(Washington) Le patron de la poste américaine, un proche de Donald Trump, a suspendu des réformes accusées par les démocrates de ralentir volontairement la distribution et la collecte du courrier et ainsi d’entraver le vote par correspondance de l’élection présidentielle.

« Je suspends ces initiatives jusqu’à la fin des élections », a annoncé mardi dans un communiqué Louis DeJoy, qui dirige depuis le printemps l’United States Postal Service (USPS).

Il a expliqué que des changements « antérieurs à (son) arrivée » avaient « soulevé des inquiétudes alors que le pays se prépare à organiser des élections au milieu d’une pandémie dévastatrice ».

La poste américaine est déficitaire depuis 2008 et M. DeJoy a, depuis son arrivée, mené des réformes tambour battant.

Cela a notamment eu pour effet de ralentir la distribution du courrier, y compris pour l’élection présidentielle du 3 novembre, pour laquelle le vote par correspondance doit pourtant être largement utilisé afin de minimiser les déplacements en personne et donc les risques de contamination à la COVID-19.

« La poste est prête aujourd’hui à gérer le courrier électoral qu’elle recevra cet automne, peu importe son volume », a assuré Louis DeJoy.

« Nous acheminerons le courrier électoral dans les délais impartis […]. Les Américains doivent savoir que c’est notre priorité jusqu’au jour de l’élection », a-t-il promis.

La main de Trump

Cette déclaration intervient après l’avertissement fin juillet de l’USPS auprès des autorités locales qu’elle ne serait pas en mesure d’acheminer l’ensemble des bulletins de vote.

Cela avait mis le feu aux poudres, les électeurs redoutant que leur bulletin arrive en retard et ne soit pas pris en compte.

Surtout, l’opposition a vu dans le calendrier de ces réformes la main de Donald Trump. Candidat à sa réélection, il clame depuis des mois que le vote par correspondance, utilisé de longue date aux États-Unis, risque de conduire à la « plus grande fraude électorale de l’histoire ».

Ses opposants pensent que le président est surtout convaincu que le vote par courrier pourrait être favorable à son adversaire Joe Biden, en réduisant le taux d’abstention traditionnellement observé chez des votants issus des minorités et des classes populaires, censés pencher du côté démocrate.

Louis DeJoy a assuré que les horaires d’ouverture des bureaux de poste seraient maintenus. Par ailleurs, les boîtes à lettres qui avaient commencé à être supprimées des rues resteront en place, de même que des machines de tri dans les bureaux de poste.

Quant aux heures supplémentaires supprimées, à l’origine des retards, elles pourront de nouveau être effectuées « si nécessaire ».

Ces réformes sont censées redresser la trajectoire financière de ce service public, lourdement déficitaire depuis 2008.

Des réformes après l’élection

Toutefois, Louis DeJoy estime que « des réformes importantes sont essentielles », et seront menées « après les élections ».

Il a souligné être arrivé à la tête de ce service public « pour apporter des changements afin d’(en) assurer le succès et la pérennité ».

« C’est bien qu’ils reconnaissent les problèmes qu’ils ont causés, mais nous voulons l’annulation DÉFINITIVE de TOUTES les politiques néfastes de DeJoy », a réagi mardi dans un tweet le chef de l’opposition démocrate au Sénat Chuck Schumer.

La Maison-Blanche et les élus démocrates du Congrès devraient également inclure une enveloppe pour le service public postal, au plan d’aide économique qu’ils négocient depuis plusieurs semaines, sans parvenir à se mettre d’accord.

L’USPS devrait bénéficier d’une aide de 10 milliards de dollars, a déclaré mardi matin le secrétaire au Trésor, Steven Mnuchin, sur la chaîne CNBC. Un prêt du même montant lui avait été accordé en juillet.

Steven Mnuchin a toutefois jugé cette aide « pas complètement nécessaire », l’USPS ayant « beaucoup de trésoreries, environ 15 milliards de dollars ».

La cheffe des démocrates à la Chambre des représentants Nancy Pelosi a appelé les élus à écourter leur pause aoûtienne pour revenir voter une aide d’urgence à l’USPS.

Et Louis DeJoy doit être auditionné vendredi par une commission du Sénat et lundi à la Chambre.