(New York) Pendant que Donald Trump poursuivait sa convalescence à la Maison-Blanche, les candidats à la vice-présidence des deux grands partis américains se sont livré un débat presque normal mercredi soir à Salt Lake City.

Ils ont conservé un ton civilisé, évité de répondre à plusieurs des questions et livré leurs lignes d’attaque préférées.

Mais la maladie qui a ralenti le président et plombé sa campagne a occupé une place centrale lors d’un duel télévisé mettant en scène la première colistière noire d’un grand parti américain. Kamala Harris a utilisé ce sujet pour décocher ses attaques les plus dures à l’endroit de Donald Trump et de Mike Pence. « Le peuple américain a été témoin de ce qui est le plus grand échec de toute administration dans l’histoire de ce pays », a-t-elle déclaré au début d’un débat de 90 minutes, après avoir évoqué les coûts humains, économiques et sociaux de la COVID-19.

« N’oublions pas ceci : le 28 janvier, le vice-président et le président ont été informés de la nature de cette pandémie », a-t-elle ajouté en faisant allusion à l’une des révélations du dernier livre du journaliste Bob Woodward.

Ils savaient et ils l’ont camouflé. Le président a dit que c’était un canular. Ils ont minimisé la gravité de la situation.

Kamala Harris

Placé sur la défensive sur un sujet toxique, Mike Pence a défendu tant bien que mal la gestion de la crise sanitaire par le président, rappelant notamment sa décision d’interdire les vols en provenance de la Chine. « Le peuple américain sait que dès le premier jour, le président Donald Trump a fait passer la santé de l’Amérique avant tout », a-t-il déclaré.

« Le président Donald Trump a fait ce qu’aucun autre président américain n’avait jamais fait. C’est-à-dire qu’il a suspendu tout voyage en provenance de Chine, la deuxième économie du monde. Maintenant, le sénateur Joe Biden s’est opposé à cette décision. Il l’a qualifiée de xénophobe », a-t-il ajouté.

Le vice-président a décoché une attaque personnelle à l’endroit du candidat démocrate en lui reprochant de s’inspirer du plan de l’administration Trump pour combattre l’épidémie de coronavirus. « Quand je regarde leur plan, il ressemble au nôtre, il ressemble aux plagiats qui sont familiers à Biden », a-t-il déclaré, faisant allusion à un scandale qui avait contribué à la décision de l’ancien sénateur du Delaware de mettre fin à sa première campagne présidentielle.

« Je suis en train de parler »

Si le seul et unique débat vice-présidentiel n’a pas donné lieu à la foire d’empoigne du premier débat présidentiel, il ne s’est pas, en revanche, déroulé sans problèmes agaçants. Mike Pence a souvent prolongé ses réponses au-delà du temps qui lui avait été accordé. Et, la plupart du temps, la modératrice de l’affrontement, la journaliste du USA Today, Susan Page, n’a pas réussi à lui couper le sifflet.

« Merci, monsieur le vice-président », a-t-elle répété à plusieurs reprises sans parvenir à faire taire le candidat, qui continuait ses réponses de sa voix doucereuse d’ancien animateur de radio. À quelques reprises, le vice-président a également coupé la parole à sa rivale. « Monsieur le vice-président, je suis en train de parler », a déclaré sa rivale à plus d’une reprise sans hausser le ton.

Kamala Harris a également parfois semblé trouver le ton de son rival trop condescendant, notamment lorsque ce dernier critiquait son bilan comme procureure en Californie. « Je ne me ferai pas donner de leçon sur la façon d’appliquer la loi », a-t-elle notamment déclaré.

Les deux candidats ont évité à plusieurs reprises de répondre directement aux questions qui leur avaient été adressées.

Kamala Harris a notamment profité d’une question sur sa succession éventuelle à Joe Biden en cas de décès pour parler de ses origines et de sa famille.

De son côté, Mike Pence a parlé de terrorisme en réponse à une question sur l’avenir du droit à l’avortement dans son État, l’Indiana, après une décision éventuelle de la Cour suprême invalidant l’arrêt Roe c. Wade.

Attaques trompeuses

L’économie, la santé, l’environnement, le commerce international et la justice sociale ont également fait partie des thèmes abordés au cours du débat. Sur tous ces sujets, Mike Pence a tenté de dépeindre Kamala Harris comme une politicienne aussi marquée à gauche que Bernie Sanders et Alexandria Ocasio-Cortez.

Ses attaques étaient souvent trompeuses ou mensongères, tout comme ses réponses. « Le climat change et nous suivons la science », a-t-il notamment déclaré quand la modératrice lui a demandé s’il croyait que les changements climatiques représentaient une crise existentielle.

Kamala Harris a également mis à profit une question sur la transparence nécessaire des candidats en matière de santé pour parler des impôts et des dettes de Donald Trump. « Le peuple américain a le droit de savoir ce qui influence les décisions du président, et s’il prend ces décisions dans l’intérêt supérieur du peuple américain, de vous, ou dans son propre intérêt », a-t-elle déclaré.

Mais le sujet est souvent revenu sur la COVID-19. Mike Pence a notamment dû défendre la tenue de la cérémonie à la Maison-Blanche pour honorer la juge Amy Coney Barrett, où les règles sur le port du masque et la distanciation n’ont pas été respectées. Plusieurs participants, dont Donald Trump, ont été déclarés positifs à la COVID-19 par la suite.

« Cet événement dans la Roseraie, il y a eu beaucoup de spéculations à ce sujet », a déclaré Mike Pence.

Ma femme et moi étions honorés d’y être. De nombreuses personnes y ont été testées pour le coronavirus, et c’était un événement en plein air que tous nos scientifiques conseillent régulièrement et systématiquement.

Mike Pence

Des vitres de plexiglas séparaient les colistiers pendant le débat. Installées comme mesure de protection supplémentaire pour empêcher la transmission potentielle du coronavirus, elles avaient fait l’objet d’une dispute entre les deux camps avant d’être acceptées par l’entourage de Mike Pence.

Les deux candidats s’étaient par ailleurs entendus pour étendre la distance séparant les bureaux derrière lesquels ils étaient assis, distance qui est passée de deux à quatre mètres.

Une mouche s’est posée sur la tête blanche de Mike Pence au cours du débat. À en juger par les réseaux sociaux, elle a volé la vedette.