du nombre requis.  

Cet écart serait très difficile à combler, même avec des mesures telles que la construction d’hôpitaux militaires.  

Gagner du temps

Pour Thomas Tsai, professeur associé à Harvard et membre de l’équipe ayant réalisé cette étude, il est de ce fait essentiel que les États-Unis continuent à renforcer les mesures visant à contenir l’épidémie.

« C’est important, car cela va donner aux hôpitaux le temps dont ils ont besoin pour se fournir en matériel », ou encore pour annuler les opérations non urgentes afin de libérer des lits, a expliqué à l’AFP mercredi M. Tsai, qui travaille comme chirurgien à Boston.

Il s’est déclaré « prudemment optimiste » compte tenu des mesures massives étant en train d’être mises en place, notamment les consignes de distanciation sociale dans de nombreux États ou, comme à San Francisco, l’ordre donné aux habitants de rester chez eux.

« Chaque individu doit prendre ses responsabilités, car tout le monde est possiblement un maillon de la chaîne de transmission », a-t-il rappelé.

Outre la réduction du nombre et de la vitesse des transmissions, ainsi que le renforcement de la capacité d’accueil des hôpitaux, M. Tsai a également insisté sur la nécessité absolue pour le personnel soignant d’avoir accès aux équipements de protection dont ils ont besoin.

Mercredi soir, les États-Unis comptaient plus de 7,700 cas confirmés et 118 morts, selon l’université Johns Hopkins.