(Washington) Ils sont accusés d’avoir conspiré pendant des mois pour enlever la gouverneure démocrate du Michigan Gretchen Whitmer, une farouche opposante à Donald Trump, et attaquer des institutions. Treize hommes liés à un groupe américain d’extrême droite ont été inculpés après que le FBI a déjoué leur complot grâce à des informateurs et des agents infiltrés.

Six des conspirateurs, considérés comme des « extrémistes violents » par le procureur du district Ouest du Michigan, Andrew Birge, avaient prévu de kidnapper Mme Whitmer avant l’élection présidentielle du 3 novembre puis de la juger pour « trahison », selon l’acte d’accusation rendu public jeudi.

Sept autres hommes associés au groupuscule local « Wolverine Watchmen » ont également été arrêtés et inculpés pour avoir planifié « une opération en vue d’attaquer le bâtiment du Capitole et kidnapper des responsables du gouvernement, dont la gouverneure », a ajouté la ministre de la Justice du Michigan, Dana Nessel.

Ces miliciens ont également « proféré des menaces de violences pour provoquer une guerre civile », a expliqué Mme Nessel.

La gouverneure s’est dite effarée par la nouvelle.

« Quand j’ai prêté serment il y a 22 mois, je savais que ce travail pouvait être difficile. Mais pour être honnête, je n’avais jamais imaginé une chose pareille », a réagi Gretchen Whitmer lors d’une conférence de presse.

Et elle a accusé le président Donald Trump de « légitimer » les actions des « terroristes de l’intérieur » en refusant notamment de condamner les partisans du suprémacisme blanc la semaine dernière, lors de son débat face au candidat démocrate Joe Biden.

« Libérer le Michigan »

L’enquête a débuté au début de l’année quand la police fédérale « a appris sur les réseaux sociaux qu’un groupe d’individus parlait de renverser par la violence certaines composantes du gouvernement et des forces de l’ordre », selon l’acte d’accusation.

Les six accusés, qui ont été arrêtés, reprochaient notamment à la gouverneure d’être un « tyran » et d’exercer « un pouvoir sans contrôle ».  

Car Mme Whitmer avait décrété à la mi-mars des restrictions parmi les plus sévères du pays pour freiner l’épidémie de coronavirus dans son État du nord des États-Unis, à l’époque l’un des plus touchés par la COVID-19.

Elle est alors devenue la cible régulière d’attaques de M. Trump, qui avait dans un tweet appelé à « libérer le Michigan ».  

Des milliers d’opposants au confinement, certains lourdement armés, ont manifesté à plusieurs reprises pour la réouverture de l’économie locale. Fin avril, des manifestants armés étaient même entrés dans le Capitole, le siège du gouvernement du Michigan, pour exiger l’assouplissement des mesures sanitaires.

Pour mener à bien leur projet, les six hommes ont contacté les « Wolverine Watchmen », avec qui ils se sont entraînés pour l’opération.

Plusieurs scénarios d’enlèvement avaient été envisagés : à Lansing, la capitale de l’État, au domicile de Mme Whitmer et dans sa maison de vacances dans le nord du Michigan. Les conspirateurs ont surveillé les différentes résidences de la gouverneure et testé des engins explosifs artisanaux, a expliqué Andrew Birge.

Ils ont également tenté d’acheter d’autres explosifs, selon un agent du FBI sous couverture cité dans l’acte d’accusation.  

En juillet, l’un d’eux a dit au téléphone vouloir « tout renverser ».

« Je veux juste que le monde s’embrase, mec. Je ne rigole même pas […]. Je m’en fous, j’en ai tellement marre. C’est ça qu’il faut qu’on fasse pour récupérer (le monde, NDLR), tout doit être annihilé. On va tout renverser, mec. C’est (ce que font) les grands conquérants, mec », affirme-t-il, des propos cités par l’accusation.

« Attiser la méfiance »

Les six hommes sont poursuivis au niveau fédéral et encourent des peines pouvant aller jusqu’à la perpétuité.

Les sept autres sont poursuivis pour violation de la loi antiterroriste du Michigan, notamment pour « soutien matériel en vue d’un acte terroriste » et « appartenance à un gang », des crimes punis chacun de 20 ans de prison, a précisé Dana Nessel.

Ces arrestations interviennent dans un climat d’extrême tension entre le président républicain et ses opposants démocrates à moins d’un mois de l’élection, alors que la pandémie de coronavirus a plongé les États-Unis dans une grave crise économique.

« Nous ne sommes pas des ennemis, ce virus est notre ennemi », a plaidé jeudi Mme Whitmer.

Mais alors que la pandémie devait être l’occasion d’une « unité nationale », Donald Trump « a passé les sept derniers mois à (..) attiser la méfiance et conforter ceux qui propagent la peur et la haine », a-t-elle lancé.

« Ce qu’il dit compte », a renchéri Joe Biden, estimant qu’en appelant à « libérer le Michigan », M. Trump avait encouragé les milices d’extrême droite.