(OSHKOSH, Wisconsin) Non, ce n’était pas une scène tirée du roman Le complot contre l’Amérique de Philip Roth, où le président fictif, Charles Lindbergh, va à la rencontre de ses partisans à bord de son avion, le Spirit of St. Louis, d’un petit aéroport rural à l’autre.

C’était un vrai déplacement du président actuel, Donald Trump, à bord de l’avion présidentiel, Air Force One, qui a atterri lundi après-midi sur l’unique piste de l’aéroport régional Wittman, à Oshkosh, au centre du Wisconsin, deuxième arrêt de la journée après celui de Mankato, au Minnesota.

Et Kevin Anderson, assis sur une chaise pliante aux abords de l’aéroport, a applaudi l’arrivée de son héros politique avec un enthousiasme semblable à celui que suscite le protagoniste du livre de Roth chez ses partisans.

« Je voulais voir le président et Air Force One. Nous ne vivons qu’à 64 kilomètres d’ici », a déclaré l’homme de 56 ans, accompagné de sa femme, Caroline, et entouré de dizaines de partisans de Donald Trump, dont les casquettes, les t-shirts, les drapeaux et les slogans témoignaient de leur dévouement au 45président.

Kevin Anderson n’a pas eu la chance de voir le président en personne. Il a dû se contenter de suivre sur son téléphone portable le discours de près d’une heure que Donald Trump a prononcé sur le tarmac, n’ayant pu obtenir un billet pour y assister en personne. Autour de lui, plusieurs partisans du chef de la Maison-Blanche l’ont imité. Cela leur a permis d’ajouter leurs voix à celles des spectateurs présents sur la piste qui ont scandé « Four more years ! » (Quatre années de plus !) pendant l’allocution du président.

PHOTO MIKE ROEMER, ASSOCIATED PRESS

Donald Trump a livré son discours sur un podium installé directement sur le tarmac, tout près d'Air Force One.

Donald Trump a enchaîné du tac au tac : « Et puis, après cela, nous y irons pour quatre années de plus. »

Le président fascisant du roman de Philip Roth, Charles Lindbergh, n’aurait probablement pas réagi autrement.

Bataille du Midwest

Ce n’est pas par hasard que Donald Trump a décidé de se rendre au Minnesota et au Wisconsin au cours de la journée de lundi. C’était sa façon bien à lui de détourner une partie de l’attention des médias à l’occasion de l’ouverture de la convention du Parti démocrate, qui doit officialiser les candidatures de Joe Biden et de Kamala Harris.

Il n’a d’ailleurs pas manqué de se moquer du déroulement de cette grand-messe politique qui se déroulera de façon virtuelle en raison de la menace du coronavirus.

« Personne ne veut entendre des discours enregistrés », a-t-il déclaré en faisant allusion à l’allocution attendue de Michelle Obama, qui ne devait pas être en direct. « Est-ce que le discours de Biden sera également enregistré ? Si c’est le cas, j’enregistrerai le mien », a-t-il ajouté, suscitant des huées parmi une foule de spectateurs où le port du masque était une rareté.

  • En campagne, Donald Trump a confirmé qu’il accepterait formellement la nomination du Parti républicain la semaine prochaine, « en direct, de la Maison-Blanche ».

    PHOTO TOM BRENNER, REUTERS

    En campagne, Donald Trump a confirmé qu’il accepterait formellement la nomination du Parti républicain la semaine prochaine, « en direct, de la Maison-Blanche ».

  • « Personne ne sera en sécurité dans une Amérique dirigée par Biden », a-t-il lancé à Oshkosh, à moins de 130 kilomètres au nord de Milwaukee, où se tient (virtuellement) la convention démocrate.

    PHOTO TOM BRENNER, REUTERS

    « Personne ne sera en sécurité dans une Amérique dirigée par Biden », a-t-il lancé à Oshkosh, à moins de 130 kilomètres au nord de Milwaukee, où se tient (virtuellement) la convention démocrate.

  • « Le 3 novembre sera l’élection la plus importante de l’histoire de notre pays », a estimé Donald Trump devant ses partisans.

    PHOTO DOUG MILLS, THE NEW YORK TIMES

    « Le 3 novembre sera l’élection la plus importante de l’histoire de notre pays », a estimé Donald Trump devant ses partisans.

  • Trump a affirmé que Joe Biden voulait « abolir » l’« American way of life » et transformer les États-Unis en « un pays socialiste ennuyeux ».

    PHOTO DOUG MILLS, THE NEW YORK TIMES

    Trump a affirmé que Joe Biden voulait « abolir » l’« American way of life » et transformer les États-Unis en « un pays socialiste ennuyeux ».

  • Donald Trump avait créé la surprise en remportant le Wisconsin en 2016 avec une très courte avance, lui ouvrant les portes — avec d’autres victoires sur le fil dans des États du Midwest — de la Maison-Blanche.

    PHOTO KAMIL KRZACZYNSKI, AGENCE FRANCE-PRESSE

    Donald Trump avait créé la surprise en remportant le Wisconsin en 2016 avec une très courte avance, lui ouvrant les portes — avec d’autres victoires sur le fil dans des États du Midwest — de la Maison-Blanche.

  • Un agent du Secret Service veille à la sécurité du président Trump.

    PHOTO DOUG MILLS, THE NEW YORK TIMES

    Un agent du Secret Service veille à la sécurité du président Trump.

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Opposants

Tout autour de l’aéroport Wittman, il était d’ailleurs facile de repérer ceux qui étaient présents pour exprimer leur désapprobation envers Donald Trump : ils étaient masqués. Et certains de leurs masques étaient plus explicites que d’autres, comme celui de Lucas Mullenbach, sur lequel on pouvait lire le slogan Black Lives Matter.

Le jeune garçon de 16 ans était accompagné d’une amie de 18 ans, Trenton Davis, qui portait le drapeau arc-en-ciel de la fierté gaie comme une cape.

« Je ne me sens pas en sécurité ici, a-t-elle dit. Personne ne porte le masque. »

Et personne chez les partisans de Donald Trump ne semblait prêt à lui reconnaître le moindre tort ou le moindre défaut, sauf peut-être Kirsten Spelman, qui enseigne les mathématiques dans une école secondaire de Green Bay.

« Je n’aime pas quand le président insulte les gens », a dit l’éducatrice de 54 ans, une des rares à porter un masque (aux couleurs des Packers) parmi les partisans de Donald Trump.

Son amie, Amy Meltesen, administratrice collégiale à la retraite, a fait savoir qu’elle était prête à donner son nom à un journaliste à condition qu’il ne lui prête pas les mêmes opinions.

« Je n’ai aucun problème avec la façon dont le président s’exprime », a-t-elle déclaré.

Plus d’un partisan du président a minimisé l’ampleur de la pandémie de coronavirus.

Les démocrates sont toujours à la recherche d’un truc pour nuire à Donald Trump. Ils ont d’abord essayé de le couler avec l’affaire russe, puis ils ont sorti l’affaire ukrainienne et, maintenant, c’est le virus de Chine. Ils vont de nouveau échouer.

Rick Wright, chocolatier d’Oshkosh

Un peu plus d’une heure après avoir atterri à l’aéroport Wittman, Donald Trump et Air Force One se sont envolés dans le ciel bleu moutonné de blanc du Wisconsin sous les applaudissements des partisans.

Le héros venu du ciel ne les a pas entendus, mais ses partisans scandaient encore : « Four more years ! Four more years ! »