(Washington) Le Soudan devrait être formellement retiré ces jours-ci de la liste noire américaine des États soutenant le terrorisme, mais attend toujours d’obtenir l’immunité légale dans des affaires liées à des attentats passés, qui nécessite une loi au cœur d’intenses tractations au Congrès américain.

Le président Donald Trump a annoncé le 19 octobre le retrait de Khartoum de cette liste synonyme de sanctions et d’obstacles aux investissements internationaux.

Cette décision s’inscrit dans un accord qui prévoit le versement par le Soudan de 335 millions de dollars de dédommagements aux familles des victimes des attentats perpétrés en 1998 par Al-Qaïda contre les ambassades des États-Unis au Kenya et en Tanzanie, qui avaient fait plus de 200 morts — au motif que les autorités soudanaises de l’époque avaient hébergé le chef de la nébuleuse djihadiste Oussama ben Laden.

Le 23 octobre, les autorités soudanaises, tout en niant tout « chantage », ont accepté, sous la pression américaine, de normaliser leurs relations avec Israël. Et ce n’est qu’après cette annonce que Donald Trump a effectivement notifié au Congrès américain, le 26 octobre, le retrait du Soudan de la liste noire.

La loi prévoit, à compter de cette date, un délai de 45 jours au cours duquel le Congrès peut bloquer la décision présidentielle. Or ce délai expirait cette semaine, et aucun blocage n’a été signalé.

Le retrait formel ne nécessite donc plus que « la publication au Journal officiel d’une note signée par le secrétaire d’État » Mike Pompeo, a expliqué à l’AFP un porte-parole de la diplomatie américaine, sans avancer de date.

« Les uns contre les autres »

Il s’agit d’une des conditions pour que soient débloqués les 335 millions de dollars, qui sont pour l’instant sur un compte-séquestre.

Mais il en existe une autre, qui n’est pas encore remplie.

Le Congrès doit adopter une loi proclamant la « paix légale » avec Khartoum, pour lui accorder l’immunité légale en tant qu’État dans ces affaires de terrorisme.

Or là-dessus, les négociations entre l’administration Trump et le Congrès coincent.

Dans un communiqué publié cette semaine, une association de victimes du 11 septembre 2001 demande aux parlementaires de « rejeter la proposition législative actuelle du département d’État », qui les prive « de leur droit de poursuivre le Soudan pour son rôle en tant que soutien d’Al-Qaïda » dans le passé.

En première ligne contre le texte gouvernemental figurent les sénateurs démocrates Chuck Schumer et Bob Menendez, qui représentent respectivement l’État de New York et celui voisin du New Jersey, dont sont originaires de nombreuses victimes du 11-Septembre.  

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Le sénateur démocrate du New Jersey, Bob Menendez

Ils ont présenté cette semaine une proposition de loi censée, selon eux, « surmonter les graves problèmes liés à l’accord entre le département d’État et le Soudan, qui monte de manière tragique les groupes de victimes du terrorisme les uns contre les autres ».

Ils se sont dits prêts à un vote « avant la fin de l’année » sur leur texte.

« Nous poursuivons nos discussions avec le sénateur Menendez et d’autres pour trouver une solution », a simplement répondu un porte-parole de la diplomatie américaine, interrogé par l’AFP, exhortant une nouvelle fois le Congrès à passer à l’acte dans ce dossier.

Le Soudan a récemment exprimé son impatience, déplorant que certains « engagements politiques et économiques » n’aient « pas été respectés » par Washington. Il a prévenu que ce blocage pourrait « retarder l’application de l’accord » de normalisation des relations avec Israël.