(Washington) C’est une nouvelle campagne qui a commencé mercredi pour les démocrates américains : un duel de longue haleine entre Bernie Sanders et Joe Biden, relancé dans le rôle du grand favori par ses victoires spectaculaires du « super mardi » et le retrait du milliardaire Michael Bloomberg.

Malgré les montants record investis — plus d’un demi-milliard de dollars tirés de sa fortune personnelle —, M. Bloomberg a tiré les conclusions de ses résultats décevants à l’issue de la journée déterminante de la veille.

« Il y a trois mois, j’ai présenté ma candidature à la présidentielle pour battre Donald Trump. Aujourd’hui, je me retire de la course pour la même raison : battre Donald Trump », a annoncé l’ex-maire de New York, estimant que Joe Biden était désormais le mieux placé pour y parvenir lors de l’élection suprême du 3 novembre.

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Michael Bloomberg

Son désistement achève de clarifier le paysage au sein du camp modéré, après les retraits du jeune Pete Buttigieg, révélation de ces primaires démocrates, et de la sénatrice du Minnesota Amy Klobuchar, qui avaient apporté dès lundi leur soutien à l’ancien vice-président Biden.

La sénatrice du Massachusetts Elizabeth Warren qui n’a obtenu qu’une insatisfaisante troisième place dans son propre État, pourrait être la prochaine à raccrocher les gants. Des proches de la candidate sont en discussion avec l’équipe de Bernie Sanders afin d’évoquer son potentiel retrait et un soutien au candidat « socialiste », selon les médias américains.

Un nouveau face-à-face se profile donc entre deux quasi-octogénaires aux positions divergentes, le modéré Biden, 77 ans, et le socialiste Sanders, 78 ans.

« Incroyable come-back »

L’ex-bras droit de Barack Obama a repris sur Twitter son argument favori : « Nous devons bouter Trump hors de la Maison-Blanche ». « Cette nation pourra surmonter quatre années de Donald Trump. Mais si cet homme est réélu, nous ne reconnaîtrons plus ce pays dans quelques années », a-t-il prévenu, revigoré après avoir remporté dix des 14 États en jeu mardi.

« C’est un sacré come-back pour Joe Bien, un incroyable come-back quand vous y réfléchissez », a salué, fair-play, le milliardaire républicain.

De fait, cet homme politique chevronné revient de loin.

Longtemps ultra-favori, il avait encaissé de piteux résultats lors des premiers scrutins en février, handicapé par une campagne terne et des dons parcimonieux.

Ce n’est qu’avec le vote de samedi en Caroline du Sud qu’il a pu faire mentir les pronostics le vouant à une mort politique quasi-certaine : grâce à une très large victoire dans cet État du Sud, il a enclenché une dynamique nouvelle, engrangeant ensuite soutien sur soutien.

Mardi, il a créé la surprise en décrochant la victoire au Texas et en écrasant la concurrence en Virginie et en Caroline du Nord – trois gros pourvoyeurs de délégués pour la convention démocrate qui décernera, en juillet, l’investiture dans la course à la Maison-Blanche.

Il a aussi gagné dans l’Alabama, l’Oklahoma, le Tennessee, l’Arkansas, le Minnesota, le Massachusetts et le Maine. Il réalise ainsi un grand chelem dans les États du sud du pays et confirme être le champion des Afro-Américains, un électorat-clé côté démocrate.

« Vieilles recettes »

En face, Bernie Sanders, jusque-là considéré comme le favori depuis son démarrage en fanfare dans ces primaires, ne s’avoue pas vaincu. Il semblait en passe de remporter le plus gros État du « super mardi », la Californie, avec une avance de près de neuf points après dépouillement de 87 % des bureaux de vote.

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Bernie Sanders

Il a aussi gagné dans son petit État du Vermont, ainsi qu’au Colorado et dans l’Utah.

Signe d’une campagne qui s’annonce toujours plus âpre, « Bernie » est reparti à l’offensive en accusant Joe Biden d’avoir défendu des coupes dans les dépenses sociales « depuis 40 ans » et d’être soutenu par les grandes entreprises et les milliardaires.

« On ne peut pas vaincre Trump avec les vieilles recettes », a plaidé le sénateur du Vermont, qui prône une « révolution ».

« J’aime bien Joe, Joe est un type bien et je ne veux pas que cette campagne dégénère », a-t-il toutefois ajouté, appelant à un débat à la loyale, projet contre projet.

Ses idées très à gauche pour les États-Unis, comme une assurance-maladie publique universelle, se sont peu à peu imposées dans l’électorat démocrate, mais inquiètent toujours une partie de l’establishment du parti.

Comme en 2016 entre Bernie Sanders et Hillary Clinton, la chasse aux délégués pourrait donc durer.

Malgré son avance, Joe Biden reste loin des 1991 délégués nécessaires pour s’assurer l’investiture démocrate en juillet : le chemin est encore long. Il passera dès mardi prochain par six nouveaux États puis, le 17 mars, par la Floride, l’Arizona, l’Ohio et l’Illinois.