(New York) Donald Trump a continué mercredi à donner libre cours à sa colère, au lendemain du lancement par les démocrates d’une procédure de destitution le visant, estimant être le président le plus « maltraité » dans l’histoire des États-Unis.

« Il n’y a eu aucun président dans l’histoire de notre pays qui a été traité si mal que moi. Les démocrates sont emplis de haine et de peur », a accusé de bon matin, sur Twitter, le dirigeant républicain, depuis New York où il se trouve rendu pour l’Assemblée générale de l’ONU.  

« Il ne faut pas que cela puisse arriver à un autre président. Chasse aux sorcières ! », a lancé l’ex-magnat de l’immobilier, reprenant son expression privilégiée pour critiquer l’enquête du procureur spécial Robert Mueller sur l’ingérence russe dans la présidentielle de 2016.  

Les démocrates ont lancé mardi à Washington la première étape de sa mise en accusation, le soupçonnant d’avoir demandé au président ukrainien d’enquêter sur son potentiel rival démocrate à la présidentielle 2020 Joe Biden, une procédure rare et explosive qui a toutefois peu de chances d’aboutir à une destitution.

« Aujourd’hui, j’annonce que la Chambre des représentants ouvre une enquête officielle en vue d’une procédure de destitution » de M. Trump, a annoncé la présidente démocrate de la chambre basse, Nancy Pelosi.

« Les actes du président jusqu’à ce jour ont violé la Constitution », a-t-elle accusé lors d’une allocution au Congrès.

Peu après cette intervention, Donald Trump avait dénoncé « une chasse aux sorcières de caniveau ».

En dépit des nombreuses affaires qui ont secoué les premières années de la présidence de M. Trump, ce coup de tonnerre politique représente l’attaque la plus frontale contre le milliardaire républicain.

Procédure de destitution du président américain: trois précédents

Avant Donald Trump, seuls trois présidents ont fait l’objet d’une procédure en vue d’une destitution, mais aucun n’a été destitué.  

Andrew Johnson, épargné à une voix près en 1868

Le premier processus de destitution de l’histoire américaine vise le président Andrew Johnson, un démocrate du Sud, vice-président d’Abraham Lincoln et propulsé à la Maison-Blanche après l’assassinat de ce dernier en 1865.  

Fervent défenseur de la Reconstruction après la guerre de Sécession, il veut réintégrer les États du Sud dans l’Union. Il s’engage dans une féroce bataille avec le Congrès qui bloque toutes les lois, et notamment les « black codes » (lois racistes) votés par les représentants du Sud. Lorsque le président Johnson décide de limoger son secrétaire d’État à la Guerre, le Congrès lance une procédure de destitution à son encontre.  

L’ouverture d’une enquête en vue d’une destitution est avalisée par la Chambre des représentants. Au terme de cette enquête, M. Johnson est déclaré coupable de 11 délits passibles de destitution le 24 février 1868.  

Un procès s’ensuit dans une ambiance d’insurrection nationale rapportée par l’écrivain Mark Twain, mais le 16 mai, lors du vote final du Sénat, le président évite d’une voix la destitution. Il reste au pouvoir, mais perd l’investiture de son parti pour l’élection présidentielle suivante. Il sera réélu au Sénat cinq ans plus tard.

Richard Nixon, démissionne en 1974 pour éviter une destitution certaine

En 1974, Richard Nixon est accusé d’entrave à la justice et d’abus de pouvoir, dans le cadre du Watergate, du nom du siège du Parti démocrate à Washington espionné par le président républicain. Le scandale éclate après les révélations de deux journalistes du Washington Post.     

Les auditions à la commission judiciaire commencent le 9 mai 1974 et fin juillet, la commission judiciaire retient trois motifs de destitution à l’encontre de M. Nixon (entrave à la justice, abus de pouvoir et refus de se soumettre aux assignations) et transmet le dossier à la Chambre.

Mais M. Nixon démissionne le 9 août, avant le vote de la Chambre qui, le 20 août, décide néanmoins d’adopter le rapport de la commission par 412 voix contre 3.

Le 8 septembre, son successeur Gerald Ford lui accorde un pardon total.

Bill Clinton, acquitté par le Sénat en 1999

La troisième procédure d’« impeachment » est engagée le 8 octobre 1998 à l’encontre de Bill Clinton accusé d’avoir nié, sous serment, avoir eu des relations sexuelles avec Monica Lewinsky, stagiaire à la Maison-Blanche entre 1995 et 1997.

La Chambre des représentants vote l’ouverture d’une enquête sur le rôle du président démocrate dans l’affaire Lewinsky, dite « Monicagate » (du prénom de Monica Lewinsky). La mise en accusation est votée le 19 décembre pour parjure et entrave à la justice.  

Conformément à la Constitution, le procès du président s’ouvre au Sénat en janvier 1999, mais la procédure d’accusation n’obtient pas la majorité des deux tiers des voix des sénateurs.  

Bill Clinton est acquitté le 12 février 1999. Il reste au pouvoir jusqu’à la fin de son mandat en 2001.