(Washington) La guerre est déclarée entre Pete Buttigieg et ses rivaux démocrates, qui se sentent menacés dans la course à la Maison-Blanche par l’ascension du jeune candidat à quelques semaines du lancement de la primaire aux États-Unis.

En quelques mois, Pete Buttigieg a consolidé son statut de prétendant sérieux à l’investiture démocrate à seulement 37 ans. «C’est actuellement la bataille pour l’Iowa et le New Hampshire, et les candidats se positionnent», a expliqué sur NBC le gouverneur de Californie Gavin Newsom, interrogé après le dernier le débat de l’année, jeudi à Los Angeles.  

Selon lui, M. Buttigieg «est le mieux placé et, par conséquence, il est au centre de la tempête» car ces deux premiers scrutins, les 3 et 11 février, donneront le ton de la primaire démocrate.

Lors de ce sixième débat, le jeune maire de l’Indiana a montré un visage combatif en répondant aux attaques sur ses riches donateurs et sur son manque d’expérience.

La première charge est venue d’Elizabeth Warren, qui représente l’aile gauche du parti et avec qui les tensions ne cessent de monter depuis plusieurs semaines.

«Des milliardaires dans des caves à vin ne devraient pas choisir le prochain président», a-t-elle fustigé jeudi, en référence à une récente collecte de fonds de M. Buttigieg dans une cave viticole de Californie.  

Des sept candidats présents, «je suis le seul à être ni millionnaire, ni milliardaire», a rétorqué Pete Buttigieg, en référence à la fortune de Mme Warren dont le revenu est selon lui «cent fois supérieur» au sien.  

Manifestement bien préparé à l’offensive, il a reproché à la sénatrice de 70 ans de «décerner des tests de pureté» qu’elle est elle-même «incapable d’obtenir».  

L’élue du Massachusetts, qui refuse les contributions des grandes entreprises, n’avait pas été aussi regardante dans le passé sur ses contributeurs, a-t-il continué. «Cela vous a-t-il corrompu, Madame la sénatrice? Bien sûr que non».

Une animosité compréhensible, pour Kenneth Baer. «Il prend une partie de l’électorat d’Elizabeth Warren», dit le consultant démocrate, notamment les «blancs diplômés».

Sang-froid et répondant

La sénatrice du Minnesota Amy Klobuchar est revenue sur le manque d’envergure nationale de M. Buttigieg, maire de South Bend, une ville de 100 000 habitants. Lors du précédent débat, il s’en était pris aux vétérans de la politique qui incarnaient «l’establishment à Washington» méprisé par l’électorat populaire.

«Je n’ai pas dénigré votre expérience comme élu local, je l’ai été moi-même», a lancé la candidate, qui comme lui fait partie du courant modéré.

Elle a enfoncé le clou en rappelant qu’il avait «perdu de 20 points» lors de la seule élection au niveau de l’Indiana à laquelle il avait participé, en 2010.

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Les candidats sur scène lors du débat démocrate jeudi soir à Los Angeles : Pete Buttigieg, Elizabeth Warren, Joe Biden, Bernie Sanders et Amy Klobuchar.

Loin de se laisser démonter, «Mayor Pete» a rappelé son passé militaire en Afghanistan, et sa capacité à rassembler au delà des partis pour être largement réélu à South Bend, après avoir révélé son homosexualité dans un État très conservateur.

«Il s’en est bien tiré. Il a gardé son sang-froid, ne s’est pas laissé déstabiliser et a eu du répondant», analyse Terry Madonna, du Centre de politique et d’administration publique de l’université Franklin & Marshall.

Amy Klobuchar, 59 ans, est apparue comme la grande gagnante de cette soirée, ses réparties fulgurantes et son ton affuté compensant un programme qui reste flou. Mais elle est à la traîne dans les sondages, son électorat blanc, rural et modéré étant attiré par la jeunesse de M. Buttigieg.

Pour Kenneth Baer, Mme Klobuchar doit aller au-delà du message «"Je suis du Midwest, j’ai gagné plusieurs fois au niveau national et c’est pour cela que vous devriez me choisir”. Ce n’est pas un argument pour être présidente des États-Unis».

Terry Madonna souligne l’absence «d’un programme auquel elle peut se référer sur des points spécifiques» alors qu’une contre-performance dans l’Iowa pourrait signer la fin de sa campagne.

L’universitaire tempère pourtant la portée de la soirée électorale car «ces débats produisent un mouvement éphémère, pas une énergie qui dure». Mme Klobuchar l’a bien compris, elle a débuté vendredi une tournée de trois jours dans l’Iowa pour capitaliser sur son succès.